Les surfaces commerciales nouvelles au plus bas depuis dix ans en Gironde

Seulement 10.000 m2 de surfaces commerciales nouvelles ont été autorisés en Gironde l'année dernière. C'est le plus faible total depuis dix ans. Le résultat de l'entrée en vigueur du zéro artificialisation nette (ZAN), dont on commence à tirer les premières conclusions. Mais d'autres facteurs viennent aussi expliquer cette forte baisse de la consommation foncière dans un département qui continue pourtant à gagner des habitants.
Actuellement en chantier, le projet Auchan Counord, à Bordeaux Chartrons, témoigne de la volonté de réintégrer les supermarchés dans un tissu urbain mêlant commerces, bureaux et logements.
Actuellement en chantier, le projet Auchan Counord, à Bordeaux Chartrons, témoigne de la volonté de réintégrer les supermarchés dans un tissu urbain mêlant commerces, bureaux et logements. (Crédits : Nhood, AFM)

Les records sont faits pour être battus ! En pleine crise sanitaire de la Covid-19, les nouvelles surfaces commerciales autorisées étaient déjà tombées au plus bas avec 17.500 m2 accordés en 2020. Mais la baisse est encore plus significative en 2023 avec à peine plus de 10.000 m2 autorisés. C'est le plus bas total depuis plus de dix ans et quatre fois moins que les 40.000 m2 consommés en moyenne chaque année depuis 2013. Ce résultat historique s'explique en partie par les mesures adoptées par les pouvoirs publics. Entrée en vigueur le 22 août 2021, la loi climat et résilience a été accompagnée de plusieurs décrets d'application, comme celui sur le zéro artificialisation nette (ZAN), datant du printemps 2022. Un objectif clair qui doit être atteint à l'horizon 2050. Pour y parvenir, une étape intermédiaire a été fixée obligeant les territoires à diviser par deux la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers d'ici 2030 par rapport à la décennie précédente.

Sur les cinq demandes examinées par la Commission départementale d'aménagement commercial (CDAC) l'an dernier, quatre ont été accordées. Signe de l'évolution des pratiques, tous les projets ayant obtenu le feu vert de l'instance départementale proposent de réinvestir des anciennes friches ou des locaux désaffectés. « La ZAN remet en cause les projets, il y a une volonté des acteurs publics de freiner le développement commercial avec la loi », explique Laurent Putz, responsable du département développement du territoire de la CCI Bordeaux Gironde. Même son de cloche du côté des professionnels de l'immobilier commercial. « L'arrivée de la loi ZAN a un impact majeur ! Il n'est plus possible aujourd'hui d'obtenir de nouvelles autorisations concernant les gros projets commerciaux », témoigne ainsi Sophie Boniou, directrice régionale retail de CBRE, le leader du marché.

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Contexte économique défavorable

Mais outre la ZAN, d'autres facteurs contribuent également à cette baisse significative. Le contexte économique peu favorable, avec notamment l'inflation, met les commerces sous pression. « Les enseignes ne peuvent plus supporter certaines charges. L'électricité, les taxes, tout augmente alors que le pouvoir d'achat des ménages baisse. Cela se répercute aussi sur l'activité des promoteurs de locaux commerciaux », poursuit Sophie Boniou. Sans compter la concurrence croissante du e-commerce au détriment des magasins physiques.

Le tissu girondin reste toutefois bien fourni en termes d'équipements commerciaux, et les professionnels de l'immobilier commercial ne se font pas de souci outre mesure : « Même s'il y a de moins en moins d'offres et de nouveaux projets sur Bordeaux, et de manière générale sur le territoire national, on continue d'avoir des demandes d'enseignes internationales. On n'a pas d'inquiétude sur la capacité du marché à s'adapter à ces nouvelles contraintes et sur la pérennité de l'activité en particulier au centre de Bordeaux », ajoute la directrice de CBRE.

Mais il reste difficile de satisfaire les demandes lorsque les locaux se font de plus en plus rares. Le centre-ville de Bordeaux est déjà complètement saturé. Par exemple, plus aucune offre n'est disponible sur la rue Sainte Catherine, artère principale de la ville prisée des investisseurs. « Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Il y a toujours des nouveaux projets, mais sans l'euphorie du mètre carré commercial comme cela avait pu être le cas la décennie précédente », complète-t-elle.

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L'enjeu de la mixité fonctionnelle

Les nouveaux projets de magasins n'ont plus rien à voir avec les précédents. Le plus grand centre commercial de Gironde, Mérignac Soleil, a entamé sa diversification pour arborer un visage plus mixte. Il en va de même pour les projets de plus petite envergure, qui s'installent maintenant au pied des immeubles de bureaux ou d'habitations. « Dorénavant, les opérateurs essaient d'intégrer plusieurs projets en un seul bâtiment, dans un besoin d'optimisation de l'espace », complète Laurent Putz. Un phénomène permettant aussi de rapprocher les gens en un seul lieu, généralement très accessible.

Certaines enseignes ont réussi à tirer leurs épingles du jeu. Parmi les dossiers accordés par la CDAC, deux concernent un magasin de bricolage et de jardinage. Surprenant au premier abord, l'explication s'avère être toute simple : « Depuis plusieurs années, on remarque que les ménages accordent plus d'importance à l'idée de bien aménager sa maison pour se sentir au mieux chez eux », observe Laurent Putz. La popularisation du télétravail a également joué un rôle dans la croissance des magasins de bricolage et de jardinage.

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Finalement, est-ce que l'objectif fixé par la ZAN sera atteint en 2030 ? Pas si sûr selon Laurent Putz, peu optimiste : « On a déjà consommé 30 % de l'enveloppe que l'on devait consommer jusqu'en 2030. » Des efforts supplémentaires sur les six prochaines années seront nécessaires pour que la Gironde entre dans les clous afin d'atteindre l'objectif prévu par la ZAN.

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Commentaire 1
à écrit le 13/06/2024 à 8:52
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"Le résultat de l'entrée en vigueur du zéro artificialisation nette (ZAN)" Mouais attention les gars je trouve qu'on lui met beaucoup sur le dos à la ZAN alors que nous sommes dans un contexte de crise économique majeure qui devrait pour vous autres ...

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