A Bordeaux Jean Fourche se rêve en Maillot jaune du vélo "Made in France"

Toute jeune entreprise, la société Jean Fourche lance un modèle innovant de vélo avec cette marque facile à retenir. Une machine fabriquée à partir de pièces massivement européennes, à l'exception du dérailleur japonais, et qui pourrait être bientôt assemblée en Nouvelle-Aquitaine. En attendant un vélo totalement français.
L'équipe de Jean Fourche : Benoit Maurin, Maël Le Borgne, Mathieu Courtois
L'équipe de Jean Fourche : Benoit Maurin, Maël Le Borgne, Mathieu Courtois (Crédits : Jean Fourche)

C'est entre les murs de l'atelier associatif l'Etincelle, dans le centre d'affaires alternatif Darwin, à Bordeaux Bastide, où les cyclistes apprennent à réparer leurs machines, que se sont rencontrés Mathieu Courtois, Maël Le Borgne et Benoit Maurin.

"Nous sommes tous les trois issus du milieu associatif et l'idée de créer un projet dans le vélo nous est venue il y a deux ans et demi. Le déclic a été de se rendre compte qu'il y avait une perte de savoir-faire industriel, que plus aucune entreprise n'était désormais capable de fabriquer un vélo en France, où il n'y a plus que des lignes d'assemblage. Les cadres viennent de Chine et de Taïwan. D'où l'idée de se lancer dans la création d'un vélo qui soit fabriqué le plus près possible de France", rembobine Benoit Maurin, cofondateur et président de la société bordelaise Jean Fourche.

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La fabrique de cadres de vélos la plus proche

A plus long terme les associés rêvent bien sûr de pouvoir aligner le tout premier vélo entièrement fabriqué en France. Un segment de marché très différent du vélomoteur électrique, comme ceux que produit Coleen depuis Biarritz, en particulier parce qu'à beaucoup plus faible valeur ajoutée. Dans l'immédiat, ce plus près pour la fabrication des cadres de vélo, les fondateurs de Jean Fourche l'ont localisé au Portugal. Il y a aussi des usines dans ce pays de navigateurs et Benoit Maurin semble y avoir trouvé une perle.

"Il s'agit d'une usine qui travaille dans l'industrie générale mais qui a conservé le savoir-faire et le matériel pour fabriquer des cadres de vélo. Une fois réalisés, ces cadres sont envoyés à Lyon pour y être peints, avant que les vélos ne soient assemblés près de Saint-Etienne" décrit le président de Jean Fourche.

Les trois associés ont passé une année entière à identifier des fournisseurs aussi proches que possible de l'Hexagone. Les pédaliers viennent également du Portugal, les selles d'Italie... La structure des marchés étant ce qu'elle est, les fondateurs de Jean Fourche n'ont  pas pu échapper au tout puissant Shimano, l'emblématique fabricant japonais de dérailleurs.

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Des mois de réflexion et prototypage pour le cadre

"Nous avons passé nos commandes de dérailleurs bien avant la crise de sortie du Covid et nous n'aurons pas de problèmes d'approvisionnement" rassure le cofondateur. Jean-Fourche ne se contente pas d'assembler des pièces pour ensuite livrer des machines logotés à sa marque. Le cœur structurel du vélo reste le cadre et c'est sur cette pièce centrale que les associés ont concentré leurs efforts en recherche et développement pour pouvoir accoucher d'un vélo vraiment nouveau.

Vélos Jean Fourche

Cadres des vélos Jean Fourche (photo Jean Fourche)

"Nous avons travaillé pendant des mois sur la conception et le prototypage du cadre qui a une géométrie particulière. Parce que nous voulions un vélo qui ait un centre de gravité très bas, ce qui le rend plus sûr, plus facile à enjamber. Partant de là, nous avons fait le pari d'offrir une grande plage de possibilités. La selle peut ainsi être surélevée de 1,50 mètres, sa hauteur de base, jusqu'à 1,90 mètre ! Notre vélo est conçu pour répondre aux besoins de l'adolescent comme de l'adulte, il est unisexe, et permet de garder le dos droit" déroule Benoit Maurin.

Une première série sortie d'usine de 60 vélos

Si les coudes, les oreilles et les doigts de pieds n'ont pas encore fait leur apparition dans le système de mesure en France il faut reconnaitre qu'avec les pouces, les roues de vélo comme les écrans d'ordinateurs ont vu le système métrique battu en brèche par ces approches organiques et médiévales de l'espace, dont la technologie étatsunienne continue à s'accommoder. C'est ainsi que les fondateurs de Jean Fourche ont choisi des roues d'un diamètre "de 24 pouces" (littéralement 83,82 centimètres -Ndlr), qui sont "ni trop petites ni trop grandes" précise Benoit Maurin. Les trois associés pensent pouvoir livrer leurs premières machines fin octobre et misent sur une première série de 60 vélos.

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"Les clients peuvent passer leurs précommandes sur notre site web où il est possible de choisir ses options, comme la couleur. Nous avons actuellement près de 30 vélos en précommande, les clients qui l'utilisent seront livrés fin octobre. Nous sommes en contact avec une dizaine de boutiques en France pour la distribution de nos vélos, auxquelles nous allons livrer une machine de démonstration" détaille le dirigeant.

Des paniers moyens à un peu plus de 1.000 euros

La marque Jean Fourche est d'ores et déjà assurée d'être présente à Bordeaux, dans deux boutiques, à La Rochelle, Paris, sans doute bientôt à Strasbourg et dans d'autres villes où se poursuivent les négociations.

"Le prix de nos vélos sera compris entre 700 et 1.200 euros, c'est du milieu de gamme. Le panier moyen de nos premières commandes se situe au-dessous de 1.000 euros. Notre chance c'est d'avoir anticipé en démarrant avec ce projet juste avant la pandémie de Covid-19" se réjouit Benoit Maurin.

Objectif : 500.000 euros de CA en 2022

L'entreprise compte réaliser 100.000 euros de chiffre d'affaires d'ici la fin de l'année, 500.000 euros l'an prochain et peut-être le double ou le triple en 2023 pronostique le président, qui compte bien recentrer le plus vite possible l'assemblage des Jean Fourche en Nouvelle-Aquitaine.

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Jean Fourche les Vélos

Modèles Jean Fourche (photos Jean Fourche)

Sans doute témoins d'un pic de la mondialisation les  promoteurs du service à haute valeur ajoutée, pourfendeurs d'une industrie jugée trop peu rentable, ont eu le vent en poupe en France pendant deux ou trois décennies mais sont aujourd'hui devenus inaudibles. Avec la crise sanitaire ce phénomène du retour à une pensée industrielle a explosé et la plupart des élus ont pris conscience que l'érosion des bases productives avait atteint un seuil critique en France. Mais relocaliser des activités manufacturières ne sera pas un long fleuve tranquille. Les vélos Jean Fourche seront ils l'hirondelle qui annonce le printemps, à défaut de le faire ?

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