La société ferroviaire de Nouvelle-Aquitaine et Occitanie emprunte 1,1 milliard d'euros pour acheter des TER

Pour préparer l'ouverture à la concurrence des trains régionaux, la société ferroviaire commune aux régions Nouvelle-Aquitaine et Occitanie vient de lever 1,1 milliard d'euros. Avec ce financement, elle aura pour mission de racheter le matériel roulant à la SNCF, d'assurer son entretien et de le mettre à disposition des futurs opérateurs.
Maxime Giraudeau
En Nouvelle-Aquitaine et en Occitanie, les rames TER n'appartiennent plus à la SNCF mais à la société publique créée par les conseils régionaux.
En Nouvelle-Aquitaine et en Occitanie, les rames TER n'appartiennent plus à la SNCF mais à la société publique créée par les conseils régionaux. (Crédits : SNCF)

Quand les régions reprennent la gestion des trains, c'est le monopole de la SNCF qui s'éloigne un peu plus. Alors que la réglementation européenne impose l'ouverture à la concurrence sur les lignes régionales, la Nouvelle-Aquitaine et l'Occitanie mettent carrément le paquet. Un an après avoir créé une société publique locale (SPL) pour racheter les rames TER à la SNCF, elles annoncent une levée de dette pour un montant colossal de 1,130 milliard d'euros.

Un emprunt global contracté à parts égales entre les deux collectivités auprès de la Banque européenne d'investissement (dont le prêt de 400 millions d'euros a été annoncé fin juin), la Banque des territoires, Crédit agricole Corporate & Investment Banking, Nord LB, Crédit Industriel et Commercial et La Banque Postale. Les remboursements courent sur du long terme : 16, 28 et jusqu'à 42 ans. De quoi sceller la reprise en main des régions sur le parc de la SNCF.

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Appel aux constructeurs européens

« On va être la première SPL à lancer un marché public en vue de l'acquisition de nouvelles rames. Habituellement on achetait dans le cadre d'accord historiques entre la SNCF et Alstom », avance Renaud Lagrave, vice-président de la Région Nouvelle-Aquitaine en charge des transports. Les appels d'offre pour l'achat de 20 à 30 rames côté Nouvelle-Aquitaine seront lancés dès l'automne. La société publique compte bien recevoir les candidatures de constructeurs européens comme CAF, Siemens ou Stadler. « Ce sera une première, ces trains qui circulent en Europe ne circulent pas encore en France car ils ne sont pas homologués », montre l'élu.

L'opération financière prépare ainsi le terrain pour l'arrivée potentielle d'un nouvel opérateur ferroviaire sur les lignes régionales. Pour l'heure, la SNCF reste maître à bord des TER avec la Nouvelle-Aquitaine jusqu'en 2030 et avec l'Occitanie jusqu'en 2032. « Dans un contexte d'ouverture à la concurrence du réseau TER, le matériel roulant ne peut pas rester la propriété seule de la SNCF. Il y a une nécessité pour les régions d'assurer la gestion et elles se demandent comment faire », évoque Edouard Homberg, conseiller en financement pour le cabinet EY, qui a accompagné les deux collectivités.

Alors que les régions Grand Est d'abord puis Hauts-de-France avaient créé leur propre SPL, la nouvelle venue dans le Sud-Ouest est la première qui associe deux régions. Elle est ainsi baptisée Spiit pour Société publique interrégionale d'investissement en faveur des transports. Et vise à optimiser l'action des deux partenaires.

Une société « créée à grands coups de dette »

« Grâce à la SPL, elles auront une plus grande capacité à aller chercher des opérateurs pour leurs commandes de nouvelles rames. C'est aussi une mise en commun de leurs ressources qui va permettre de mutualiser les coûts », cadre Edouard Homberg. Les volumes financiers à mobiliser vont être très importants. Les collectivités vont ainsi racheter des rames existantes à la SNCF (140 dans chaque région), acquérir des rames neuves bimode (électrique et diesel) ou innovantes avec des 100 % électriques ou à hydrogène. Mais elles vont aussi assurer l'entretien du parc roulant avec pas moins de 97 remises en état prévues sur des rames âgées d'une vingtaine d'années. La facture est importante car le coût de la révision correspond à leur prix neuf.

Mais le montage particulier choisi par les deux conseils régionaux socialistes est contesté. Dans les rangs centristes, on fustige le haut niveau d'endettement de l'opération. « Cette société est créée à grands coups de dette ! Financièrement on s'engage de manière très lourde alors qu'on est déjà endettés », tance Jean Dionis du Séjour, conseiller régional de Nouvelle-Aquitaine du groupe Centre et indépendants.

Pour lui, la région aurait dû passer par un outil plus classique : la délégation de service public. « Dans ce cas, c'est le concessionnaire qui assume l'investissement sur les matériels neufs et derrière il se rattrape avec les tarifs appliqués aux usagers. C'est le modèle de base des collectivités territoriales. Il a une vertu, celle de ne pas trop les endetter », oppose-t-il. Mais comme souvent sur les grands projets ferroviaires, que ce soit la LGV Bordeaux-Toulouse ou le transpyrénéen, la Région est prête à débourser en conséquence.

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Maxime Giraudeau

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Commentaires 3
à écrit le 10/08/2024 à 12:39
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Alors que les premières directives sur l'ouverture à la concurrence datent de 2001, les régions ont continué de transférer gratuitement les rames achetées aux différents constructeurs. Voilà maintenant qu'elles rachètent à la SNCF le dit matériel. D...

à écrit le 05/08/2024 à 8:14
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A quoi sert-il d´investir dans le train, soit la SNCF dans les faits, si l´extrême gauche profite de son ancrage syndicaliste dans la fonction publique pour prendre en otage le pays? C´est ce que Macron n´a jamais compris, sans parler de toutes les f...

à écrit le 26/07/2024 à 8:31
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Qui pique le pognon pour le train ?

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