L'année 2021 a été chargée pour l'entreprise girondine Hydrogène de France (HDF Energy) avec le succès de son entrée sur Euronext Paris en juin puis le lancement en septembre du chantier, maintes fois repoussé, du projet CEOG (centrale électrique de l'ouest guyanais). Et le début d'année 2022 s'inscrit pleinement dans cette dynamique avec notamment l'obtention du permis de construire de la future usine de piles à combustible de Blanquefort (Bordeaux Métropole) et sa pré-sélection très attendue dans la 2e vague du programme de financement européen IPCEI (Important project of commun european interest).
Un financement européen stratégique
Située sur 3,5 hectares sur une partie des friches industrielles libérées par l'ex Ford Aquitaine Industries à Blanquefort, la future usine d'HDF Energy s'étendra sur plus de 7.000 m2 avec une centaine d'emplois à la clef. Le permis de construire désormais en poche, la consultation des entreprises est lancée pour un début du chantier cet été et une ouverture prévue en septembre 2023. "Nous recrutons activement en ce moment pour constituer les équipes en amont afin qu'elles soient prêtes à démarrer dès la mise en service de l'usine", précise à La Tribune Damien Havard, le CEO et fondateur de l'entreprise. "Nous cherchons des profils commerciaux, d'ingénieurs, d'acheteurs, de logisticiens, d'opérateurs mais aussi des comptables et responsables RH", poursuit le dirigeant de l'entreprise qui emploie désormais une soixantaine de salariés, dont 25 à Bordeaux et 35 développeurs commerciaux à l'international.
Mais cette usine, désormais sur les rails, pourrait n'être que la première pierre d'un projet industriel bien plus ambitieux que Damien Havard n'hésite pas à qualifier de "giga factory" ou "giga usine". La clef de cette ambition tient en cinq lettres : IPCEI (important project of commun european interest / projets importants d'intérêt européen commun). Ce vaste programme de financement européen cible des investissements d'avenir et a notamment bénéficié au consortium ACC pour son usine pilote de batteries électriques qui vient d'être inaugurée à Nersac, près d'Angoulême.
Entre 500 et 1.000 emplois ?
Il y a deux mois dans nos colonnes, Damien Havard n'avait pas caché son agacement, voire son inquiétude, quant aux atermoiements de Bercy pour choisir les projets français éligibles. Il est désormais rassuré : "Nous sommes pré-sélectionnés par la France, c'est une étape importante même si cela ne signifie pas que nous le serons au niveau européen en fin d'année ! Mais je suis confiant car parmi les candidats il n'y pas beaucoup de projets vraiment industriels", observe le CEO, sachant qu'on parlerait alors d'un soutien européen de plusieurs dizaines de millions d'euros sur cinq ans. Les financements de certains projets grimpent à quelques centaines de millions d'euros.
Quel serait alors l'impact pour Blanquefort et, plus largement, l'écosystème bordelais ?
"L'objectif serait d'au moins doubler la taille de l'usine sur le site actuel et de s'étendre aux environs. On parle d'une capacité de production proche du gigawatt avec entre 500 et 1.000 créations d'emplois ! Cela nous permettrait d'aller plus rapidement et de manière plus indépendante sur les applications industrielles dans les domaines maritime et ferroviaire", s'exclame Damien Havard.
Car, rappelons-le, l'usine actuelle, qui sera dotée d'une capacité de 50 MW, est destinée à la fabrication en série de piles à combustibles à l'hydrogène à forte puissance (supérieur à un MW) pour les marchés du stockage de l'énergie renouvelable et, à plus long terme, de la mobilité lourde et des data centers. HDF Energy dispose pour cela d'une exclusivité mondiale pendant encore cinq ans sur la technologie des cœurs de pile de la société canadienne Ballard Power Systems. La production en série est programmée pour 2026.
L'essor se poursuit à l'international
Car, au-delà de la métropole bordelaise, c'est bien à l'international qu'Hydrogène de France bâti son avenir avec des projets dans, déjà, une trentaine de pays, tout particulièrement aux Caraïbes. Outre le projet CEOG en Guyane, dont le terrain est en train d'être défriché, l'entreprise vient d'acquérir 70 % de NewGen, une future unité industrielle de production d'hydrogène à Trinité-et-Tobago. À partir de la chaleur fatale produite par KGL et d'une installation photovoltaïque, HDF Energy y produira de l'hydrogène vert qui sera directement réinjecté dans le réseau d'une usine d'ammoniaque pour représenter 20 % de sa consommation actuelle. De quoi économiser à terme "environ 200.000 tonnes de CO2 par an", selon HDF Energy.
L'entreprise girondine est également à l'initiative, avec son actionnaire Rubis, d'un projet à 100 millions de dollars à La Barbade. Comme en Guyane, il s'agit d'une centrale "renewstable" combinant production d'électricité renouvelable et capacité de stockage via l'hydrogène pour assurer une distribution stable et continue d'électricité. La centrale RSB (renewstable Barbados) alimentera 16.000 foyers de cette île des Caraïbes.
"Au total, nous avons pour 500 millions de dollars de projets dans la zone Amérique Latine et Caraïbes qui est la zone où nous sommes le plus actif", précise Damien Havard. "Nous portons aussi des projets en Europe mais à un horizon plus lointain même si les tensions actuelles sur les marchés de l'énergie tendent à renforcer et accélérer les choses. On tablait sur dix ans pour le marché européen, ça ira probablement plus vite !"
Cliquez sur l'image pour l'agrandir. Les projets en portefeuille d'Hydrogène de France début 2022 (crédits : Hydrogène de France).
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