La programmation de logements sociaux chute sévèrement à Bordeaux Métropole

La programmation de nouveaux logements locatifs sociaux a reculé de -17 % en Nouvelle-Aquitaine et jusqu'à -30 % à Bordeaux Métropole, selon l'Union régionale HLM. "Il ne faut pas que l'écologie et la lutte contre le réchauffement climatique fassent obstacle aux solidarités, particulièrement dans cette période de crise économique", prévient Muriel Boulmier, la présidente des bailleurs sociaux néo-aquitains, qui pointe l'attitude réticente des nouveaux élus locaux.
La programmation de logements locatifs sociaux est en repli de -17 % en Nouvelle-Aquitaine en 2020.
La programmation de logements locatifs sociaux est en repli de -17 % en Nouvelle-Aquitaine en 2020. (Crédits : UR HLM Nouvelle-Aquitaine)

La présidente de l'Union régionale HLM de Nouvelle-Aquitaine, Muriel Boulmier, avait bien du mal à garder le sourire ce mardi 26 janvier lors de ses vœux. 2020 étant une année électorale, marquée par une campagne municipale à rallonge, les projets de nouvelles constructions, particulièrement de logements sociaux, ont marqué le pas. Et les deux confinements liés au Covid-19 n'ont clairement pas aidé à retrouver du dynamisme ni de l'optimisme. A tel point que le nombre de logements locatifs sociaux programmés en 2020 en Nouvelle-Aquitaine a tout juste atteint la barre des 7.800 logements. Soit un repli de -17 % sur un an et de -21 % par rapport à la moyenne des quatre dernières années.

"L'objectif initial était de 10.000 logements programmés dans la région. C'est donc une baisse [de -22 %] absolument conséquente des nouveaux projets alors que la demande continue à augmenter dans nos territoires et que la crise et la fragilité économique vont s'installer en 2021 et 2022 particulièrement dans les familles modestes", alerte Muriel Boulmier.

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HLM Nouvelle-Aquitaine

La programmation de logements sociaux dans la région depuis 2016 (Crédits : Union régionale HLM).

Cycle électoral oblige, la tendance est similaire au niveau national avec seulement 87.000 logements sociaux programmés, soit 21 % de moins que l'objectif de 10.000 unités fixé par le gouvernement. Ce dernier visait même 123.000 logements mi-2020 avant de se raviser.

Trajectoires contrastées

Cependant, si Bordeaux Métropole et, la Gironde dans son sillage, font figure de mauvais élèves, ce n'est pas le cas de tous les départements néo-aquitains. Les Deux-Sèvres, la Haute-Vienne, la Dordogne ou encore les Pyrénées-Atlantiques affichent des programmations en hausse en 2020 par rapport à 2019. "Le fait métropolitain a beaucoup d'attrait mais tend à diminuer ses objectifs de logements sociaux tandis que les villes moyennes croient à leur développement et osent construire des logements sociaux", souligne Muriel Boulmier.

Carte union régionale HLM

Cliquez sur la carte pour l'agrandir (crédits : Union régionale HLM)

Bordeaux Métropole dans le viseur

Des disparités régionales fortes qui amènent une mise au point très claire de Muriel Boulmier sur la stratégie de la nouvelle majorité EELV-PS sortie des urnes en juin 2020, à Bordeaux et Bordeaux Métropole.

"Les politiques mises en place par les nouveaux exécutifs, notamment à Bordeaux Métropole, où l'on constate une baisse de la programmation de l'ordre de 30 %, se traduisent par un vrai effet masse. Nous demandons à Bordeaux Métropole de créer les conditions d'un politique foncière sociale parce qu'il n'y aura pas de logements locatifs sociaux sans foncier", rappelle la présidente de l'union régionale avant d'enfoncer le clou. "Je le dis clairement : il ne faut pas que l'écologie et la lutte contre le réchauffement climatique fasse obstacle aux solidarités. Il faut continuer accueillir dans la métropole les actifs, les étudiants, les personnes âgées, etc."

Des remontrances qui ne devrait pas faire plaisir au maire écologiste de Bordeaux Pierre Hurmic, qui s'est engagé à "rattraper le retard inouï [de la ville de Bordeaux]" au regard de la loi SRU [solidarité et renouvellement urbain] en construisant 1.500 nouveaux logements locatifs sociaux par an tout au long de son mandat de six ans. D'autant que sa politique d'urbanisme est pilotée par Bernard-Louis Blanc qui a été directeur général d'Aquitanis, le bailleur social de Bordeaux Métropole, de 2008 à 2019.

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 "Je souhaite qu'il tire toutes les conséquences de sa bonne connaissance du secteur pour atteindre les objectifs [...] Mais là, force est de constater que les bailleurs sociaux n'ont pas eu la capacité de recevoir les programmations de nouveaux projets de la part du nouvel exécutif métropolitain. Le principe de la réalité des besoins doit primer et le foncier doit être préservé et utilisé pour le logement social", assure Muriel Boulmier. En 2019, 6.300 logements locatifs sociaux ont été effectivement livrés en Nouvelle-Aquitaine dont 2.200 à Bordeaux Métropole.

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Relance, sécurité et bas-carbone

La présidente des organismes HLM néo-aquitains a également exhorté l'Etat et les élus locaux à prendre toute leur part dans la lutte contre l'insécurité après le meurtre par balle survenu début janvier dans le quartier des Aubiers, à Bordeaux. "La tendance à la détérioration s'accélère mais nos alertes depuis des mois sont toutes restées lettre morte, il faut le dire", regrette-t-elle. Elle prône le retour d'une police de proximité et d'un travail commun de la police, de la justice, des collectivités locales et des bailleurs sociaux tout en excluant pour l'instant la création d'un groupement inter-bailleurs de sécurité comme il en existe notamment en Ile-de-France ou en Occitanie, privilégiant plutôt la vidéosurveillance, les stratégies de sécurité résidentielle et l'aide aux associations.

Enfin, outre la création d'un groupe de travail sur la construction bas-carbone, dans le cadre de l'évolution de la réglementation environnementale 2020, Muriel Boulmier a aussi regretté le manque d'ambition du plan de relance de l'Etat en matière de logement social "alors même que 98 % des dépenses de construction des organismes HLM vont à des TPE et PME locales". Selon la responsable régionale, les bailleurs sociaux de la région sont prêts à investir 470 millions d'euros par an dans la réhabilitation thermique et la requalification lourde de leur patrimoine quand, dans le même temps, le plan de l'Etat ne prévoit que 250 millions d'euros au niveau national, "dont seulement 8 millions d'euros pour les douze départements et les 600.000 locataires de Nouvelle-Aquitaine". De quoi réhabiliter à peine 800 logements sur les 11.000 identifiés par l'union régionale. "Ce plan de relance, j'y ai cru et j'aurai aimé que la Nouvelle-Aquitaine puisse en être le fer de lance. Mais cette situation m'inquiète", conclut-elle.

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A noter que le congrès national de l'Union sociale pour l'habitat, qui devait de se tenir à Bordeaux en septembre 2020, est toujours annoncé en Gironde théoriquement pour le mois de septembre à 2021.

Loi SRU : 22 communes hors des clous en Nouvelle-Aquitaine

Selon le bilan triennal de l'application de la loi SRU, publié il y a quelques jours par le ministère du Logement, 22 communes sont carencées en Nouvelle-Aquitaine sur la période 2017-2019, c'est-à-dire qu'elles n'ont pas suffisamment construit au regard du rythme nécessaire pour atteindre l'objectif de 20 % ou de 25 % de logements sociaux d'ici 2025. Ces communes sont en Charente-Maritime (Angoulins, Nieul-sur-Mer, Royan, Saint-Georges-de-Didonne, Saint-Palais-sur-Mer, Saujon, Tonnay-Charente et La Tremblade), en Dordogne (Bergerac, Prigonrieux et Trélissac), en Gironde (Arcachon, Gujan-Mestras, Izon, Saint-Aubin-de-Médoc et La Teste-de-Buch) et dans les Pyrénées-Atlantiques (Ascain, Biarritz, Bizanos, Hendaye, Mouguerre et Urrugne). Au niveau national, 53 % des communes concernées (soit 550 communes) n'ont pas remplis leurs objectifs et 280 sont considérées comme carencées. "Cette loi est absolument fondamentale depuis 20 ans et a permis d'atteindre des objectifs inespérés. Pour autant, elle est perfectible. Il y a des territoires qui ne font rien, d'autres qui ont du mal à trouver du foncier et d'autres où il n'y a objectivement pas besoin de construire, c'est une réalité !", réagit Muriel Boulmier, qui préconise une approche plus concertée au niveau local.

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