Métro à Bordeaux : cinq questions sur les deux tracés envisagés par les élus métropolitains

L'agglomération bordelaise sera-t-elle traversée par une ligne de métro automatique d'ici 2035 ? Rien n'est encore décidé mais deux corridors ont été retenus par les élus pour être étudiés d'ici le mois de septembre. Un tracé unique sera ensuite exploré en profondeur d'ici la fin de l'année. Objectifs, tracés, calendrier, coûts, soutiens politiques : voici ce qu'il faut savoir sur cette infrastructure d'au moins trois milliards d'euros.
Ce tracé d'un métro à Bordeaux est l'un des deux retenus par les élus en vue d'une étude approfondie.
Ce tracé d'un métro à Bordeaux est l'un des deux retenus par les élus en vue d'une étude approfondie. (Crédits : Bordeaux Métropole)

« L'objectif est de mener une étude sérieuse qui n'évacue aucun sujet et qui évalue la pertinence d'un métro, les opportunités et les risques, sa faisabilité technique mais aussi sa soutenabilité financière », cadre Christine Bost, la nouvelle présidente (PS) de Bordeaux Métropole. Le bureau métropolitain examinera le 23 mai prochain les conclusions de la première phase de « l'étude d'opportunité et de faisabilité pour la réalisation d'un métro sur la métropole bordelaise » menée depuis septembre 2023 par la direction des mobilités de la Métropole et les équipes du cabinet d'ingénierie Artelia. Et, à ce stade, deux tracés ont été jugés pertinents et l'un d'entre eux semble tenir la corde auprès des élus.

  • Pourquoi un métro à Bordeaux ?

On l'entend souvent, Bordeaux est, avec Nantes, la seule grande agglomération française qui ne dispose pas d'un métro. La capitale girondine ayant opté au tournant des années 2000 pour un réseau de tramway long de 82 km. Le Schéma des mobilités voté en 2021 se projette jusqu'à 2030 en combinant une « robustification du tramway », des lignes de bus et cars express, le RER métropolitain et le réseau cyclable. « Notre ambition est aussi de nous projeter à l'horizon 2040 en prenant en compte la croissance démographique tonique de l'agglomération, justifie Christine Bost. La métropole millionnaire n'est pas un objectif mais elle sera une réalité, que ce soit en 2038 ou en 2045. » Bordeaux Métropole, qui compte 815.000 habitants, gagne 1,25 % d'habitants supplémentaires chaque année.

Et c'est donc pour répondre à cette croissance et à la saturation attendue des transports en commun autour de 2030 qu'une ligne de métro est envisagée. En desservant les zones les plus denses en termes de population et d'emploi, un métro automatique doit viser autour de 200.000 voyageurs par jour, soit près du double de la ligne A du tramway (105.000 voyageurs quotidiens), transportés à 30 ou 40 km/h, contre 18 à 25 km/h pour un tramway.

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  • Quels tracés sont envisagés ?

Cinq corridors assez larges en intra-rocade ont été envisagés ces derniers mois par la Métropole et Artelia avec l'objectif de desservir les deux rives de la Garonne, le centre-ville de Bordeaux et les principaux sites générateurs de déplacements mais aussi de soulager la ligne A du tramway. Deux d'entre eux ont été retenus afin de faire l'objet d'une étude approfondie.

Le premier, baptisé n°2, est long de 22 km pour desservir assez largement la rive droite, l'opération d'intérêt national Bordeaux Euratlantique, Bègles, le campus de Talence-Pessac et le centre de Pessac.

Métro bordeaux

Le corridor n°2. Cliquez sur l'image pour l'agrandir.

Le second, dénommé n°3bis, déroule lui aussi 22 km de la gare de Cenon, sur la rive droite, à Pessac centre, mais, au lieu de desservir Bègles, il privilégie la desserte de Mériadeck, de la Cité administrative et du CHU de Pellegrin. « C'est le scénario le plus plébiscité jusqu'à présent car il coche toutes les cases du cahier des charges », souligne Karine Mabillon, la directrice des mobilités de Bordeaux Métropole.

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Le corridor n°3bis. Cliquez sur l'image pour l'agrandir.

La satisfaction de l'association Métro de Bordeaux

« Etant à l'origine de la relance de cette idée d'un métro à Bordeaux, nous nous réjouissons de l'avancement des travaux », réagit Mickaël Baubonne, porte-parole de l'association Métro de Bordeaux. « Le 3bis nous semble être de loin le plus pertinent parce qu'avec le CHU il dessert le premier employeur de la région. Et il reprend assez largement le tracé que nous avons proposé dès 2021 ! » Satisfaite, l'association s'interroge, à l'inverse, sur la nécessité de desservir l'Arena, qui peut sembler superflue en termes de trafic, et plaide pour un terminus de la ligne à Pessac Thouars, dernier quartier prioritaire sans mode de transport lourd, plutôt qu'à Pessac centre qui bénéficie déjà du tramway.

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  • Quel sera le calendrier de la suite des études puis du chantier ?

Ces deux hypothèses de tracés vont être étudiées de plus près d'ici septembre 2024 pour en évaluer la faisabilité technique, l'insertion urbaine et le potentiel de fréquentation dans une logique intermodale. Si cette deuxième phase s'avère concluante, un seul tracé sera retenu pour être expertisé de manière approfondie pendant trois mois supplémentaires pour en mesurer l'estimation financière, l'évaluation socio-économique et le bilan carbone. Fin 2024 ou début 2025, les élus auront donc le scénario final et détaillé de ce que pourrait être une ligne de métro à Bordeaux. Un vote pourrait alors intervenir avant ou, plus probablement, après les élections municipales du printemps 2026. Il faudra ensuite compter au moins une douzaine d'années - six ans d'études et de recours puis six ans de chantier - avant d'envisager une mise en service qui pourrait donc intervenir, au plus tôt, à l'horizon 2038-2040.

  • Combien coûterait une future ligne de métro ?

« À titre personnel, je trouverais formidable qu'on puisse avoir un métro à Bordeaux ! Mais sommes-nous en capacité de le faire ? », interroge Christine Bost, pointant l'inévitable question de la soutenabilité financière d'une telle infrastructure. Au-regard des chantiers les plus récents, à Toulouse et à Lyon, une ligne de métro automatique coûte entre 130 et 150 millions d'euros du kilomètre. Le projet bordelais, long d'une vingtaine de kilomètres, devrait donc dépasser les trois milliards d'euros d'investissements. « Trois milliards c'est l'équivalent de ce que dépensera la Métropole pour les mobilités pendant tout le mandat en cours en investissement et en fonctionnement. Cela aura donc nécessairement un impact sur les autres projets de mobilité », prévient la présidente.

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  • Quels soutiens politiques ?

« Le métro n'est ni de droite ni de gauche et n'est l'ennemi de personne ni d'aucun autre projet de transport. Cette étude de faisabilité est apolitique », brandit volontiers Emmanuel Sallaberry, le maire (divers centre) de Talence et conseiller métropolitain délégué au projet de métro. Mais un projet de cette ampleur reste par nature un objet politique qui suscitera des débats au-delà des clivages droite-gauche traditionnels. La diversité politique est de mise parmi les quatre élus qui ont retenu ces deux corridors : Christine Bost (PS), Clément Rossignol-Puech (EELV), Claude Mellier (PCF) et Emmanuel Sallaberry (groupe de droite et du centre). On note l'absence de Pierre Hurmic, le maire écologiste de Bordeaux, qui n'a jamais caché son hostilité à un métro qui traverserait la ville centre. Et si chacun attend de connaître les conclusions de l'étude fin 2024 ou début 2025, le groupe d'opposition Métropole Communes (droite et centre) soutient la démarche et se prépare déjà à en faire un sujet politique en vue des municipales du printemps 2026.

« Les habitants n'expriment pas spontanément une envie de métro et quand on leur en parle ils s'inquiètent de l'impact du chantier sur l'effondrement des échoppes », remarque également le maire de Bègles, Clément Rossignol-Puech, qui insiste sur le bilan carbone du projet et son impact sur la qualité de l'air. Bref, « il n'est pas exclu que le métro soit un sujet de campagne ! », conclut Christine Bost. D'ici là, les élus métropolitains se réuniront le 1er juin prochain pour inaugurer la première ligne de bus express entre la gare Saint-Jean et Saint-Aubin-du-Médoc.

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Commentaire 1
à écrit le 14/05/2024 à 20:03
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"Cette étude de faisabilité est apolitique" Ce qui ne veut pas dire qu'elle est forcément intelligente. Allez les bordelais, vous avez une belle ville mais vous vous déplacerez sous terre comme les rats, comme les parisiens.

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