Les promesses du biogaz bientôt produit au port de Bordeaux

EN CHIFFRES. Le Grand Port Maritime de Bordeaux inaugurera début 2025, si tout va bien et avec un an de retard, son unité de méthanisation sur la presqu'île d'Ambès. Le site pourra collecter des milliers de tonnes de biodéchets, alimenter 4.000 foyers en biogaz et fournir un fertilisant propre à l'agriculture. La première pierre a symboliquement été posée ce 24 octobre.
Maxime Giraudeau
La modélisation du futur méthaniseur de CVE sur un terrain du Grand Port Maritime de Bordeaux.
La modélisation du futur méthaniseur de CVE sur un terrain du Grand Port Maritime de Bordeaux. (Crédits : CVE)

Mais où est le biogaz ? A l'arrivée sur le site du méthaniseur, on cherche encore du regard l'installation. Derrière les immenses cuves du dépôt pétrolier de Bassens, le terrain, propriété du Grand Port Maritime de Bordeaux (GPMB) est en chantier. L'unité de méthanisation prévue pour cette fin d'année a du retard, en raison d'une implantation sur zone humide qui complique le terrassement.

C'est pour le début d'année 2025 que doit désormais être livrée l'infrastructure, mais elle constitue déjà une fierté pour ses partenaires. « C'est la première pierre de la mutation économique de notre zone industrialo-portuaire. On est en train de sortir d'un modèle économique qui repose sur les matières fossiles pour se diriger vers une économie circulaire », se félicite Jean-Frédéric Laurent, directeur général du GPMB. Représentants du port, élus locaux et nationaux et partenaires privés étaient réunis ce 24 octobre pour la pose très symbolique de la première pierre à Bassens. Un geste célébré dans un enthousiasme collectif, autour d'un procédé qui utilise la fermentation de la matière organique pour produire de l'énergie.

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« C'est le commencement d'une nouvelle ère pour le territoire de Bordeaux Métropole, où l'on créé une boucle vertueuse entre les activités des habitants, portuaires et agricoles. Nous sommes en passe de bâtir une filière globale de valorisation », applaudit Arnaud Bossis, directeur général de CVE, développeur d'installations biogaz basé à Marseille. Les partenaires ont présenté les enjeux chiffrés de l'un des premier méthaniseur sur une commune de Bordeaux Métropole.

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Alexandre Rubio le maire de Bassens, Nathalie Delattre sénatrice de Gironde, Nordine Guendez maire d'Ambarès-et-Lagrave, Arnaud Bossis directeur général de CVE, Jean-Frédéric Laurent et Philippe Dorthe du GPMB, Mathieu Anglade directeur régional de l'Ademe et Guillaume Riou vice-président de la Région Nouvelle-Aquitaine. (crédits : MG / La Tribune)

25.000 tonnes de déchets valorisés par an

Pour faire fonctionner le méthaniseur, CVE va devoir collecter des biodéchets. Ils seront à 80 % issus des résidus des activités industrielles de la zone portuaire et de l'industrie agroalimentaire locale (des graisses notamment). Les 20 % restants proviendront des invendus de la grande distribution, qui trouve là une voie de sortie au gaspillage alimentaire sans répondre à l'impératif de sobriété. 70 % de la masse sera collectée dans un rayon inférieur à 20 kilomètres. Au total, ce seront donc 25.000 tonnes de biodéchets qui transiteront chaque année sur le site. Soit l'équivalent d'une année de gaspillage alimentaire de la population de Bordeaux Métropole.

La presqu'île produira chaque année l'équivalent de 32 MWh d'énergie, pour un biogaz composé à 60 % de méthane et à 40 % de CO2. De fait, il se destinera à deux usages. Grâce à sa teneur en CO2, il pourra servir à des procédés industriels, pour produire des carburants de synthèse par exemple.

4.000 foyers alimentés en biogaz

Mais surtout, le biogaz va alimenter 4.000 foyers métropolitains en énergie propre grâce au raccordement prévu par Régaz. Le gestionnaire de réseau peut profiter d'une localisation proche des conduites de gaz déjà existantes à quelques centaines de mètres du méthaniseur. « Cela engendre une inversion du sens d'acheminement du gaz. Avant, l'approvisionnement en gaz était centralisé sur la ville, puis injecté sur le réseau. Avec l'unité de méthanisation, le gaz est produit au nord de Bordeaux puis acheminé vers la ville-centre », détaille Anne-Florence Castaing, cheffe du département études et innovation de Régaz.

La quasi totalité des biodéchets entrants, soit 24.000 tonnes, servira ensuite de fertilisant à l'agriculture. Car, en effet, une fois le biogaz produit, les biodéchets deviennent un digestat, solide ou liquide, qui se révèle être un engrais puissant et d'origine naturelle. Il pourra être stocké jusqu'à huit mois sur le site avant d'être fourni gratuitement aux agriculteurs locaux - en échange d'une participation aux frais de transport - qui auront ainsi de quoi fertiliser l'équivalent de 1.500 hectares de terres chaque année.

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100 % de gaz vert en 2050

La Région Nouvelle-Aquitaine s'est fixé comme objectif de remplacer l'ensemble du gaz d'origine fossile consommé par du gaz vert à horizon 2050. Avec la mise en service du plus grand méthaniseur régional en mai dernier à Lacq (64), le biogaz représente 5 % dans le Sud-Ouest 5 % de la consommation totale de gaz. CVE va déployer deux autres méthaniseurs à Mios (33) et en Dordogne, quand son concurrent Moulinot construit une installation équivalente avec Bordeaux Métropole pour valoriser les déchets des habitants. Une autre installation vient d'être inaugurée à Aillas (33) par Gaz de Bordeaux et Teréga avec Mélusine Energie pour y valoriser près de 30.500 tonnes d'intrants chaque année.

Le biogaz - ou biométhane ou gaz renouvelable - par opposition au gaz naturel d'origine fossile, désigne la production de méthane à partir de ressources renouvelables, comme les déjections animales, résidus de cultures, cultures intermédiaires, bio-déchets, herbe ou algues. Il est cinq à dix fois moins émetteur en émissions carbone selon différentes études de GRDF.

GRDF biogaz

Cliquez sur l'image pour l'agrandir (crédits : GRDF).

Une zone humide d'un hectare impactée

La future unité se déploiera sur 2,8 hectares, entre un espace logistique, le méthaniseur à la forme de gros dôme de béton et un espace de stockage de la matière traitée. Point noir de la construction, la zone humide auparavant présente va être artificialisée ou a minima impactée par le projet. Une compensation d'1,5 hectare est menée à proximité pour rétablir l'habitat de la Buscarle de Cetti, un petit oiseau de la famille des passereaux.

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Des travaux inattendus de terrassement retardent le chantier de CVE. (crédits MG / La Tribune)

Le méthaniseur tournera 24h/24 et 7j/7 en employant trois à quatre personnes. Il sera équipé de systèmes de confinement des vapeurs nauséabondes afin de limiter les nuisances pour les riverains. A cheval entre les communes de Bassens et Ambarès-et-Lagrave, il est au cœur du complexe industrialo-portuaire de la presqu'île entre Garonne et Dordogne, jouxtant le dépôt pétrolier et le site de Michelin. Un ensemble soumis à de fortes pressions environnementales et dont la transition est pilotée au sein de l'Opération d'intérêt métropolitaine Arc Rive Droite.

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Maxime Giraudeau

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