C'est une entreprise phare dans l'écosystème coopératif, présente à Bordeaux depuis le début des années 2000. L'opérateur de véhicules en autopartage Citiz Bordeaux, rattaché à un réseau national d'une quinzaine de villes, a vu les usages changer plus d'une fois en matière de mobilités. C'est aujourd'hui un changement d'usage dans l'autopartage qui lui fait prendre un nouveau tournant. Depuis le 3 mai, son application mobile héberge seize véhicules de l'autre société coopérative Titi Floris, et notamment des utilitaires, en plus des 125 modèles de son parc automobile à Bordeaux.
Peu de différences entre les deux opérateurs : les voitures de Citiz doivent être réservées à l'avance tout comme celles de Titi Floris. Malgré la poussée du free-floating (flottes de véhicules en libre-service), l'entreprise bordelaise continue à défendre le modèle d'autopartage sur des trajets de longue durée : compter 12 heures et 84 kilomètres pour ses standards de location moyens. Néanmoins, la Scic (Société coopérative d'intérêt collectif) avait fait le choix en 2017 de lancer son offre en free-floating Yea! pour soutenir des usages qui évoluent vers davantage de flexibilité. Alors que celle-ci représentait 25 % de l'activité de l'entreprise au début, et qu'il s'agit d'une pratique en plein essor, Citiz cherche volontairement à diminuer cette part pour renforcer l'autopartage.
"Du moment où l'on ne présentait pas de service en free-floating, il y avait un risque de ne pas pouvoir attirer une frange des consommateurs, notamment les jeunes" justifie Nicolas Guenro, directeur de Citiz Bordeaux depuis 2008. Avant de se projeter sur le nouveau partenariat : "Titi Floris va nous permettre d'élargir notre couverture géographique sur des territoires où nous n'irions pas directement."
Les professionnels louent moins
Titi Floris, qui avait déjà rejoint Citiz en 2021 sur Nantes, reste propriétaire des seize véhicules mis à disposition. Et touchera un pourcentage sur les recettes réalisées par sa consœur bordelaise. Citiz diversifie sa flotte mais "sans acquérir des véhicules qui n'auraient pas été assez utilisés pour être viables économiquement". Une stratégie qui s'explique par le haut degré de concurrence dans le secteur de la micro-mobilité, même si le free-floating n'est pas vu comme un concurrent direct.
Jusqu'ici pour Citiz, la fréquence d'utilisation des véhicules s'élève à moins d'une location par jour (0,9 en moyenne). Mais côté distances parcourues, les voitures accomplissent 25.000 kilomètres chaque année en moyenne. Soit deux fois plus qu'un véhicule possédé par un particulier. De quoi accomplir son objectif de "démotorisation" des mobilités. A travers cette tendance, la société bordelaise, calquée sur un modèle éprouvé dans d'autres villes, est parvenue à créer une dynamique économique viable.
Après une baisse de près de 20 % de son chiffre d'affaires en 2020 à cause du Covid, elle a réalisé son meilleur bilan l'an passé avec un résultat dépassant les 1,2 million d'euros. Un redressement aidé par "une activité qui est, plus qu'avant, portée par les loisirs et les vacances", observe Nicolas Guenro. En 2019, 40 % des recettes provenaient des utilisateurs professionnels et des salariés, avant que cette part ne se réduise durablement. Et qu'une nouvelle crise n'éclate.
Délicate transition électrique
Au 1er avril 2022, le réseau national Citiz a été contraint d'augmenter ses tarifs pour faire face à la hausse des prix du carburant, conséquence directe de la guerre en Ukraine. En effet, l'offre de location de la société coopérative inclut directement les coûts liés au carburant. Elle bénéficie d'ailleurs d'un partenariat avec Total, à laquelle elle règle directement l'approvisionnement effectué par ses clients. Autrement dit, "quand le carburant prend 10 centimes, c'est de la marge directe qui s'en va pour nous", relaie le directeur.
Malgré ces difficultés conjoncturelles, Citiz compte aussi augmenter l'effectif de son parc en investissant dans de nouveaux véhicules. Objectif : passer de 125 à 160 unités d'ici l'été à Bordeaux. Tout en amorçant un passage - très lent - à l'électrique. La faute à des technologies encore peu compatibles avec le modèle économique de l'autopartage. "Il y aurait une maturité sur le partage des véhicules électriques, à partir du moment où des véhicules de type Clio ou C3 auront 400 kilomètres d'autonomie avec un prix d'achat comparable au véhicule thermique. Techniquement, on pourrait faire de l'autopartage avec des Tesla. Mais ça coûterait trop cher", développe Nicolas Guenro. Citiz pourrait accueillir 8 % de véhicules électriques d'ici l'été, contre 3 % actuellement.
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