"La construction a été sécurisée à 200 % !" Le directeur de Carmo Wood France, Custodio Ximenes, s'est réjoui de présenter les nouveaux bureaux flottants de son entreprise, ce vendredi 29 avril, sur l'eau des Bassins à flot à Bordeaux, tout en sachant qu'il aurait besoin d'apporter des garanties aux observateurs présents. La nouvelle structure de plus de 300 m2 doit accueillir dès le mois prochain le siège de Carmo Wood France - émanation de l'entreprise portugaise éponyme - déjà situé dans le quartier.
Avec cette commande, le spécialiste des structures en bois, notamment pour la viticulture, concrétise une première en France. Pas une péniche mais une barge à fond plat, pas un immeuble mais un bateau à part entière, la nouvelle structure mesure 10 mètres de large sur 30 de long. Et a été réalisé avec un impact environnemental réduit, selon la conception de l'agence bordelaise d'architecture 2PMA. Charpentes en pin sylvestre, murs en briques de terre crue, système de refroidissement par la fraîcheur de l'eau comptent parmi les réalisations remarquées.
Les façades du bateau sont recouvertes de piquets de vigne, en clin d'œil à la principale activité de Carmo Wood. (Crédits : Agence APPA)
Les bureaux seront répartis sur deux étages ; Carmo France occupera ceux du haut et mettra en location le rez-de-chaussée à partir de septembre. Une équipe d'une quinzaine de salariés pourra être accueillie. Le prix devrait osciller autour de 200 euros du m2 par an, indexé sur les tarifs pratiqués par le port. Actuellement situé à l'entrée du bassin 1, la structure rejoindra son emplacement final dans les prochaines semaines, entre l'embarcation festive La Dame et une péniche-restaurant. De quoi dynamiser encore un quartier de plus en plus prisé par les entreprises : Lime y a annoncé une implantation en avril et Back Market, la plus grosse licorne française, y a installé ses nouveaux locaux et d'y transférer prochainement son siège social.
"Le chantier était quasiment terminé"
"C'est une prouesse architecturale. Ce qui la rend agréable, c'est son côté unique" glissait Laurent Guillemin, adjoint au maire en charge de la sobriété des ressources naturelles, lors de la visite. La municipalité gardera un œil attentif sur les projets fonciers dans le quartier alors que l'agglomération bordelaise connaît un marché du bureau dynamique. Difficile pourtant d'imaginer une régulation sur ces vaisseaux flottants : les constructions sur l'eau ne sont pas soumises au permis de construire. Et peuvent légalement se passer de l'avis municipal.
Carmo Wood va également bénéficier d'une absence de taxe foncière puisque la structure est considérée comme un bateau. L'entreprise veut en faire son navire amiral, sans même avoir réfléchi, à ce stade, à des perspectives de rentabilisation de l'investissement déployé. "Ce n'est pas notre première optique. Nous comptons sur l'effet vitrine qu'il va constituer pour nous. L'implantation ici est le fait de la proximité avec la Cité du vin, dont nous sommes mécènes, et nos clients du vignoble bordelais" a fait valoir Custodio Ximenes, directeur de Carmo Wood France.
Les deux espaces, à l'étage et au rez-de-chaussée, seront divisés en plusieurs bureaux. (Crédits : Agence APPA)
Au total, l'opération était chiffrée à 1,3 million d'euros. Avant un accident tonitruant. Dans la nuit du 20 au 21 décembre 2019, la tempête Fabien souffle sur Bordeaux. La construction des bureaux flottants a alors débuté quelques semaines avant. Aux Bassins à flot, 150 km/h de vent sont relevés. L'eau s'engouffre dans les ballasts de la barge. Et la fait couler, alors que "le chantier était quasiment terminé" se remémore Mathieu Le Morvan, architecte chez 2PMA.
Un million de coûts supplémentaires
Un naufrage qui oblige le projet à repartir du début et à régler des comptes devant la justice. Le recours est toujours en cours d'instruction et implique cinq entreprises intervenues sur les travaux. "Nous pourrions être remboursés intégralement si la justice détermine que nous n'avons aucune responsabilité dans l'affaire", estime Custodio Ximenes. Presque 600.000 euros auraient été perdus dans l'incident.
Et désormais, la guerre en Ukraine vient ajouter des coûts supplémentaires, notamment à cause des difficultés rencontrées dans la chaîne du bois. Le budget final de la structure flottante grimperait finalement à 2,2 millions d'euros en comptant les déboires de l'accident. Malgré ces difficultés, elle semble être un prélude à d'autres réalisations sur les Bassins à flot. Selon les porteurs du projet, huit structures seraient en réflexion chez d'autres promoteurs. Ou comment les bassins autrefois tournés vers les activités maritimes se transforment aujourd'hui en quartier d'affaires.
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