Immobilier (Oiso) : à Bordeaux Métropole la pénurie de terrains à bâtir mine la transition écologique

Le manque de terrains à bâtir n'épargne pas beaucoup de territoires en Nouvelle-Aquitaine mais il prend des dimensions critiques en Gironde et plus encore à Bordeaux Métropole, où la parcelle flambe, a analysé François Cheminade, 1e vice-président de l'Observatoire de l'immobilier du Sud-Ouest (Oiso), lors du bilan 2019. Il a appellé les élus à intervenir sur le sujet. Parce que cette situation repousse les jeunes ménages accédants toujours plus loin de la Métropole et alimente les problèmes de transports.
Le prix des terrains à construire continue à flamber, il atteint 222.000 euros à Bordeaux Métropole.
Le prix des terrains à construire continue à flamber, il atteint 222.000 euros à Bordeaux Métropole. (Crédits : © Regis Duvignau / Reuters)

Le marché du terrain à bâtir est toujours dans une situation de crise en Nouvelle-Aquitaine et particulièrement en Gironde et à Bordeaux-Métropole. Phénomène qui a été confirmé par l'Observatoire immobilier du Sud-Ouest (Oiso), présidé par Pierre Vital (Idéal Groupe), ce lundi 9 mars lors de la présentation de l'évolution du marché immobilier en 2019.

C'est ainsi que François Cheminade (Nexity), 1e vice-président de l'Oiso, en charge du foncier, a présenté l'évolution de ce marché déterminant pour l'évolution de l'immobilier, à l'échelle régionale et départementale, via l'étude réalisée par le cabinet Adéquation, dont Nolwenn Malherbe est la directrice à Bordeaux. La situation de pénurie déjà soulignée par François Cheminade l'an dernier pour 2018, avec à cette époque moins de 2.000 lots à l'offre, ne s'est pas améliorée.

En 2019, le marché n'était toujours pas alimenté correctement. Le nombre de terrains à l'offre, déjà insuffisant en 2018, a encore baissé de 20 % l'an dernier pour se stabiliser à 1.580 lots. Ce qui représente un stock théorique de 10 mois. Sur ce plan ce n'est pas encore la crise mais la tension sur le marché s'accroît puisque, comme l'a rappelé Nolwenn Malherbe, pour les terrains à bâtir le stock idéal se situe à 18 mois.

Des maisons qui ne sont jamais plus grandes

En 2019, les mises en ventes ont reculé davantage, avec 1.442 lots, soit une baisse marquée de 30 %. Les ventes perdent de leur côté 14 % pour s'établir à 1.826 lots. Cette situation déséquilibrée provoque un phénomène qu'avait déjà souligné François Cheminade : les terrains se vendent à un tarif réel supérieur à celui qui est affiché en vitrine.

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C'est ainsi que l'an dernier en Nouvelle-Aquitaine les lots à bâtir, d'une surface moyenne de 662 m2, étaient proposés à la vente pour 75.000 euros. Des offres encourageantes avec 25 m2 de surface en plus, pour un prix en réduction de 3.000 euros. Le problème c'est que ces ventes se sont au final dénouées à un prix moyen de 91.000 euros pour une surface de 595 m2, soit une baisse de surface de 20 m2 pour une hausse du prix de 2.000 euros sur un an !

"On ne construit pas sur des parcelles plus petites dans les Landes qu'en Gironde. En Nouvelle-Aquitaine, peu de gens acceptent encore de construire sur des parcelles de 350 m2, il y a un vrai travail d'architecte à faire pour montrer que c'est encore grand. Et puis la taille des maisons n'est en général jamais plus grande, quelle que soit la taille des terrains", a démystifié François Cheminade.

De 33.000 € en moyenne à plus de 170.000 €

Les deux extrêmes sur les prix en Nouvelle-Aquitaine se situent, d'une part, à moins de 50.000 euros la parcelle (22 % des ventes) et, de l'autre, à plus de 170.000 euros (12 % des ventes). Côté prix, la Dordogne a enregistré en moyenne les transactions de terrains les moins chères, à 33.000 euros pour des lots à bâtir de 900 m2. La Gironde occupe l'autre bout du marché, avec des parcelles négociées à 130.000 euros pour une surface de 656 m2.

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Les écarts dans la dynamique des marchés sont encore plus marqués. La Dordogne a ainsi totalisé l'an dernier 123 mises en ventes de terrains à bâtir et 58 ventes, contre 569 mises en ventes et 667 ventes en Gironde. Ces derniers chiffres étant les plus élevés de la région. C'est en Lot-et-Garonne, plus précisément dans l'Agenais, qu'a été enregistré le plus petit nombre de transactions, avec 33 mis en ventes et 31 ventes, mais pas les prix les plus bas puisque les lots à bâtir s'y sont échangés à 52.000 euros, pour 615 m2.

Certains nouveaux arrivants ont les moyens

La taille des parcelles à construire est encore beaucoup trop grande et le 1e vice-président de l'Oiso a tenu à souligner l'urgence qu'il y avait à changer de perspective sur le sujet, à faire évoluer les mentalités.

"L'Oiso et les aménageurs sont tous partisans d'une augmentation de la densification, avec une réduction de la taille des parcelles à bâtir. Diminuer cette taille ça changerait tout. Au rythme actuel nous n'arriverons bientôt plus à répondre à la demande. D'autant qu'aujourd'hui se développe un phénomène de gentrification, qui pousse les prix à la hausse et désolvabilise les jeunes ménages. Ce ne sont plus les primo accédants qui achètent", a ainsi déroulé en substance François Cheminade, qui craint le développement d'un phénomène spéculatif sur les lots à bâtir.

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Ce type de risque spéculatif est particulièrement élevé en Gironde où, avec 321 terrains à l'offre, la cote d'alerte a été atteinte puisque le stock disponible, en chute de -26 %, ne représente plus que 5,8 mois. «Là, c'est la crise »; a confirmé Nolwenn Malherbe. Une situation tout à fait inquiétante selon le 1e vice-président de l'Oiso.

"En Gironde, il n'y a clairement plus d'offre. Cela ne pose aucun problème aux nouveaux arrivants dans le département, à ceux qui ont les moyens d'acheter, pour qui l'argent n'est pas une question. Ce qui fait que la plupart des Girondins reculent, qu'ils sont obligés de quitter les grandes villes", décrypte François Cheminade.

Des parcelles trop étendues pour la Métropole

En Gironde, les ventes de terrains à bâtir se concentrent essentiellement sur la Rive droite, c'est-à-dire à l'est de Bordeaux Métropole et jusqu'au Libournais, où le marché continue à être alimenté. Tandis que les prix les plus attractifs se trouvent au nord de la Gironde, qui regroupe Médoc et Blayais, autrement-dit hors de la Métropole. Situation qui, comme l'a confirmé l'orateur, ne fait qu'aggraver les problèmes de circulation dans la Métropole.

Autant dire qu'à Bordeaux Métropole le marché du terrain à bâtir prend des allures spéculatives, avec des lots négociés en moyenne à 222.000 euros, en hausse de 59.000 euros par rapport à 2018, soit, selon nos calculs, une flambée de +36 % sur un an ! Fait surprenant, la taille des parcelles constructibles, qui est de 693 m2, reste comparable à la moyenne régionale. En 2019 sur le marché métropolitain 113 parcelles ont été mises en ventes et 111 vendues.

"C'est incroyable de voir des parcelles à bâtir aussi grandes à Bordeaux Métropole. Bordeaux c'est quand même la ville des échoppes, des lotissements. Est-ce que c'est bien de construire avec des tailles pareilles ? N'est-ce pas un comportement des années 1980, alors que tout le monde sait qu'il faut désormais lutter contre les émissions de gaz à effet de serre que le manque de densité favorise ?", a questionné en substance François Cheminade, pour qui les élus locaux ont une grande responsabilité dans ce type de dérive, sous la pression d'un électorat frileux et peu tenté par plus de densité urbaine.

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Une situation également déséquilibrée sur le bassin d'Arcachon

La couronne à l'ouest de Bordeaux Métropole est l'autre territoire où le prix moyen de la parcelle est très élevé, à 154.000 euros (pour une surface de 642 m2, avec 109 mises en en ventes et 89 ventes). Il faut effectivement aller en Nord Gironde pour trouver les prix les plus bas, à 64.000 euros la parcelle (pour une surface de 750 m2, avec 76 mises en ventes et 121 ventes). Sur le bassin d'Arcachon il n'y a pas eu de mises en ventes de parcelles mais 83 ventes d'une surface moyenne de 633 m2 pour un coût unitaire de 132.000 euros.

"Il n'y a pas eu de mises en ventes sur le bassin parce que le Scot a été annulé et qu'il est en attente de la préfecture. Il faudra attendre deux ou trois ans pour connaître le prochain, tandis que le futur PLU [plan local d'urbanisme] pourrait n'arriver que d'ici cinq ou six ans... Là encore les nouveaux arrivants ont de l'argent et ne sont pas gênés pour acheter", a éclairé François Cheminade.

Un sujet qui n'a pas fini de nourrir les débats sur l'accessibilité des métropoles et leur capacité à s'inscrire dans la transition écologique.

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