Canopée, le cargo à voiles d'ArianeGroup baptisé à Bordeaux

EN IMAGES. C'est l'autre grand symbole du programme spatial Ariane 6. Canopée, le cargo à voiles construit sur-mesure pour transporter en une fois la fusée complète de l'Europe à la Guyane, a fait escale cette semaine à Bordeaux. Une première mondiale pour la marine marchande, tel un navire amiral qui préfigure la décarbonation du transport maritime.
Maxime Giraudeau
Le cargo à voiles Canopée a fait escale à Bordeaux du 3 au 6 octobre 2023.
Le cargo à voiles Canopée a fait escale à Bordeaux du 3 au 6 octobre 2023. (Crédits : MG / La Tribune)

Après la fin du programme de l'Airbus A380, on pensait dans le Port de la Lune que les paquebots de croisière, qui gâchent l'environnement aux adeptes des quais mais abreuvent les commerçants de clients, avaient définitivement remplacé les cargos transportant les fiertés aéronautiques du Sud-Ouest. Il y a donc eu beaucoup de curiosité cette semaine en voyant arriver, mardi, Canopée, le nouveau fleuron mis à flot pour le transport transatlantique de la fusée Ariane 6.

Mais ce n'est pas tant le nom du constructeur spatial qui a attiré l'œil que les quatre mâts culminant à 50 mètres au-dessus de la Garonne. Inauguré ce jeudi, Canopée est le premier navire marchand au monde à être équipé d'une propulsion hybride motorisée et à voiles. Grâce à la technologie, l'embarcation de 121 mètres de long va économiser en moyenne 30 % de carburant sur la dizaine de transatlantiques qu'il va opérer chaque année.

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Le navire est à l'image du programme Ariane 6 : de la compétitivité, de l'innovation, des coûts réduits et du transport durable. C'est représentatif de notre ambition et c'est une énorme fierté.

Christophe Caralp, directeur de la supply chain d'Ariane 6

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Inspirées de l'aéronautique, les voiles Ocean Wings de la startup Ayro sont en forme d'aile d'avion. (crédits : MG / La Tribune)

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Les mâts de 37 mètres de haut s'orientent automatiquement par rapport au vent. (crédits : MG / La Tribune)

20 % de surcoût pour les voiles

Canopée accomplira sa boucle en plusieurs étapes. L'étage supérieur et la coiffe de la fusée seront respectivement embarqués à Brème en Allemagne et Rotterdam aux Pays-Bas, l'étage principal, fabriqué aux Mureaux, montera au Havre, avant le dernier chargement en aval de Bordeaux avec les tuyères (propulseurs) et la jupe fabriquées à l'ouest de la capitale girondine. Grâce à une capacité de charge de 5.000 tonnes, le navire est capable d'embarquer en une seule fois une fusée entière, que ce soit celle à deux ou quatre propulseurs. C'est le grand avantage par rapport au programme Ariane 5 qui nécessitait deux cargos pour acheminer un seul engin complet à la base française de Kourou.

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ArianeGroup s'est engagé sur un contrat commercial de 15 ans avec Alizés, la joint venture formée par la compagnie maritime Zéphyr et Borée basée à Lorient, avec l'architecte naval néerlandais VPLP Design. Alizés est propriétaire du bateau, dont l'exploitation est assurée par la société Jifmar Offshore Services. A l'origine, l'appel d'offre d'ArianeGroup ne mentionnait pas l'ajout d'une technologie permettant de décarboner le transport. Mais sous l'impulsion d'Alizés et des obligations prononcées en 2018 par l'Organisation Maritime Internationale, le constructeur spatial a choisi d'être pionnier, quitte à prendre un risque financier.

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La fusée Ariane 6 en kit viendra se loger dans le ventre du cargo. (crédits : MG / La Tribune)

Le coût du système à voiles avec ses quatre mâts pour une surface totale de près de 1.500m2 s'élève à 20 % du prix du cargo, chiffré au total à plusieurs dizaines de millions d'euros. Une technologie développée par Ayro, la startup qui a implanté son usine à Caen en 2021 et vient de lever 19 millions d'euros pour construire les mâts qui doivent décarboner le transport maritime, au même titre que les ailes de kite de Beyond the Sea ou les ailes gonflables de Wisamo.

« Un système hautement automatisé »

L'exploitation sera réservée en priorité au programme Ariane 6 mais d'autres éléments de la filière aéronautique et spatiale, comme des satellites, pourraient se glisser dans les cales si l'espace le permet au cours des voyages. Le personnel navigant n'est que de 11 personnes sur le Canopée, qui a déjà effectué deux transatlantiques, mais sans ses voiles, depuis sa mise à l'eau en juillet 2022. Les mâts ont été ajoutés cet été au bateau fabriqué en Europe.

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Victor Gibon, du transporteur maritime Jifmar, présente comment seront acheminés les différents éléments de la fusée. (crédits : MG / La Tribune)

« Le pilotage des ailes ne relève pas d'un métier spécifique. Les officiers qui sont à bord sont en train d'être formés. La technologie amène un peu de gîte, un peu de dérive qui est compensée par les safrans. Il faut faire attention quand on passe sous les ponts ! Quand il y a vraiment beaucoup de vent, on affale les voiles. Mais globalement, c'est un système hautement automatisé », égrène Victor Gibon, responsable projet de Jifmar Offshore Services.

L'armateur et l'exploitant ne manquent pas de garantie quant aux engagements d'ArianeGroup : avec une trentaine de fusées commandées ou en cours de vente, le carnet de commandes du constructeur européen est bien garni. Il doit lancer la première fusée du programme, avec un peu de retard, l'an prochain.

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Maxime Giraudeau

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Commentaires 4
à écrit le 07/10/2023 à 11:46
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Bonjour au moins nous allons avoir la certitude de savoir si ce système est économique après tout lors de multiples traversées de l'Atlantique nous allons avoir au moins une idée du prix kilomètres carburant de ce type de cargos..

à écrit le 07/10/2023 à 0:09
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Naviguer à la voile c'est bien quand il y a du vent, comme pour les éoliennes.😃

le 07/10/2023 à 9:04
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Il y a toujours du vent sur les océans.

à écrit le 06/10/2023 à 10:24
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Intéressant mais il faut que cela ne soit que transitoire, avec la technologie actuelle on peut quand même faire beaucoup mieux et avancer bien plus vite en matière de transport à voiles, mais i lest bien évident qu'il faut se coltiner l'enclume qu'e...

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