Bordeaux Métropole : Alain Anziani promeut une sobriété énergétique réaliste

Le président (PS) de Bordeaux Métropole, Alain Anziani, a très largement axé sa conférence de presse de rentrée sur la sobriété énergétique, et la mobilisation contre les catastrophes naturelles. Enfoncée dans la forêt et adossée à une capitale bordelaise bâtie sur des marais asséchés, la collectivité est exposée. Mais la sobriété énergétique n'empêche pas Alain Anziani de défendre le retour de la navette aérienne Bordeaux-Paris et l'extension de la consommation électrique via le freefloating.
Alain Anziani
Alain Anziani (Crédits : Agence APPA)

Alors que de très nombreux observateurs pronostiquent l'imminence d'un krach énergétique, qui ferait dévisser les marchés, les calculatrices tournent à plein régime dans les entreprises et les collectivités pour préciser l'ampleur des risques. Les premiers chiffres qui commencent à tomber ne sont pas très rassurants. Parce que dans le peloton de tête des plus belles passoires thermiques de France se trouveraient les palais de la République, comme l'Assemblée nationale, le Sénat ou l'Elysée où se joue la lutte nationale contre la gabegie énergétique...

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Installé dans un bâtiment contemporain, l'hôtel de Bordeaux Métropole a lui aussi quelques grands espaces difficiles à chauffer mais sûrement moins qu'à l'Assemblée nationale. Mais lors de sa conférence de presse de rentrée de ce jeudi 15 septembre le président (PS) de Bordeaux Métropole, Alain Anziani, a dû lui aussi parler factures. Après avoir introduit son propos par un été infernal placé sous le signe de la crise.

"25.400 hectares de forêt ont été détruits par le feu soit l'équivalent d'une demi-récolte annuelle de bois ! La sécheresse est à l'origine d'une catastrophe climatique sans précédent. Ce à quoi s'ajoute une inflation galopante et des difficultés d'approvisionnements", a tout d'abord rembobiné le président de la Métropole.

Une facture en hausse de +367 % en 2023

Avant d'évoquer un futur proche plombé par la flambée du prix de l'énergie.

"La facture de gaz de Bordeaux Métropole, qui sera de 3 millions d'euros en 2022, va passer à 14 millions d'euros en 2023 ! Soit une hausse de +367 % ! Cette situation nous oblige à regarder à moyen et long terme : pour prévenir, accompagner et réparer les catastrophes naturelles. On nous parlait d'une période critique comprise entre 2025 et 2050, mais en fait c'est aujourd'hui que ça commence !", a recadré Alain Anziani.

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Un objectif fixé à 10% d'économies

Il a ensuite annoncé la prochaine adoption par Bordeaux Métropole d'un plan de sobriété énergétique, pour faire de la collectivité une structure exemplaire, mais aussi une interface dans ce domaine avec les villes voisines et un acteur incitatif. Côté exemplarité, le président métropolitain s'est voulu réaliste.

"Notre objectif est modeste et consiste à réaliser 10 % d'économie... Ce qui va passer par la gestion des bâtiments, avec une baisse de 7 % de la consommation énergétique, via une limitation de la température à 19°. Mais aussi par un accord avec RTE pour prévenir les moments de forte tension électrique. Ce plan de sobriété touche également le parc de véhicules, l'idée étant de voir s'il est possible ou non de supprimer ceux qui parcourent moins de 1.000 kilomètres par an. L'organisation du travail sera aussi mise à contribution", a notamment déroulé Alain Anziani.

Le président de la Métropole a aussi appelé à une meilleure adaptation du service public, en harmonisant davantage certaines actions dans la Métropole, comme la collecte des déchets voire la généralisation de l'extinction de l'éclairage public pendant la nuit.

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CVAE : un trou de 73 millions d'euros


  • Sans attendre les débats au Parlement, le gouvernement l'a d'ores et déjà annoncé : la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) sera supprimée en deux temps en 2023 et 2024 sans que l'on n'en connaisse encore les modalités de compensation. Pour Bordeaux Métropole, cet impôt payé par une partie des entreprises du territoire représente en moyenne une recette annuelle de 73 millions d'euros, soit près d'un quart de ses ressources fiscales ! "Je suis opposé à cette nouvelle suppression qui nous dirige vers un système où nous serions complètement dépendant financièrement de l'Etat [...] Nous devons être intéressé au développement économique de notre territoire et je préfère conserver mes propres ressources fiscales tout en étant responsable devant les habitants", réagit Alain Anziani. "Si les élus n'ont plus aucun intérêt économique à accueillir des entreprises pour développer leur territoire, ils arrêteront de le faire", craint également Stéphane Delpeyrat, son adjoint à l'économie.

Un quart de la Métropole se trouve dans la forêt

Alain Anziani, qui a été, en tant que sénateur, l'auteur du "Rapport d'information fait au nom de la mission commune d'information sur les conséquences de la tempête Xynthia" en 2010, qui a frappé Vendée et Charente-Maritime causant 53 morts, a ensuite souligné la gravité des risques d'inondation qu'encourt Bordeaux Métropole. N'hésitant pas à lancer par la même occasion un appel à la mobilisation pour assurer l'entretien des digues, et prévenant que l'équivalent de Xynthia dans la Métropole déclencherait une bien plus grande catastrophe.

En plus de l'eau, Bordeaux Métropole, construit dans une zone lacustre, est désormais sous la menace du feu, puisque 25 % de sa superficie est couverte (pour l'essentiel) par la forêt des Landes de Gascogne. "Nous devons avoir un plan global sur la forêt", a insisté le président, avant de souligner que la lutte contre le réchauffement climatique passait aussi par la transformation de la Métropole en territoire à énergie positive. Avec la sécheresse, l'eau est devenue l'autre sujet brûlant de l'été et la Métropole est en train de créer sa propre régie de l'eau, qui deviendra opérationnelle en janvier 2023, après une trentaine d'années de gestion en délégation de service public par Suez.

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La navette aérienne Bordeaux-Paris toujours d'actualité

L'eau potable de Bordeaux Métropole ne vient ni de la Garonne ni de la Dordogne ni de la Gironde : elle est directement pompée dans les nappes souterraines de l'éocène. Et il n'y a que peut d'années que Bordeaux Métropole, sous la présidence d'Alain Anziani, a réussi à faire cesser ce qui pourrait passer dans un futur proche pour un vrai scandale : le nettoyage pendant des dizaines d'années des machines des usines de la presqu'île d'Ambès avec l'eau potable de l'éocène... Mais aujourd'hui le président de la Métropole n'a pas caché que la grande difficulté venait de la difficile mise à plat statutaire des futurs salariés de la future régie métropolitaine de l'eau, nombre d'entre eux venant du groupe Suez et beaucoup d'autres des services de la Métropole déjà engagés dans la gestion de l'eau.

Autre sujet sensible : le dossier de l'aéroport international de Bordeaux-Mérignac et l'arrêt de la liaison aérienne Bordeaux-Paris avec la navette d'Air France. Une mesure prise par le gouvernement qui a provoqué son lot de turbulences politiques. Alors que depuis 2017 Bordeaux est relié à Paris par TGV avec une durée de trajet de 2 heures, la pilule ne passe toujours pas dans les milieux d'affaires bordelais ni à la Métropole. Allié dans l'assemblée métropolitaine à l'écologiste (EELV) Pierre Hurmic, Alain Anziani, également maire de Mérignac, est un fervent défenseur de la navette aérienne, qui drainait à elle seule près de 800.000 passagers par an.

"L'arrêt de cette navette Bordeaux-Paris est une profonde bêtise du gouvernement. Et en France il n'y a que cette navette qui a été touchée. Oui le train c'est bien, mais il n'y en pas assez et les systèmes de réservation sont trop lourds. Avec Patrick Seguin, président de la chambre de commerce et d'industrie, nous avons écrit une lettre à l'attention de la Première ministre, Elisabeth Borne à ce sujet. Parce que je suis favorable à la mobilité, qui est dans la nature de l'Homme. Plafonner les vols depuis Bordeaux ça veut dire quoi ? Que les gens vont devoir aller à Toulouse ?", a provoqué le président avant de marteler : "On ne peut pas abandonner le développement économique, bien au contraire, parce que le développement économique c'est l'innovation".

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La sobriété ne doit pas entraver le progrès des mobilités

Une philosophie dans la droite ligne de celle défendue par Philippe Madrelle, qui a été pendant des années président (PS) du conseil général de la Gironde et pour qui la capacité pour chacun de se déplacer librement en voiture était un acquis de la démocratie. Un point de vue qui risque d'achopper tôt ou tard sur les contraintes que pourraient vouloir faire peser les défenseurs de la sobriété énergétique sur l'ensemble de la population. Un sujet qui aurait sûrement passionné John Stuart Mill, sans doute l'un des économistes anglais les plus emblématiques, précurseur à sa façon de la sobriété, puisqu'il avait compris dès 1848 ("Principes d'économie politique") que les matières premières finiraient par manquer. D'où son modèle axé sur la réduction des flux de production, des flux de consommation et une juste répartition des richesses entre les membres de la nation, sans laquelle rien ne pourrait être possible.

Interrogé sur l'impact de la mise à disposition en ville par des entreprises privées de deux-roues à moteur électrique (vélos, scooter, trottinettes), avec le système du freefloating, dont le parc va augmenter de 1.000 unités à Bordeaux, le président de la Métropole s'est positionné à l'unisson de la majorité des autres élus. Estimant qu'il ne faut pas s'opposer au développement de nouveaux moyens de circulation, à cette nouvelle tendance de fond. Ainsi l'annonce de probables coupures d'électricité cet hiver pour cause de pénurie ne doit pas être un frein à la montée en puissance d'une mobilité électrique qui se développe tous azimuts. Interrogé sur son état de santé, puisqu'il est malade, Alain Anziani a simplement répondu qu'il continuerait à assumer sa charge tant qu'il s'en serait capable.

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