Bordeaux Métropole sort le chéquier pour relancer le logement neuf

C'est la première décision marquante de Christine Bost. La nouvelle présidente de Bordeaux Métropole débloque 35 millions d'euros sur deux ans pour soutenir les bailleurs sociaux et les communes et, indirectement, les promoteurs à condition que les maires jouent le jeu de la densification. Une annonce concomitante avec l'adoption de la programmation régionale de logements.
Malgré les nombreuses grues qui toisent l'agglomération bordelaise, la construction de logements y est en forte baisse poussant la Métropole à agir.
Malgré les nombreuses grues qui toisent l'agglomération bordelaise, la construction de logements y est en forte baisse poussant la Métropole à agir. (Crédits : Agence APPA)

Conjurer localement la profonde crise du logement neuf dont les racines sont largement nationales et internationales : c'est l'ambition de Christine Bost. Sitôt élue, la nouvelle présidente de Bordeaux Métropole a choisi de frapper fort sur le sujet en annonçant le déblocage de 35,4 millions d'euros pour venir au soutien des bailleurs sociaux et des maires. Ce « plan de relance », validé par le bureau de la Métropole ce 21 mars, se déroulera en deux temps : 20 millions d'euros en 2024 puis 15 millions d'euros supplémentaires d'ici 2026. Un geste attendu par toute la filière alors qu'avec moins de 950 transactions l'an dernier dans l'agglomération bordelaise, les ventes de logements neufs se sont écroulées de 60 % sur un an et même de 80 % par rapport à 2019.

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Une bonne nouvelle pour le secteur HLM

Dans le détail, près de la moitié du plan, soit 15 millions d'euros, est fléchée vers les organismes HLM sur le même modèle que « l'opération coup de poing » de 20 millions d'euros initiée l'an dernier. Cette enveloppe a permis de majorer jusqu'à doubler les aides à la pierre versées par la Métropole aux bailleurs sociaux pour rééquilibrer leurs opérations actuellement gelées ou en passe d'être abandonnées. Prévus pour durer 18 mois, ces 20 millions d'euros débloqués en juin 2023 ont déjà été consommés entièrement, permettant à la programmation de logements locatifs sociaux de repartir de l'avant l'an dernier en retrouvant peu ou prou les niveaux pré-Covid.

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« Dans la mesure où le gouvernement ne façonne pas de politique du logement, alors même que la machine est profondément grippée, toute aide des collectivités locales est la bienvenue », salue Muriel Boulmier, la présidente de l'Union régionale HLM de Nouvelle-Aquitaine. « À Bordeaux Métropole, la demande de logements abordables est extrêmement forte, c'est donc une bonne nouvelle même si cela servira d'abord à débloquer des programmes dans l'impasse plutôt qu'à développer un offre neuve ». Dans l'agglomération bordelaise, la file d'attente pour obtenir un logement locatif social ne cesse en effet de s'allonger pour atteindre 47.000 demandes.

Soutien aux maires « bâtisseurs » ?

L'autre moitié du plan de relance métropolitain se concentre sur le soutien aux maires pour les convaincre de construire davantage alors même que se rapproche la perspective des élections municipales du printemps 2026, période traditionnelle de repli des chantiers. Il s'agit d'une part de cofinancer les équipements publics dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (10,7 millions d'euros) et à Bordeaux Euratlantique (5,2 millions d'euros) et, d'autre part, d'une ligne de 4,5 millions d'euros pour abonder des contrats entre la Métropole et les communes volontaires pour construire davantage de logements.

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« Les communes ont des difficultés à financer les équipements publics nécessaires
à la population. Cet élément a souvent été identifié par les maires comme frein à
la production de logements », met ainsi en avant la Métropole. Mais, comme le rappellent les promoteurs et les bailleurs sociaux, la balle reste néanmoins dans la main des maires qui ont parfois la mauvaise habitude de ne pas appliquer les dispositions de densification pourtant prévues par le plan local d'urbanisme (PLU) qu'ils ont eux-mêmes voté.

Quid de la promotion privée ?

C'est à cette condition d'accepter d'utiliser toutes les possibilités offertes par le PLU que ce plan de relance pourra bénéficier en cascade aux promoteurs privés. Ces derniers estimant que 30 % des capacités de densification autorisées ne sont pas utilisées. « C'est une bonne nouvelle que la question du logement soit identifiée comme prioritaire par la nouvelle présidente de Bordeaux Métropole », réagit néanmoins Pierre Vital, le président de la Fédération des promoteurs immobiliers de Nouvelle-Aquitaine. « Maintenant il faut que les bailleurs agissent réellement pour relever le montant des Vefa [ventes en l'état futur d'achèvement, ndlr] réalisées par les promoteurs privés si l'on veut que la construction de logements libres redémarre vraiment. »

Bordeaux Métropole propose aussi un « accompagnement technique des promoteurs,
notamment au sujet des modalités de la Vefa ou dans le suivi conjoint des projets bloqués ». Il s'agit notamment de négociations avec la FPI sur une revalorisation forfaitaire des plafonds pour les logements sociaux construits par le secteur privé afin d'équilibrer leurs programmes immobiliers.

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Les objectifs fixés à l'échelle régionale

Parallèlement, le Comité régional de l'habitat et de l'hébergement de Nouvelle-Aquitaine, l'organe qui associe l'État et les élus locaux pour planifier la construction dans la région, a adopté à l'unanimité les objectifs pour 2024. Près de 9.500 logements locatifs sociaux sont ainsi prévus en Nouvelle-Aquitaine cette année, dont 2.900 très sociaux, avec une enveloppe de 30,3 millions d'euros d'aides directes. Cela représente une hausse de 6 % par rapport aux 8.950 agréments effectivement délivrés en moyenne sur les trois dernières années. Mais ça ne permettra pas de résorber le retard alors que 174.000 demandes de logements sociaux sont en attente au niveau régional, en hausse de 7 % sur un an. Pour la construction libre, 15.700 logements neufs sont prévus avec une enveloppe associée de 267 millions d'euros. Enfin, plus de 62.000 logements du parc privé ont été rénovés l'an dernier dans la région.

Pour tenir ces objectifs, la préfecture s'apprête notamment à signer avec l'Établissement public foncier de Nouvelle-Aquitaine une convention de mobilisation exceptionnelle de terrains dédiés aux logements sociaux. Une enveloppe de 9,5 millions d'euros est prévue pour soutenir les organismes HLM à conditions que le démarrage des travaux intervienne avant le 31 décembre 2025.

Malgré cette mobilisation, le défi reste immense puisque les mises en chantier de logements en Nouvelle-Aquitaine sont tombés l'an dernier au plus bas depuis 20 ans avec moins de 38.000 unités contre plus de 46.000 en moyenne depuis 2010.

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