Déjà condamné par son échec sportif à la relégation en Ligue 2, à compter de la saison 2022-2023, le Football Club des Girondins de Bordeaux (FCGB) a désormais le pistolet sur la tempe, puisque la Direction nationale de contrôle de gestion (DNCG), le gendarme des clubs de football, a prononcé ce mardi 14 juin sa relégation en National. Comme l'an dernier à la même époque et dans plus ou moins les mêmes circonstances, le club a aussitôt annoncé sa décision de faire appel de cette décision qui, si elle était mise à exécution, signerait sa disparition pure et simple du paysage footballistique professionnel.
Cet appel est suspensif et la DNCG, qui a assorti sa décision de mesures correctrices à prendre par le club pour éviter le pire, devrait rediscuter avec Gérard Lopez, propriétaire et dirigeant du Football Club des Girondins de Bordeaux (FCGB), au début du mois de juillet. Car si elle était appliquée cette relégation provoquerait une chute dévastatrice des revenus du club et son effondrement économique jusqu'à la liquidation judiciaire. Pour éviter cette issue fatale, le patron du FCGB a d'abord tenté de convaincre ses financeurs, les fonds d'investissement spéculatifs (hedge fund) King Street et Fortress de renoncer à la moitié de leurs créances sur le club, dont le total atteint 52 millions d'euros. Ce qu'ils ont refusé.
La division de la dette du club n'a pas convaincu
Gérard Lopez est malgré tout revenu à la charge pour alléger le poids de la dette supporté par le FCGB, comme l'a rapporté "20 Minutes", et a finalement obtenu des créanciers que la dette soit réduite de moitié, soit 26 millions d'euros. C'est ainsi qu'a été extraite des comptes du club la somme de 26 millions d'euros, que Gérard Lopez a fait remonter dans le bilan de sa société holding Jogo Bonito-La Dynamie, maison mère des clubs de Bordeaux et Boa Vista (Portugal).
Si cette opération améliore le crucial ratio endettement sur fonds propres du club, elle a laissé de marbre la DNCG qui est à la recherche de garanties plus solides que des écritures comptables, préférentiellement des espèces sonnantes et trébuchantes. Selon le quotidien « L'Equipe », cette opération de division de la dette sert surtout à sécuriser les créances de King Street et Fortress, qui, grâce aux 26 millions d'euros remontés dans les comptes de Jogo Bonito-La Dynamie, seraient assurés de récupérer une partie de leurs investissements en cas de disparition du FCGB.
De l'argent frais en attente mais pour les créanciers
Une question de la dette qui ne s'arrête pas là. Comme il est encore actif, le FCGB dispose toujours d'une colonne « produits » dans ses comptes. Le club est ainsi en attente de toucher un pourcentage sur les retombées de la vente de ses deux meilleurs joueurs. Celle d'Aurélien Tchouameni (à Monaco), sorti du centre de formation des Girondins de Bordeaux, qui vient de signer avec le Real Madrid, qui a été l'un des rares jeunes de l'équipe de France à avoir brillé pendant les récents matchs de la Ligue des Nations.
Et celle de Jules Koundé, les deux joueurs représentant des retombées de l'ordre de 16 à 18 millions d'euros pour le FCGB. Mais cet argent est pour le moment fléché vers les caisses des deux fonds d'investissement américains : au service de la réduction de la dette du club. C'est l'un des éléments clés qui ont décidé la DNCG à opter pour la relégation des Girondins de Bordeaux en National.
Trouver 30 à 40 millions d'euros d'ici juillet
Pour lever cette sanction mortelle, la DNCG exige que les recettes issues de la vente de Tchouaméni et Koundé soient versées dans les caisses du club et non dans celles des créanciers. Pour arriver à boucler son budget 2022-2023, Gérard Lopez comptait, détaille « 20 Minutes », sur 7 millions d'euros de la LFP (Ligue de football professionnel) au titre des clubs rétrogradés, 8,5 millions d'euros abondés par le fonds d'investissement CVC, qui va faire son entrée dans le championnat de football professionnel, et 22 millions de ventes d'autres joueurs au titre du mercato d'été. Total auquel devaient s'ajouter 10 millions d'euros apportés au club par Jogo Bonito-La Dynamie.
Autant de rentrées d'argent potentielles qui ne seront pas disponibles avant le 30 juin, date de la clôture des comptes. Fatalement, comme le souligne « Sud Ouest », le rejet par la DNCG de ce plan de financement oblige Gérard Lopez à trouver entre 30 et 40 millions d'euros d'ici le passage du FCGB en appel à la DNCG début juillet. Pour autant la condamnation à mort du club ne semble pas inéluctable, parce que la DNCG a laissé quelques petites marges de manœuvre aux acteurs du dossier.
Sans préfinancement, le club est bon pour le National
En plus du reversement des pourcentages perçus sur la vente de Tchouaméni et de Kondé dans les caisses du club, qui suppose une mobilisation des créanciers américains, la DNCG leur en demande plus et a lourdement insisté sur le sujet. Si les Girondins ont été recalés c'est d'abord parce que la vente des joueurs évoquée pendant ce mercato d'été ne fait l'objet d'aucun préfinancement. C'est, semble-t-il, la clé de voûte de l'argumentation du gendarme des clubs professionnels de football. Qui attend que le montant du produit attendu de ces ventes de joueurs soit garanti pour le club bordelais par un dépôt de cash sur un compte séquestre ou par une augmentation de capital.
Mais aussi que les créanciers américains du FCGB s'engagent par écrit à mettre cette garantie en œuvre. Faute de quoi la DNCG enverra les Girondins de Bordeaux en National pour insuffisance d'actifs. La DNCG serait disposée, selon « Sud Ouest », à attendre la fin du mercato d'été (fixée au 31 août) et non le 30 juin prochain pour avaliser ces fameuses ventes de joueurs pendant le mercato.
Si le FCGB a la corde au cou, il n'est pas encore pendu mais son avenir dépend entièrement de ses créanciers américains. Et, comme l'an dernier, le prolongement de cette période de turbulence ne permettra certainement pas une préparation estivale sereine sur le plan sportif.
Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !