Le tourisme solidaire à l'épreuve de l'inflation et de la transition écologique

Avec « une fréquentation en demi-teinte » au mois de juillet en Nouvelle-Aquitaine, le secteur touristique dit subir les effets de l'inflation. Une nouvelle donnée qui, pour les publics précaires, vient s'ajouter à une galaxie de facteurs bloquant le départ en vacances, à un moment où les établissements du tourisme solidaire doivent investir pour leur transition.
Maxime Giraudeau
A Bordeaux, des visites dédiées à des publics modestes permettent d'effectuer un séjour à bas coûts.
A Bordeaux, des visites dédiées à des publics modestes permettent d'effectuer un séjour à bas coûts. (Crédits : Agence Appa)

Il est toujours difficile de passer après un record. Suite à une saison 2022 qualifiée d'exceptionnelle par la filière tourisme en France, les premiers ressentis sur l'été 2023 montrent une redescente de l'euphorie. Selon une enquête du Comité régional du tourisme en Nouvelle-Aquitaine*, 53 % des établissements déplorent une baisse d'activité en juillet par rapport à l'été précédent. La profession se satisfait sans enthousiasme de cette première partie estivale dans la région grâce au littoral toujours attractif, entre une affluence étrangère au rendez-vous et une activité de camping dynamique.

Mais selon les trois quarts des répondants, c'est bien la hausse du coût de la vie qui a mis à mal la fréquentation générale. Une inflation qui bouscule les projets estivaux des touristes. Et en premier lieu ceux des publics les plus modestes. « Cette année on l'a beaucoup remarqué : l'inflation et la crise actuelle sont une grande difficulté pour partir en vacances », perçoit Laura Barbe, animatrice de l'antenne girondine du réseau national Vacances et famille. Cette année, 41 % des personnes gagnant moins de 900 euros par mois ne prévoyaient pas de partir en vacances selon un sondage de l'Ifop. « Le coût de l'énergie a augmenté, le coût hôtelier aussi. Il n'y a pas que l'aspect financier qui constitue un frein mais il devient de plus en plus important jusqu'à empêcher le départ », relève-t-elle.

Lire aussiSolikend séduit avec sa formule de tourisme solidaire de proximité

Des séjours moins longs

Cette association accompagne les familles modestes dans leur projet de vacances, en partenariat avec la MSA et la Caf, via des conseils personnalisés. Une aide cruciale pour des publics peu familiers avec tout ce qui relève de l'organisation d'un séjour. « On n'est pas là pour agir uniquement sur le frein financier. Il y a des freins psychologiques ou encore liés à la mobilité pour une famille non-véhiculée par exemple », illustre Laura Barbe. Avec Bordeaux Métropole et l'Office du tourisme, Vacances et familles a développé le programme Bordeaux Tourisme Solidaire afin d'organiser des visites de la ville en faveur de publics éloignés des loisirs. Une découverte sur quelques jours, afin de donner un premier aperçu d'un court séjour et de « travailler sur l'autonomisation du départ en vacances. »

Les professionnels du tourisme social et solidaire en Nouvelle-Aquitaine observent bien une baisse de la durée moyenne des séjours cette année : d'une semaine, elle est descendue de 3 à 5 nuitées en fonction des types d'établissements selon l'Unat (Union nationale des associations de tourisme et de plein air). Malgré une saison jugée jusqu'ici satisfaisante pour cette union régionale qui regroupe quasiment 200 acteurs du tourisme social et solidaire, la confiance n'est pas au beau fixe. « Certains professionnels ont déjà restreint leur activité pour faire des économies puisque leurs factures d'électricité ont triplé ! », acte Clara Monget, coordinatrice de l'Unat Nouvelle-Aquitaine.

Lire aussiTourisme : la Nouvelle-Aquitaine met 16,5 millions d'euros pour soutenir les TPE et PME

« Tout ne pourra pas être mis en place en un an »

L'interprofession émet aussi des craintes quant au défi qui l'attend : articuler la transition écologique des établissements dans un contexte d'inflation. Entre les exigences de réduction de la consommation énergétique des bâtiments et les nouvelles obligations environnementales, comme la valorisation des déchets, « tout ne pourra pas être mis en place en un an, malgré le fait que beaucoup de structures aient déjà commencé les démarches », atteste déjà Clara Monget. Pour accompagner la filière, une mission régionale dédiée au tourisme durable accompagne les professionnels dans leur transition jusqu'en 2025. Une initiative qui a par exemple fait émerger une aire mutualisée de compostage entre professionnels du côté de l'agglomération de Royan.

Pas de quoi faire oublier pour autant la mission de ces acteurs qui vise à proposer des vacances pour tous. « Dans le cadre de la problématique du dernier kilomètre, certains hébergeurs proposent de mettre en place des navettes internes où les employés vont chercher les vacanciers. On essaye de voir s'il est possible de travailler avec le département pour affréter un bus ou mettre des vélos à disposition », souligne la coordinatrice. Mobilité mais aussi accompagnement numérique, accessibilité, mixité sociale, aides financières, soit autant de champs à investir pour offrir des vacances accessibles à tous les publics.

/////////////

 *Enquête de conjoncture CRTNA juillet 2023 pour 1.258 répondants

Maxime Giraudeau

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.