« L'exigence de la transition énergétique vient perturber les équilibres parfois fragiles de l'ESS »

INTERVIEW. Appliquer la transition écologique est un sujet naturel pour les structures de l’Économie sociale et solidaire ? Pas tant que ça selon les parties prenantes de ce secteur, en proie, comme les autres, à un contexte inflationniste délicat qui bouscule des équilibres économiques parfois fragiles. Trois questions à Pierre Roussel, délégué régional de l'Union des employeurs de l'économie sociale et solidaire sur les leviers à mobiliser.
Pierre Roussel est délégué régional de l'Udes en Nouvelle-Aquitaine depuis 2019. Président d'association, il est issu de la branche éducation, culture, animation et loisirs.
Pierre Roussel est délégué régional de l'Udes en Nouvelle-Aquitaine depuis 2019. Président d'association, il est issu de la branche éducation, culture, animation et loisirs. (Crédits : MG / La Tribune)

L'Union nationale des employeurs de l'économie sociale et solidaire (Udes) était présente en Gironde ce 25 avril pour parler de transition écologique dans un secteur de l'économie sociale et solidaire (ESS) qui ne peut s'exempter des nécessités de réduction de l'impact carbone. Des tables rondes ont été organisées entre élus locaux et structures concernées pour ouvrir la voie. Si l'ESS fait figure de pionnière dans les enjeux de solidarité et de soutenabilité, ses représentants veulent aujourd'hui engager non pas une révolution des activités mais une évolution des procédés.

LA TRIBUNE - Le directeur général de l'Udes estime que la transition écologique n'est étonnamment « pas un sujet naturel dans le contexte actuel » pour l'ESS. Pourquoi et quelles sont les difficultés rencontrées par les acteurs et actrices du secteur ?

Pierre ROUSSEL, délégué régional de l'Udes - Les entreprises de l'ESS, qui sont majoritairement de type associatives, sont déjà dans ces finalités et préoccupées par leur impact sur l'environnement. Mais elles sont très centrées sur l'humain et animées par des questions de conditions et de valorisation du travail, ce qui fait que cette nouvelle obligation ou exigence vient perturber des équilibres parfois fragiles. Traiter les problèmes de transition écologique devient tout de suite une charge en plus et engendre une forme de réticence.

L'enjeu c'est de faire le lien entre l'humain et ses conditions de vie. Nous devons former les dirigeants pour qu'ils requestionnent leur manière de fonctionner, voir quels sont les axes de progrès de la structure, qu'elle soit petite ou grande, pour prendre sa part dans sa sphère d'influence. Il faut arriver à persuader que cet axe de transition est une partie effective du projet de la structure.

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Le secteur repose historiquement sur la coopération, alors quels sont les outils communs à disposition pour intégrer la transition ?

L'Udes a créé une plateforme qui s'appelle Valor'ESS et permet d'identifier des indicateurs mesurant les actions des structures, au niveau global et sur chaque champ d'action, en particulier sur l'impact social. La deuxième étape c'est d'y intégrer un bloc qui sera plus spécifique sur la mesure de l'impact carbone. Les structures pourront mesurer ce qui, dans leur activité mais aussi leur fonctionnement interne, peut constituer les axes de progrès pour réduire son empreinte. Cet outil sera opérationnel au moins de juin.

Il y a plein d'autres outils qui ne sont pas utilisés parce qu'il n'y a pas d'accompagnement formatif. Notre stratégie est de dire si nous proposons un outil, il y a aussi une formation.

Le secteur doit également intégrer la logique environnementale pour gagner en attractivité auprès d'un public plus jeune. Est-ce à dire qu'il faille faire émerger une deuxième génération de l'ESS ?

L'ESS a été porté à sa création dans une méconnaissance des enjeux écologiques globaux. Très tôt, des acteurs se sont interrogés sur leur utilité sociale et environnementale. L'urgence fait qu'aujourd'hui effectivement les nouveaux entrants dans nos champs d'activité se sentent concernés et responsables, un peu plus que ce que nous avons été. Forcément, ils nous interrogent, nous poussent à transformer nos pratiques.

La nature des activités sont déjà plutôt « vertes », par contre les façons de les mettre en œuvre ne le sont pas toujours, en termes de consommation d'énergie, de déplacements, de matières premières... Cette transition demande du temps et de l'investissement.

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