Domofrance resserre ses investissements sous l'effet des crises

Le premier bailleur social de Nouvelle-Aquitaine dévoile son nouveau projet d'entreprise en annonçant un ralentissement des ambitions d'investissement, abaissées à 3,5 milliards d'euros sur dix ans. Un niveau tout de même remarquable au vu du contexte actuel, avec une crise de la construction qui fait baisser de 20 % les livraisons de logements sociaux.
Maxime Giraudeau
Domofrance a produit 1.700 logements sociaux en Nouvelle-Aquitaine en 2022, dont 36 appartements en accession sociale à Floirac en Gironde.
Domofrance a produit 1.700 logements sociaux en Nouvelle-Aquitaine en 2022, dont 36 appartements en accession sociale à Floirac en Gironde. (Crédits : DR)

La crise de la construction neuve s'enlise et l'année 2024 s'annonce comme celle du chaos pour la promotion immobilière. Si l'activité des bailleurs sociaux est largement garantie par la puissance publique, les effets se font sentir aussi dans ce domaine. En témoignent le soutien d'urgence apporté récemment à Aquitanis et Gironde Habitat, aux contraintes vécues par inCité à Bordeaux ou à l'enveloppe débloquée au printemps par Bordeaux Métropole. Pour Domofrance, le leader du logement social en Nouvelle-Aquitaine, la situation semble encore sous contrôle.

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Le bailleur, labellisé B-Corp et basé à Bordeaux, a dévoilé ce 16 novembre sa stratégie pour 2024-2028. Baptisé « Vivant », le projet vise à trouver une voie pour maintenir des niveaux d'investissement et d'accession sociale élevés. Et pourtant, les sommes investies comme les logements produits vont tous deux connaître un recul. « Nous n'aurons pas suffisamment de fonds propres ni de assez de leviers d'emprunt pour relever l'ensemble des défis de cette crise », admet Philippe Rondot, son président.

Des objectifs d'investissement intenables ?

Domofrance prévoit d'investir au total 3,5 milliards d'euros sur dix ans sur la construction et la rénovation thermique, soit un objectif de 350 millions annuels, contre 4 milliards d'euros annoncés en 2019. Un seuil abaissé mais qui paraît même difficile à tenir à court terme puisqu'en 2022 le bailleur a mobilisé seulement 199 millions d'euros, en recul de 6 % sur un an, contre 250 millions annoncés. Sur la construction neuve, Domofrance subit au même titre que ses homologues le coup d'arrêt de la promotion immobilière. 20 % de l'objectif de production en logements sociaux ne sont plus livrés. « Les bailleurs sociaux ne sont plus en mesure d'assurer leur mission contracyclique. À cause de la crise, il y a 400 logements chaque année que l'on ne peut pas produire », évoque Francis Stéphan, le directeur général, sur un objectif annuel de 2.000 logements.

Des signes de ralentissement qui inquiètent les représentants patronaux, membres du conseil d'administration du bailleur aux côtés des syndicats professionnels. « On redécouvre que pour avoir un territoire attractif, il faut que les salariés soient logés ! Nos besoins sont très forts en Gironde, il manque 66.000 logements, dont 49.000 sur la métropole ! », insiste Mathias Saura, le nouveau président du Medef Gironde.

La vente et le bail réel solidaire en secours

Si la situation est tendue, les finances de Domofrance quant à elles sont pourtant au beau fixe. En 2022, le bailleur a réalisé un chiffre d'affaires record de 261 millions d'euros, qui devrait encore augmenter cette année. Quelle que soit leur situation, les bailleurs sociaux sont contraints de maintenir des niveaux d'investissement ambitieux sur la rénovation thermique pour répondre aux réglementations qui vont interdire la location des logements classés G en 2025, F en 2028 et E en 2034. Domofrance a pour sa part diminué de 15 % les émissions de son parc et veut mobiliser 700 millions d'euros pour atteindre la neutralité carbone en 2040.

L'accès à l'emprunt est toujours facilité grâce à la garantie de l'État au côté des bailleurs mais pour faire face à la hausse globale des coûts de production, la vente d'une partie du parc locatif s'est ancrée dans les pratiques. Chaque année, Domofrance vend ainsi 300 à 350 logements sur un parc global de 40.000 unités en Nouvelle-Aquitaine. De quoi abonder les fonds propres, même si une partie des maires refusent de voir des logements sociaux passer sous giron privé. Autre moyen, le bail réel solidaire (BRS) qui permet de dissocier foncier et bâti afin de ne proposer à la vente que le second. Domofrance en génère 300 chaque année. Des pistes pour donner un peu d'air et espérer limiter les dégâts de la tempête annoncée.

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Maxime Giraudeau

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