Immobilier neuf : pourquoi rien n'arrête la chute du marché à Bordeaux Métropole

Le marché du logement neuf est entré à Bordeaux Métropole et Bordeaux dans une phase de crise aiguë où, défiant les lois de l'économie, les prix continuent à grimper alors qu'il n'y a quasiment plus de vendeurs ni d'acheteurs. Asphyxiées par ce marché comateux, les mises en vente chutent sur un an dans la Métropole. Une situation critique où seul l'immobilier ancien réagit encore normalement aux signaux du marché. Le bail réel solidaire (BRS) sera-t-il l'arme ultime pour casser la folle montée des prix dans le neuf ?
A Bordeaux les prix du neuf n'ont pas bougé alors que les ventes chutaient de -68 % sur un an.
A Bordeaux les prix du neuf n'ont pas bougé alors que les ventes chutaient de -68 % sur un an. (Crédits : Agence APPA)

Le marché immobilier du neuf à Bordeaux Métropole continue à s'enfoncer dans les sables mouvants d'une crise qu'aucun ressort économique n'est encore capable de dénouer. Au lieu de s'effondrer, les prix de vente continuent à monter et n'arrivent laborieusement à se stabiliser que dans le meilleur des cas. Un phénomène qui frôle le surnaturel alors qu'il n'y a quasiment plus de produits à vendre ni même d'acheteurs...

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Encore que, il y ait eu de vrais frémissements depuis le début de l'année dans le domaine des mises en ventes. Comme le dévoile la dernière étude de l'Observatoire immobilier du Sud-Ouest (Oiso), à Bordeaux Métropole le nombre de ces mises en ventes était ainsi de 480 au 2e trimestre 2023 contre 271 au trimestre précédent. Soit une très forte hausse de +77,1 % qui ne suffit pourtant pas à redresser l'évolution des mises en ventes sur une année glissante, qui reste dans le rouge à -34 %. Et puis avec 289 logements vendus au 2e trimestre 2023, le marché métropolitain continue à plonger de -57 % sur une année glissante (même période en 2022). Une tendance en lien avec la crise traversée par le logement neuf en France.

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+696 % de logements mis en vente au 2e trimestre !

Cerise sur le gâteau de cette crise, un nouveau type de stock vient d'apparaître. Il est constitué de 210 lots qui ont été livrés mais qui n'ont pas encore trouvé d'acquéreurs. Une réalité à remettre en perspective, sachant qu'en France un programme immobilier neuf ne peut pas être mené à terme et livré si au moins 50 % de sa surface n'a pas été vendue sur plan au préalable. À Bordeaux intra-muros la remontée des mises en ventes de logements neufs est totalement explosive. Leur nombre passe ainsi de 29 à 231 logements entre les premier et deuxième trimestre 2023 : soit une envolée de +696 % ! Un vent de panique serait-il en train de balayer les rangs des promoteurs bordelais ?

« Non ce n'est pas de la panique. C'est plus simplement lié au fonctionnement chaotique du marché immobilier dans le neuf. Tant que les opérateurs n'ont pas une assez bonne visibilité, les programmes livrés ne sont plus mis en vente. Ce qui entraine des reports, avec des quasi ruptures d'approvisionnement du marché en mises en ventes puis des afflux massifs de produits, comme en ce début d'année », recadre en substance pour La Tribune Christophe Duportal, président de l'Oiso.

Seul l'immobilier ancien réagit normalement à la crise

Au total, sur un an, l'offre à la vente à Bordeaux progresse de +19 % (avec 1.338 lots disponibles), alors que les ventes continuent à chuter. C'est ainsi que 71 ventes ont été enregistrées à Bordeaux au 2e trimestre 2023, en chute de -68 % sur un an. Malgré cette chute des ventes, le prix moyen quant à lui ne bouge pas, ce qui le fait ressembler au nœud coulant de la corde d'un pendu, et s'établit à 5.293 euros/m2. La situation est tellement confuse qu'il n'est plus possible de se concentrer uniquement sur le neuf pour y voir clair sur le marché.

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Comme l'avaient diagnostiqué les promoteurs immobilier avant la crise du Covid, Bordeaux est travaillé par un second marché, celui de l'immobilier ancien, où les prix ont pendant des années grimpé plus vite que dans le neuf, poussant à la hausse la totalité du marché bordelais. Une singularité liée à la forte attractivité de la ville, qui semble désormais fonctionner de façon on ne peut plus normale, puisque ce marché n'est pas bloqué par le niveau des coûts de construction et peut osciller librement.

« Le marché de l'ancien a enregistré des correctifs importants, avec des baisses de prix de -7 à -10 %. Dans le neuf ces correctifs sont très limités à Bordeaux, et les prix continuent à progresser dans la Métropole », éclaire Christophe Duportal.

Est-il imaginable que les promoteurs puissent casser les prix ?

Partant du fait, comme le souligne le président de l'Oiso, que dans le neuf il n'y a plus d'offres et pas non plus de clients, cette situation de hausse des prix ressemble à un problème incompréhensible. De fait elle ne peut se comprendre qu'en étant insérée dans le cadre plus large des crises macroéconomique qui déferlent depuis le Covid sur le secteur du bâtiment.

« Les prix ne vont pas baisser car la hausse des coûts de construction répond à l'inflation. Alors y aura-t-il une baisse du côté du foncier ? », interroge Christophe Duportal.

Hormis ces deux leviers sous fortes contraintes, il ne reste plus que les promoteurs pour faire rêver d'une détente sur les prix par le biais d'offres commerciales coup de poing. Le problème c'est qu'ils ne sont globalement pas en bonne santé et que, côté clients, la hausse des taux d'intérêts motivée par la lutte contre l'inflation - qui suppose d'étrangler l'économie (éventuellement jusqu'à la syncope) pour ralentir la production et la circulation de monnaie - continue à peser sur l'immobilier.

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Bail réel solidaire (BRS) : une lueur au bout du tunnel

En attendant une rupture très franche avec les conditions inflationnistes actuelles, seul le dispositif du bail réel solidaire (BRS) serait à même de casser l'infernale course à l'abîme déclenchée par la montée des prix. Ce dont le patron de l'Oiso est convaincu.

« La production en BRS commence à se développer dans les zones immobilières tendues, dans le sud des Landes, la Côte basque et la Métropole. Le BRS fait immédiatement baisser les prix, mais avec un autre mécanisme de propriété, qui retire la propriété du sol à l'acquéreur du bien immobilier. Avoir la propriété des murs mais pas celle du sol, ce n'est pas évident pour les Français. Pourtant en ville, la propriété du sol dans un immeuble tout le monde s'en fout. Et en supprimant le coût du foncier de l'addition d'une accession à la propriété : on casse les prix. Le problème c'est qu'aujourd'hui le BRS est porté par des opérateurs publics. Il faudrait le déléguer au privé », analyse Christophe Duportal pour La Tribune.

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Commentaire 1
à écrit le 05/09/2023 à 8:52
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