Immobilier : comment le Pays basque veut endiguer la flambée des prix

Confrontée à des prix immobiliers comparables voire supérieurs à ceux des grandes métropoles, la Communauté d’agglomération du Pays basque souhaite disposer de plus de moyens pour résoudre l’inadéquation entre l’offre et la demande à l’achat comme à la location. L'heure est à la réflexion autour des leviers fiscaux, de l'encadrement des loyers et de la création d'une autorité régulatrice.
À Hendaye, le prix médian d'une maison a encore progressé de 3 % en 2022 pour atteindre près de 500.000 euros.
À Hendaye, le prix médian d'une maison a encore progressé de 3 % en 2022 pour atteindre près de 500.000 euros. (Crédits : Ph.Laplace)

Bayonne, Biarritz, Anglet. Cette année encore ces trois villes basques, tout comme le village de Guéthary, caracolent en tête du classement de l'association « Villes et Villages où il fait bon vivre ». Des récompenses faisant la fierté des habitants et des responsables politiques, mais qui sont aussi critiquées par peur de l'accentuation de la crise du logement. Celle-ci ne date pas d'hier dans cette région touristique et attractive, où la population a progressé de 9,6% au cours de la dernière décennie. Des tags « Euskal Herria ez da salgai » (« le Pays basque n'est pas à vendre ») ont fleuri visant ces nouveaux habitants, mais avant tout les nombreux propriétaires de résidences secondaires, dont, toutefois, « la moitié réside dans la région » précise l'Insee. Après une première manifestation en novembre 2021, 3.500 personnes ont défilé le 1er avril dernier à Bayonne pour demander aux pouvoirs publics d'agir davantage.

Si la hausse des prix a été générale dans les Pyrénées-Atlantiques depuis ces dernières années, sur la côte où se concentrent les emplois, elle est telle que de plus en plus de personnes sont contraintes de s'installer dans les Landes ou les communes du Pays basque intérieur. En 2022, la hausse moyenne du prix d'un appartement dans le département a encore été de 16,5 % selon la chambre des notaires (chiffres à fin novembre). Toutefois, le tarif médian de 3.510 euros/m2 cache des disparités fortes, entre 690 euros/m2 à Mourenx, proche de Pau, à plus de 8.000 euros/m2 à Biarritz en front de mer. De même, dans le département, le prix médian est de 260.000 euros pour une maison ancienne, en hausse de 8,3 % sur un an, mais il n'est plus rare d'approcher le million d'euros sur la côte basque où le prix médian a encore bondi de 16 % à 662.000 euros, soit un niveau plus élevé qu'à Bordeaux ! À Biarritz, il est atteint même 995.000 euros, en hausse, là-encore, de 16 %.

De même, d'après l'observatoire des loyers, le loyer médian dans ce territoire où plus de sept ménages sur dix peuvent prétendre à une HLM est de 10,5 euros/m2, soit le même niveau qu'à Strasbourg ou Toulouse.

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Inadéquation trop importante

C'est pour inverser cette tendance que la Communauté d'agglomération Pays basque (CAPB) a demandé à intégrer le dispositif de l'encadrement des loyers, en vigueur à Paris ou encore Bordeaux. La candidature est actuellement étudiée par l'État, la mise en œuvre ne devant pas intervenir avant 2025. « Nous utilisons tous les moyens légaux à notre disposition, mais l'inadéquation entre l'offre et la demande est trop importante, pour les biens à l'achat comme à la location », affirme Jean-René Etchegaray, maire de Bayonne et président de la CAPB. Ainsi, pour dissuader des acheteurs de résidences secondaires ou pousser des propriétaires à la vente, les communes qui le peuvent appliquent depuis plusieurs années ou mois déjà la surtaxe maximale de 60% sur la taxe d'habitation.

La CAPB a par ailleurs voté en mars 2022 un nouveau règlement sur la location saisonnière dans la « zone tendue » de 24 communes, sur un total de 158, arguant que le nombre d'annonces de locations avait bondi de 130 % entre 2016 et 2020. Depuis le 1er mars dernier, l'autorisation délivrée pour trois ans pour la location d'une résidence secondaire aux touristes est conditionnée à la compensation, c'est-à-dire la location d'un autre bien à l'année, mais à des conditions précises et quasi-impossibles à satisfaire. S'il y a eu une forte hausse des demandes dans les mois précédant l'entrée en vigueur, elles se comptent depuis sur les doigts d'une main se réjouit la CAPB. Les détracteurs, qui continuent leur combat judiciaire, craignent, eux, des effets néfastes, sur le tourisme représentant 2 milliards d'euros et 15.000 emplois. Des entreprises de tous les secteurs confondus, dont plusieurs se sont alliées début 2023 dans le collectif Entzun (« écoute ») pour participer au débat, rétorquent que la crise du logement les empêche déjà de recruter.

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Autorité organisatrice de l'habitat

« Nous aimerions accéder au statut d'autorité organisatrice de l'habitat (AOH) qui nous donnerait plus de pouvoirs et permettrait d'avoir une politique de logement offensive et non défensive », argumente Jean-René Etchegaray, rappelant que la CAPB a également décidé fin 2022 de préempter toutes les ventes de fermes et de terrains agricoles à des prix excessifs. Le statut d'AOH créé par la loi 3DS, auquel seules les métropoles de Brest et Rennes ont pour le moment accédé, donnerait de nouvelles prérogatives, mais qui restent encore à définir. En parallèle, la CABP se mobilise avec les parlementaires locaux pour une hausse de la taxation sur les revenus de la location saisonnière et compte signer cette année une charte avec les promoteurs pour davantage de constructions à des prix accessibles.

C'est, de longue date, l'ambition de la foncière du Crédit Agricole Pyrénées Gascogne, mais qui devient de plus en plus difficile de réaliser. L'objectif de zéro artificialisation nette, mesure phare à horizon 2050 de la loi Climat et résilience, ne fait qu'accentuer la pression sur un marché des terrains à bâtir déjà tendu. « Avec la hausse des coûts de construction et du nombre de recours, beaucoup de projets ont déjà été gelés », pointe Florence Burdin, directrice marketing, immobilier et technologies de la première banque locale.

Sur l'offre existante, le début d'une accalmie semble en revanche se faire sentir : « il y a moins d'acheteurs qu'il y a un an, car les conditions de crédit se sont resserrées. Les acheteurs commencent à reprendre la main », constate Benoît Lavigne, fondateur de l'agence Osaba Immobilier à Anglet. Alors que certains vont jusqu'à imaginer une priorité aux acheteurs locaux au Pays basque, comme évoqué également en Bretagne et en Corse, les solutions à la crise du logement seront nécessairement diverses. « Densifier les quartiers, rénover davantage, mais aussi imaginer d'autres formes de logements, par exemple évolutifs avec une terrasse pouvant être transformée en chambre lors que la famille s'agrandit ou ses besoins évoluent », suggère ce professionnel.

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Commentaires 2
à écrit le 23/04/2023 à 9:31
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Espérons que ces mesures suffisent. La colère gronde la bas. Celle exprimée à Bayonne comme celle de l’intérieur des terres qui ne s’exprime pas.

à écrit le 22/04/2023 à 15:34
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Le probleme du marche de l'immobilier basque est tous simplement quil y a des basques qui vendent leur maisons a un prix que d'autres basques ne peuvent tenir . cela sappelle la loi du marché. Il faut donc arreter de dire le mechant parisien qu...

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