
Devenu un opérateur tricolore de référence dans la création de parcs éoliens et de centrales solaires, mais surtout dans la production et la distribution d'électricité verte, le groupe bordelais Valorem a publié le 17 juin le bilan de son exercice 2022. Avec des chiffres en forte hausse. L'an dernier Valorem a profité de la crise énergétique. Le chiffre d'affaires de l'entreprise, qui emploie 420 salariés, a ainsi grimpé de +95 % pour atteindre la barre des 110 millions d'euros. Valorem évolue sur un marché émergent encore fortement règlementé en France, pour ne pas dire corseté. Avec un contrôle des prix de vente millimétré par l'État.
« Cet exercice, au cours duquel nous avons réalisé un résultat net de 21 millions d'euros, ce qui est quand même correct, est marqué par deux aspects exceptionnels. Il s'agit tout d'abord de la vente en Finlande du parc éolien de Kalistanneva, qui a fortement fait progresser notre chiffre d'affaires. Et puis nous évoluons sur un marché très réglementé et l'an dernier l'État nous a autorisé à vendre pendant 18 mois notre énergie plus cher sur le marché. Nous avons ensuite été taxés sur le produit de cette hausse alors qu'il s'agissait de nous redonner un ballon d'oxygène, ce dont nous nous sommes plaints », relate Marc Rouberol, directeur général de Valorem.
Un emprunt de 135 millions d'euros étalé sur 11 à 25 ans...
Grâce à la cession de Kalistanneva, le groupe bordelais a pu réinvestir pour prendre le contrôle à 100 % du parc éolien finlandais de Matkussaari, jumeau du premier, moyennant un investissement de 135 millions d'euros réalisé à partir d'un fonds de dette flexible contacté auprès de la société financière danoise d'investissement AIP Management. Avec un emprunt au profil très original puisqu'il sera à rembourser au terme d'une période flottante comprise entre 11 ans et 25 ans, en fonction de l'évolution du prix de l'électricité... Le groupe bordelais a également bouclé à la mi-juin 2023 une nouvelle opération de financement participatif d'un montant de 19,5 millions d'euros, destinée au financement de la croissance de l'entreprise.
« Nous avons réalisé notre première opération de financement participatif en 2012 et je crois bien que c'est nous qui avons inventé ce modèle de financement participatif mis au service d'entreprises engagées dans la production d'énergies renouvelables. Nous proposons aux investisseurs des titres qui fonctionnent comme des obligations, avec un amortissement sur trois à cinq ans et une rémunération garantie de 3 % à 5 %. Nous avons aussi un système de taux d'intérêts bonifiés pour les riverains des parcs éoliens ou photovoltaïques que nous développons. Avec une bonification qui peut aller jusqu'à 50 points de base (0,5 % -Ndr) », détaille par le menu Marc Rouberol, qui, avant de devenir directeur général de Valorem, a commencé l'aventure en tant que directeur financier.
Pionnier du financement participatif
Depuis 2012, le bras droit de Jean-Yves Grandidier a tout vu ou presque. La langue de bois n'est pas sa vocation et il admet que certains projets éoliens suscitent l'hostilité de la population, d'où un travail de dialogue suivi avec les populations que le groupe essaie d'associer à ses projets.
« Notre modèle de financement, nous l'avons élaboré nous-même et notre idée c'est aussi de faire redescendre la création de valeur sur les gens qui sont concernés tous les jours par nos parcs. Depuis que nous développons des parcs, nous intégrons des clauses d'insertion à nos chantiers pour les publics les plus éloignés de l'emploi. Nous le faisons de nous-mêmes, sans rien demander aux politiques », souligne ce DG tout-terrain.
La dernière opération de financement participatif de Valorem a mobilisé plus de 5.400 investisseurs particuliers, qui ont souscrit pour 17,5 millions d'euros de prêts (soit 3.240 euros par prise de participation en moyenne), dans une opération qui a pris sept mois et qui a été bouclée à hauteur de deux millions d'euros grâce à l'intervention d'un fonds dédié à la transition énergétique. Pour aller jusqu'au bout de ce Meccano, précisons qu'il s'articule en trois volets, avec une opération montée par la plateforme MonParcValorem.com en partenariat avec Lendosphère (9,5 millions d'euros), une autre avec la plateforme Lumo (8 millions d'euros) et le fonds privé à deux millions d'euros.
L'éolien terrestre, seule réponse à l'explosion de la demande
Aujourd'hui Valorem, tout en continuant dans les centrales solaires et en préparant ses premières opérations dans l'éolien offshore, s'apprête à donner un nouveau coup d'accélérateur dans l'une de ses activités devenue un classique-maison : l'éolien terrestre.
« Il n'y a pas de solution idéale. La hausse de l'électrification des usages va provoquer une très forte croissance de la production d'électricité. Or le parc des centrales nucléaires ne pourra pas se relancer avant 2035 si tout va bien. Pour les parcs éoliens offshore il va falloir attendre dix ans pour qu'ils montent en puissance. En attendant qu'est-ce qu'il reste ? Les parcs photovoltaïques, qui ne suffiront pas. On le voit, la seule option valable qui reste c'est l'éolien terrestre. Cette explosion de la demande électrique est très bien décrite dans le dernier rapport de RTE qui portait au départ sur l'état de la production électrique en 2050 mais qui vient d'être remis à jour à 2035 pour tenir compte de l'accélération des processus », avertit Marc Rouberol.
Énergie : un marché financier avec des traders
Le directeur général vit une révolution centrée sur la transition énergétique, avec des énergies renouvelables qui commencent à pouvoir s'appuyer sur un vrai marché dont la nature profondément spéculative s'est affirmée avec la crise de 2022. Avec toutes les conséquences qui en découlent.
« Quand j'ai démarré, j'étais tout seul pour m'occuper de la gestion financière de l'entreprise, à temps partiel, en plus du reste puisque ça n'arrêtait pas... Aujourd'hui, avec le développement qu'a connu Valorem, il a fallu staffer et là où j'étais seul en 2012, il y a sept salariés qui travaillent à temps complet sur le sujet. Il y a plus de complexité financière et cela ne s'arrête pas. Avec la volatilité des marchés de l'énergie nous sommes obligés de développer les moyens de stockage de l'énergie, pour pouvoir intervenir au meilleur moment, pour placer le meilleur prix de vente. Au niveau financier ça devient aussi pointu que le trading sur les marchés des matières premières... Tôt ou tard nous allons devoir recruter des profils de type trader... »
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