L’activité de Lectra continue à grimper malgré la menace trumpiste

Le climat d’incertitude sur les marchés internationaux créé par les fracassantes déclarations protectionnistes du président des Etats-Unis, Donald Trump, commence à peser sur le secteur de l'automobile mais pas encore sur Lectra, qui réalise pourtant 90 % de son chiffre d’affaires à l’export.
L'automobile est devenue un secteur clé pour Lectra
L'automobile est devenue un secteur clé pour Lectra (Crédits : Denis Balibouse)

Leader mondial de la découpe de matériaux souples, le groupe Lectra, à Cestas (Gironde) et Paris, coté en Bourse, vient de publier ses résultats au titre du 1er semestre 2018. Lectra, qui emploie désormais 1.700 salariés, dont Daniel Harari est le PDG, a conservé à Cestas, où l'entreprise est née, son appareil de production, le puissant service recherche et développement du groupe ainsi que sa vitrine commerciale internationale. Avec un chiffre d'affaires de 73 M€ aux deuxième trimestre 2018 (277,2 M€ de CA en 2017) l'activité progresse de +9 % sur un an : par rapport à 2017 pendant la même période.

Cette évolution ressort d'un calcul à données comparables, c'est-à-dire avec des chiffres 2018 traduits au taux de change entre euro et dollar de 2017. Le résultat opérationnel de Lectra (écart entre les produits et les charges d'exploitation) atteint 9,8 M€ contre 9,1 M€ au deuxième trimestre 2017. Le résultat net est en hausse de +10 %, à 6,9 M€.

"Au deuxième trimestre nous réalisons d'excellents résultats malgré des vents largement contraires. Notre chiffre d'affaires est en hausse de +9 %, ce qui le situe dans la fourchette de croissance que nous avions prévue. Notre cashflow libre (trésorerie créée par l'activité de l'entreprise -NDLR) est au niveau de nos commandes et, à 5 M€ ce deuxième trimestre contre 2,4 M€ l'an dernier, il est très bon", commente pour La Tribune Daniel Harari.

Donald Trump, seigneur de la guerre commerciale

Le PDG de Lectra estime que le chiffre d'affaires trimestriel aurait pu être meilleur mais se félicite toutefois de sa progression très soutenue à +9 %. L'instabilité du contexte économique international va en s'aggravant observe Daniel Harari, à cause de l'agressive stratégie protectionniste de Donald Trump.

"Le monde devient plus compliqué. Trump fait monter la pression et va continuer jusqu'aux élections de mi-mandat, en novembre. Parce qu'avec cette escalade protectionniste il adresse un signal fort à sa base électorale. Les grands constructeurs automobiles américains, comme Ford, ont essayé d'alerter Donald Trump mais ses préoccupations n'ont rien à voir avec l'amélioration de la croissance américaine. L'attentisme des équipementiers, pour lesquels nous travaillons, est dû à la peur de l'inconnu, mais au fur et à mesure que les choses se précisent les entreprises se rassurent parce qu'elles commencent à comprendre ce qu'elles vont pouvoir faire", observe Daniel Harari.

Le marché automobile, qui pour Lectra englobe la découpe des airbags mais aussi des sièges tissus ou cuir, sans compter les habitacles, représentait 44 % du chiffre d'affaires du groupe en 2016 (260 M€), devant les secteurs de la mode et de l'habillement (40 % du CA) et l'ameublement (10 %).

L'Europe va-t-elle payer les pots cassés ?

"Au deuxième trimestre, les commandes ont atteint un bon niveau et les marges progressent fortement, ligne de produit par ligne de produit. Sur le plan interne tout va bien, même si le contexte international pèse lourd, rappelle Daniel Harari. Pour moi, poursuit-il, l'événement majeur c'est ça : cette guerre économique amorcée par Trump entre les Etats-Unis, l'Union européenne et la Chine. Le risque c'est que l'Union européenne ne soit pas assez forte et finisse par payer les pots cassés de la guerre commerciale entre les Etats-Unis et la Chine."

Au premier semestre 2018, l'euro s'est apprécié de +12 % face à au dollar, avec une parité moyenne de 1,21$ pour 1€. Une évolution qui renchérit le coût des marchandises fabriquées en euro sur le marché international par rapport à celles manufacturées en zone dollar. Une situation pénalisante pour la majorité des exportateurs français parmi lesquels Lectra, confirme le PDG.

"La forte hausse de l'euro par rapport à la grande majorité des devises a eu un impact mécanique négatif important sur les résultats du premier semestre. Elle se traduit par une diminution de 7 M€ (-5 %) du chiffre d'affaires et de 3,9 M€ (-18 %) du résultat opérationnel, dans les chiffres exprimés à données réelles par rapport à ceux établis à données comparables", relève ainsi le groupe.

Lectra : 57 % d'activité récurrente

Malgré cette amputation due à l'évolution des parités monétaires, à données comparables le chiffre d'affaires du groupe a progressé de +6 % au premier semestre 2018, à 140,2 M€ (à données comparables), manifestant ainsi un gros potentiel. Le résultat net recule de son côté de -4 % à données réelles pour atteindre 12,3 M€.

"Au premier semestre notre activité a progressé de +9 % sur le marché de la mode : nous sommes impactés par les tensions internationales mais pas encore fortement. Les clients qui achètent des costumes Dior ne vont pas pinailler sur quelques euros. Aux Etats-Unis, 98 % des costumes sont importés d'Europe et de Chine. Si Trump les taxe à 25 % cela ne touchera pas les produits de qualité", éclaire le PDG.

Parmi ses atouts, le groupe a notamment pour lui de réaliser plus de 40 % de son activité en Europe, contre 27 % dans les Amériques et 26 % dans la région Asie-Pacifique. En 2016, son chiffre d'affaires récurent représentait 57 % de l'activité et aujourd'hui Lectra, dont les capitaux propres atteignent 152,5 M€, n'a plus de dettes. Au terme de l'exercice 2018 le groupe vise un chiffre d'affaires en hausse de +6 à +10 % et estime que si la nouvelle parité euro/dollar, à 1,17 $ pour 1 € atteinte fin juin reste stable, ce jeu monétaire sera sans impact sur l'activité au second semestre. Lectra continue d'appliquer sa feuille de route pour répondre à toutes les exigences de l'industrie au format 4.0.

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