Lectra fait face à des turbulences

Pour la première fois depuis 12 trimestres, comme le précise son PDG Daniel Harari, le groupe Lectra, jusque-là en croissance continue, subit un petit ralentissement dû à la crise protectionniste qui touche le marché automobile.
Daniel Harari

Après trois années de croissance continue sans la moindre anicroche, le groupe Lectra, à Cestas (Gironde) et Paris, coté en Bourse, leader mondial sur le marché de la découpe de matériaux souples (à lame ou à laser) pour les marchés de la mode, de l'habillement et de l'ameublement, entre dans une zone de turbulence. L'effet de parité monétaire euro-dollar, qui provoque une baisse apparente du chiffre d'affaires, de 69,5 M€ au 1er trimestre 2017 à 67,2 M€ au 1er trimestre 2018, et du résultat opérationnel (de 9,4 M€ à 7,2 M€) est toutefois un non sujet pour le PDG de Lectra, Daniel Harari.

"Cet effet de parité monétaire était anticipé. Nous l'avions annoncé sur l'année 2018. Mais il se trouve qu'au 1er trimestre 2017 l'euro a été historiquement bas par rapport au dollar. 1,03 dollar pour 1 euro : on n'avait pas vu ça depuis 2003 ! A données comparables, avec les chiffres 2018 traduits aux cours de change 2017, notre chiffre d'affaires est en hausse de +3 % et notre résultat opérationnel de +5 %" recadre Daniel Harari.

L'automobile dans la nasse protectionniste

Le vrai sujet de surprise, qui a eu un effet limité mais réel sur l'activité du groupe, découle de la politique douanière à vocation isolationniste menée aux Etats-Unis par Donald Trump. L'annonce début mars de sa stratégie agressive sur les importations d'acier aux Etats-Unis a brutalement activé les foyers de tension qui couvaient depuis des mois, en particulier dans le marché automobile.

"Le vrai chiffre, c'est que nos commandes de nouveaux systèmes de découpe sont en recul de 7 %, à 28,2 M€, par rapport au premier trimestre 2017. Cette baisse vient du fort recul, de -54 % sur un an, du marché automobile. Les acomptes sur les commandes, qui devaient nous être payés au 10 avril, ne l'ont pas été. Le plus impressionnant c'est que la plupart du temps les responsables opérationnels ont validé des commandes, qui n'ont pas été suivies d'effet sur décision des dirigeants des entreprises clientes" décrypte Daniel Harari.

Suite à l'annonce par Donald Trump des mesures de rétorsions douanières sur les prix de l'acier, la République populaire de Chine, qui ne boycottait jusque-là que les produits manufacturés sud-coréens, et en particulier les voitures, a élargi son champ d'action.

Une solide structure financière

"La Chine boycotte désormais les voitures américaines. Comme ce sont des joint-venture (coentreprises) sino-américaines qui les importent, tout s'est arrêté d'un coup. Pareil aux Etats-Unis où les groupes américains propriétaires d'usines au Mexique n'osent plus investir dans ce pays, par peur de représailles. Et ça fonctionne aussi du côté mexicain, où plus personne ne bouge et où nous avons fait notre plus mauvais résultat, avec 10 % du chiffre d'affaires visé. C'est d'autant plus frappant que nous travaillons avec les meilleures entreprises et que nos commerciaux étaient sûrs de leurs ventes, tout comme les acheteurs de nos clients automobiles étaient sûrs qu'ils allaient acheter !" rembobine le PDG de Lectra.

L'à-coup provoqué par la chute du marché automobile provoque un ralentissement sans entamer pour autant la structure du groupe, dont la solidité financière tutoie des sommets. Lectra, qui n'a plus de dette financière, affiche ainsi 156,7 M€ de fonds propres, et après le décaissement de 7,1 M€ pour l'acquisition de la startup italienne Kubix Lab, la trésorerie du groupe était de 93,6 M€. Si le résultat net trimestriel recule de 17 % il reste tout à fait positif, à 5,4 M€. Tandis que le chiffre d'affaires récurrent augmente de +6 %, à 38,3 M€. Par ailleurs, et malgré la contre-performance du marché automobile, le groupe a réalisé des ventes en forte hausse dans la mode (+31 %) et l'ameublement (+61 %).

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