Réglementation Airbnb : les hôtes en passe de perdre la partie à Bordeaux

Devant la Cour administrative d'appel de Bordeaux, le rapporteur public a appelé ce 9 janvier à rejeter le recours des hôtes Airbnb visant à annuler la réglementation de Bordeaux Métropole. Les propriétaires contestent un arbitrage politique datant de 2017 qui rendrait pour beaucoup la location « impossible ».
Maxime Giraudeau
En 2023, Bordeaux comptait plus de 6.000 logements disponibles à la location sur Airbnb, contre près de 10.000 en 2018.
En 2023, Bordeaux comptait plus de 6.000 logements disponibles à la location sur Airbnb, contre près de 10.000 en 2018. (Crédits : Agence APPA)

« L'hypercentre de Bordeaux est face à une situation très tendue pour la location que personne ne peut véritablement contester. [...] Le marché est déjà déséquilibré par une offre locative insuffisante. » Par une audience qui s'est tenue ce 9 janvier devant la Cour administrative d'appel de Bordeaux, le rapporteur public s'est ainsi prononcé en faveur de Bordeaux Métropole et de la ville de Bordeaux pour faire annuler un recours déposé par les hôtes Airbnb qui y louent des meublés touristiques.

Les propriétaires mettent en cause la réglementation métropolitaine qui vise à rendre plus difficile la commercialisation de biens sur des plateformes de location courte durée. La décision de la Cour sera prononcée à partir du 30 janvier mais déjà cette réquisition donne une première tendance sur les arguments qui pourraient clore le contentieux initié en 2018.

En juillet 2017, Bordeaux Métropole mettait fin à la totale liberté de la plateforme de location Airbnb dans l'hypercentre urbain. Par la réglementation alors votée, et sur demande de la municipalité, les élus ont conditionné la mise d'un bien sur le marché locatif de courte durée à une compensation. Depuis sa mise en place en 2018, un propriétaire doit proposer un bien équivalent à la location sur le marché classique dès le premier bien qu'il loue sur Airbnb ou chez l'un de ses concurrents. Et ce soit en se portant acquéreur d'un logement dans le même quartier, soit en changeant la destination d'usage d'un local commercial qui n'est pas situé en rez-de-chaussée pour l'équivalent de 500 euros du m2.

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Une réglementation bordelaise trop stricte ?

Une façon pour les élus de réguler la hausse de l'offre locative pour les touristes, qui se fait au détriment de celle proposée aux résidents à l'année. La réglementation a eu un effet puissant puisqu'en 2023, Bordeaux comptait plus de 6.000 logements disponibles à la location sur Airbnb, contre près de 10.000 en 2018.

Pour les propriétaires, la réglementation bordelaise se révèle beaucoup trop stricte par rapport à celles d'autres métropoles françaises. « Le règlement bordelais ne permet pas d'obtenir une compensation, il la rend impossible !, oppose Me Sarah Bouët, avocate de l'association des hôtes de Bordeaux et de Nouvelle-Aquitaine. D'autres réglementations municipales ont fait autrement. Au Pays basque, je peux louer ma résidence secondaire durant l'été si je prouve que durant l'année j'ai proposé ce bien à la location étudiante. A Bordeaux je ne peux pas le faire. À Royan, je ne suis concerné par cette compensation qu'à partir du troisième bien loué. À Nantes, je peux louer mon premier bien comme je veux. »

Amendes pour les propriétaires

Mais pour la partie adverse, la capitale girondine fait figure de cas à part à juste titre. « La réglementation apparaît comme légale à tous points de vue mais aussi légitime pour une collectivité comme Bordeaux face à cette particularité de la pénurie de logements et cette disparition dans certains quartiers des familles qui louent sur la longue durée », rétorque Me Jean Merlet-Bonnan, avocat de la ville de Bordeaux. Localité dont l'hypercentre est recensé comme zone tendue selon la définition de la loi Alur rappelle par ailleurs l'avocat de Bordeaux Métropole Me Eric Sagalovitsch. Selon lui, 20.000 personnes seraient en attente d'obtenir un logement sur le secteur.

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Une tension que les plaignants n'observent pas et qui ne permet pas selon eux de justifier une réglementation stricte. « Nous estimons qu'il ne s'agit pas d'une interdiction proportionnée. La proportion a été trouvée dans d'autres communes de France », appuie l'avocate de l'association des hôtes, qui compte plusieurs dizaines de membres à Bordeaux. Une trentaine d'amendes ont d'ailleurs été prononcées à leur encontre pour absence de compensation depuis l'arrivée de la réglementation. Ils attendent désormais l'avis de la Cour administrative d'appel alors que le Tribunal administratif les avait déboutés en octobre 2021. Des joutes juridiques qui se poursuivent alors que l'abattement fiscal favorable aux locations de type Airbnb vient d'être supprimé, « par erreur », par la loi de finances pour 2024.

Maxime Giraudeau

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