Lorsqu'un chef d'entreprise franchit la porte de l'étude d'un administrateur judiciaire, il le fait souvent de manière résignée, en étant convaincu que son entreprise est déjà dans une situation critique, voire qu'elle est condamnée à passer par une procédure collective devant le tribunal de commerce. Ils ignorent la plupart du temps qu'ils peuvent bénéficier d'une procédure amiable confidentielle. Dans de nombreux cas, les administrateurs judiciaires font le constat qu'ils sont sollicités trop tard, par méconnaissance d'un métier dont les professionnels sont assimilés à des « fossoyeurs ».
Une profession dont le rôle de prévention est méconnu
Les administrateurs judiciaires sont avant tout des experts de la gestion et de la restructuration d'entreprise. Dans la palette d'outils dont ils disposent, les procédures amiables permettent aux entrepreneurs de consulter ces professionnels en toute confidentialité et en conservant leur liberté. S'ils le font à temps, leur intervention ne sera pas connue de leurs clients et permettra à l'entreprise de passer ses difficultés pour continuer son activité sereinement car il n'y a pas d'impact sur le chiffre d'affaires et donc l'image de la structure. Dans 95 % des cas, une anticipation par un traitement amiable des difficultés évite à terme d'être contraint à une procédure collective (sauvegarde ou redressement voire liquidation judiciaire).
Ce que les chefs d'entreprises ignorent souvent, c'est que l'administrateur judiciaire a une compétence nationale et peut donc intervenir sur tout le territoire. Tout comme le choix d'un expert-comptable ou d'un avocat est à la discrétion du dirigeant, choisir un administrateur judiciaire nécessite qu'un lien de confiance se crée. Cette démarche s'apparente au choix d'un conseil et d'un outil de gestion.
Dans son plan de sortie de crise, le gouvernement prévoit qu'un diagnostic gratuit soit proposé par la profession aux entrepreneurs et indépendants. L'objectif est clair : que les chefs d'entreprises puissent venir voir les professionnels plus en amont de leurs difficultés sans se dire que c'est un échec ! Ainsi, un dirigeant peut faire cette démarche s'il est confronté à des difficultés avérées ou prévisibles risquant d'altérer sa trésorerie : perte d'un client, restructuration d'un marché, repositionnement sur un secteur, absence de paiement par un client, conjoncture (intempéries) ou difficultés cumulées.
Or, lorsqu'ils franchissent la porte des études des administrateurs judiciaires, les chefs d'entreprise sont persuadés qu'ils n'ont plus d'autre choix que de se diriger vers une procédure collective, voire une liquidation judiciaire...Quel gâchis alors que cette issue n'est pas une fatalité !
Former un binôme discret avec le chef d'entreprise
Les procédures préventives qui demeurent à l'initiative et sous le contrôle du chef d'entreprise sont la contrepartie d'une anticipation des difficultés. Le traitement amiable des difficultés est beaucoup moins contraignant et pénalisant qu'une procédure collective.
En effet, dans une procédure amiable, le chef d'entreprise ne perd aucun pouvoir et continue de la diriger. Que ce soit dans le cadre d'un mandat ad hoc ou de conciliation, l'administrateur judiciaire ne prend pas sa place mais propose une assistance sur mesure. Il est au service du chef d'entreprise pour l'aider dans un cadre confidentiel à négocier un accord avec ses créanciers et partenaires. La durée de son intervention varie en fonction du type de mandat choisi : pour le Mandat Ad Hoc le timing est sur-mesure. Pour la conciliation, elle dure 5 mois.
Dans tous les cas, le dirigeant s'adresse au professionnel de son choix, conservant sa liberté, ceci dans une totale confidentialité. Dans un cadre amiable, l'administrateur judiciaire est garant d'une base fiable de travail. Son objectivité fait la force de ses interventions vis-à-vis des tiers et favorise l'aboutissement des négociations vers une solution équitable et pérenne, en dépassant les liens interpersonnels dont on sait qu'ils peuvent interférer dans ce type de situations.
Les difficultés cumulées empêchent les chefs d'entreprises d'oser demander de l'aide, c'est donc aux administrateurs judiciaires de faire savoir qu'ils peuvent les aider à éviter une procédure collective.
Alexandra Blanch est administratrice judiciaire, associée de l'étude ARVA Administrateurs Judiciaires Associés.
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