Dans le vignoble bordelais, un risque peut en cacher un autre. Alors que le plan d'arrachage et de distillation a été lancé début juin pour tenter de répondre à une grave crise de surproduction, c'est désormais le mildiou qui inquiète les viticulteurs. Ce micro-organisme parasite qui attaque les feuilles puis les grappes, a touché d'abord la rive gauche de la Garonne, au sud du département, avant de s'étendre à l'Entre-Deux-Mers à l'est et au Blayais au nord. « Il y en a un peu partout dans le vignoble mais la situation est très contrastée », résume Étienne Laveau, cogérant du Château Piney Saint-Émilion Grand Cru et conseiller viticole bio à la Chambre d'agriculture de Gironde.
Les pluies ont en effet été abondantes en juin mais, dues à des orages le plus souvent, elles ont également été très localisées, « avec de gros volumes par endroits et quatre gouttes cent mètres plus loin », explique-t-il. D'où des variations dans l'apparition de la maladie, d'un secteur à l'autre. Au sein de l'appellation Margaux dans le Médoc, pour l'heure, les spores du mildiou épargnent les grappes et « aucun impact n'est à prévoir sur le rendement », assure-t-on. Idem en Pessac-Léognan.
« J'ai déjà perdu 25 % de ma récolte, j'ai des collègues qui ont perdu 50 % », déplore en revanche Bastien Mercier, viticulteur dans l'Entre-deux-Mers et porte-parole du collectif Viti-33. « Certains ont des pertes conséquentes, ce n'est pas à prendre à la légère », confirme Pierre-Henri Cosyns, installé en Côtes de Bourg et président du Syndicat des vignerons bio de Nouvelle Aquitaine.
Selon lui, la météo « tropicale », propice au mildiou, a démultiplié ses effets en accélérant la croissance des ceps. La situation est compliquée aussi par le manque de main d'œuvre pour tenir le rythme des traitements (pesticides, cuivre, eau salée, etc.) et par la présence de nombreuses friches, vectrices de maladies, dans un vignoble en crise de surproduction.
Pour Bastien Mercier, l'épisode compromet d'ailleurs la campagne de distillation lancée pour absorber les surplus. « Nos chais sont pleins mais avant de les vider, on attend de voir ce que la récolte va donner. Jusqu'au 20 juillet, c'est critique pour la vigne. »
Les professionnels s'en remettent à la météo des prochaines semaines. « Il faudrait du beau temps pendant 15 jours. Le seul produit efficace, c'est le soleil, avec du vent, ça sèche tout », estime Étienne Laveau. Comme à l'été 2018, lors du dernier gros épisode de mildiou.
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