![Mathilde Thomas, la cofondatrice de la marque bordelaise de cosmétiques Caudalie.](https://static.latribune.fr/full_width/2367953/caudalie.jpg)
Sa poule aux œufs d'or, depuis 2005, et cela ne se dément pas, c'est un simple produit anti-tâche pour la peau, hérité d'une vieille tradition et sans cesse réinventé. « Au printemps, quand les femmes taillaient la vigne, elles avaient pris l'habitude de s'appliquer sur le dos des mains et sur le visage la sève qui s'écoule de la plante pour estomper les taches de rousseur ou d'acné, détaille Mathilde Thomas, cofondatrice en 1995 avec son mari Bertrand de Caudalie. Avec le professeur Vercauteren, de l'université de pharmacie de Bordeaux, nous avons réussi à isoler, stabiliser et breveter la molécule de cette sève, la viniférine, dont on a ensuite fait un sérum. Elle est 62 fois plus efficace que la vitamine C pour l'éclat de la peau. »
Vingt ans plus tard, Vinoperfect est devenu le best-seller de Caudalie. Il est même aujourd'hui prescrit en France par les dermatologues.
Bateau sans capitaine
Trois ans après le Covid-19, le groupe affichait l'an dernier une croissance record de 23 %, en particulier aux États-Unis où Caudalie réalise 20 % de son chiffre d'affaires. Là-bas, ses produits sont distribués dans la chaîne de magasins de parfum Sephora, et non dans les pharmacies comme en France. En Asie, en revanche, où la société réalisait 10 % de ses ventes avant 2020, tout est à reconstruire. « On a perdu le contact pendant la pandémie, admet Mathilde Thomas. On ne pouvait pas y aller et notre directrice en Chine a démissionné le premier mois du Covid. On s'est retrouvé avec un bateau sans capitaine ! »
Pour tenter de redresser la barre, en janvier, la marque a nommé pour l'Asie son ancien directeur en Russie et en Europe du Nord. Bertrand Thomas s'est lui lancé sur le marché indien avec un premier soin teinté adapté à la couleur de peau des femmes indiennes.
Un nouveau siège parisien
Côté diversification, la marque chouchou de Victoria Beckham a aussi choisi d'entrer au capital, à hauteur d'1,5 million d'euros, de la startup Skin & Out, spécialisée dans la lutte contre l'acné. Elle a aussi investi dans une autre jeune pousse, Talm, une marque de soins dédiés à la maternité. Le nouveau siège de Caudalie, un hôtel particulier de 5.000 m2 au cœur du quartier hyper-branché du Marais dans le centre de Paris, comprendra d'ailleurs une pépinière d'entreprises où la marque prévoit d'héberger de jeunes sociétés en création.
Il est prévu à l'été 2025 : « C'est le grand projet de l'année prochaine !, se réjouit Mathilde Thomas. On souhaite un complexe où il y aura à la fois un spa vinothérapie, comme à Bordeaux, deux salles de yoga, de pilates et de gymnastique, l'incubateur pour des startups et, bien sûr, nos bureaux. »
Une nouvelle égérie
Autre révolution, cette fois en interne et culturelle pour Caudalie, la société propose, à partir de ce mois-ci, à ses 1.200 employés d'entrer au capital à travers un plan d'épargne d'entreprise. « On n'est pas coté en bourse, rappelle Mathilde Thomas, l'entreprise est 100 % familiale et on n'a pas du tout pour but de la vendre. Chaque année, on fait des résultats, donc les équipes touchent une participation à l'intéressement qu'elles pourront désormais transformer en actions collectives. On est très fiers de cela. » Enfin, Caudalie a choisi de confier son image à Léna Situations, l'influenceuse aux cinq millions d'abonnées sur Instagram. La campagne commence aujourd'hui même, 15 mai.
Tout irait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes si, en 2022, le fisc français n'était pas venu mettre son nez dans les comptes de Caudalie. Bercy soupçonne sa filiale au Royaume-Uni ainsi que d'autres au Luxembourg, à Jersey et à Gibraltar, considérés comme des paradis fiscaux, d'évasion fiscale. L'affaire a donné lieu fin 2022 à une spectaculaire perquisition au siège parisien du groupe. « C'est en cours, on discute », réagit, laconique, Mathilde Thomas.
Hasard du calendrier, Caudalie annonce au même moment la fermeture de trois de ses quatre boutiques de Londres, « pour se recentrer sur le digital au Royaume-Uni, justifie-t-elle, et conforter notre croissance là-bas. »
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