Le vignoble bordelais lance son plan d'arrachage face à une crise profonde de surproduction

Le ministre de l'Agriculture Marc Fesneau et les représentants des vins de Bordeaux ont signé, ce lundi 5 juin, le déblocage d'une aide à l'arrachage d'une partie du vignoble, en proie à une grave crise de surproduction, à l'issue d'une réunion avec des viticulteurs en « détresse ». La Confédération paysanne dénonce « un voyage en absurdie ».
Le plan doit aboutir à l'arrachage d'environ 9.500 hectares de vignes sur un total de 110.000, soit un peu moins de 10 %.
Le plan doit aboutir à l'arrachage d'environ 9.500 hectares de vignes sur un total de 110.000, soit un peu moins de 10 %. (Crédits : Thibaud Moritz / Agence APPA)

Cette enveloppe de 57 millions d'euros, cofinancée par l'État et le Comité interprofessionnel du vin de Bordeaux (CIVB), doit permettre l'arrachage « sanitaire » d'environ 9.500 hectares de vignes, avec une prime de 6.000 euros par hectare, afin de lutter à titre préventif contre la flavescence dorée, une maladie qui menace les vignes laissées à l'abandon. L'Etat a mobilisé 38 millions d'euros, et le CIVB débloqué 19 millions, dont 14 millions tirés d'un emprunt, pour financer ce plan qui permet indirectement de réduire les volumes de production. Le Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine ajoute dix millions d'euros pour aider « au moins 300 viticulteurs » à diversifier leur productions, notamment vers la culture de l'olivier.

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Ce plan, « même s'il est insuffisant à plusieurs égards », doit être « mis en place le plus vite possible » car « les derniers chiffres sur la consommation en France montrent que les choses s'aggravent », a alerté le vice-président du CIVB, Bernard Farges, lors d'une réunion à Salleboeuf (Gironde) avec le ministre et une trentaine de représentants de viticulteurs témoignant « de cris de détresse » localement.

Dans le premier vignoble AOC de France, avec 110.000 hectares de vignes cultivés, les appellations les moins prestigieuses souffrent d'un effondrement des prix et d'une surproduction évaluée à un million d'hectolitres. En janvier, plus d'un vigneron girondin sur trois se déclarait en difficulté auprès de la Chambre d'agriculture.

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Pour Didier Cousiney, du collectif Viti 33 qui réclame l'arrachage d'au moins 15.000 hectares, avec une prime de 10.000 euros par hectare, « on n'est pas en crise, on est en guerre. Il faut prendre des décisions urgentes car dans quelques temps le paysage girondin va être défiguré, dénaturé ».

Ces aides ne représentent pas « un solde de tout compte », a répondu Marc Fesneau, ouvrant la voie à des prêts bonifiés pour « être offensif collectivement » à l'export. Il a également promis « au niveau européen » un prochain dispositif de distillation des excédents, afin de réduire les volumes « pour faire face à cette crise qui est une crise de consommation ». Une dizaine de militants antipesticides, munis de casseroles, ont attendu sans succès le ministre à sa sortie de la réunion.

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De son côté, la Confédération paysanne de Gironde n'est pas plus enthousiaste que le collectif Viti 33 et tire, elle-aussi, à boulets rouges sur ce plan : « Non seulement la surface globale à arracher n'est pas suffisante, mais, de plus, les modalités totalement absurdes ont tout pour décourager les candidatures. Les deux tiers des crédits sont destinés à de la "renaturation" : soit un boisement sur 30 ans, soit une jachère sur 20 ans non pâturable, sans récolte de foin possible ! »

Son porte-parole, Dominique Techer, dénonce « un train de mesures qui va aggraver la ruine des domaines, un désastre social et la chute des prix d'achat qu'elle n'ose même plus publier tellement ils sont indécents ». Une allusion à la décision prise en novembre dernier par le CIVB de ne plus publier la cotation des vins en vrac alors que les vins de Bordeaux connaissaient une forte baisse de leurs prix.

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Commentaire 1
à écrit le 05/06/2023 à 20:18
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"Les deux tiers des crédits sont destinés à de la "renaturation" : soit un boisement sur 30 ans, soit une jachère sur 20 ans non pâturable, sans récolte de foin possible !" C'est surprenamment radical, maintenant je ne vois pas l'intérêt d'arracher à...

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