Vins de Bordeaux (CIVB) : le vignoble se prépare à un choc commercial sans précédent

Malgré la crise que traverse le vignoble bordelais, 2019 ne sera pas une année totalement noire. Si elles ont fléchi au 4e trimestre, les ventes de bordeaux ne se sont pas effondrées comme vient de le montrer le bilan 2019 du CIVB (Conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux). Il n'en reste pas moins que les prémices d'une crise chinoise historique se sont manifestées, sans parler de l'impact des sanctions américaines et des risques liés au Brexit.
Des vignes dans le Bordelais
Des vignes dans le Bordelais (Crédits : PC / La Tribune)

Le Conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux (CIVB), présidé par Bernard Farges, a présenté le bilan 2019 de l'activité du vignoble bordelais ce mardi 10 février à Paris. Dans son allocution le président a tout d'abord souligné que le millésime 2019, dont 4,9 millions d'hectolitres ont été récoltés, s'annonce comme une réussite.

"En termes qualitatifs, tous les signes sont au vert pour la naissance d'un beau millésime : de la fraîcheur pour les vins blancs et rosés, de la souplesse et de l'équilibre pour les vins rouges", a indiqué Bernard Farges.

Depuis le 2e semestre 2019, le vignoble bordelais est, comme beaucoup d'autres en France, pris dans la tourmente de la guerre économique mondiale déclenchée par les Etats-Unis, aussi bien contre la Chine continentale que l'Union européenne, sans compter le contre-coup économique de la quasi insurrection qui a secoué Hongkong jusqu'à la fin de l'année et l'apparition, tout d'abord cachée puis minorée par le régime communiste chinois, du coronavirus dans la province du Hubeï.

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Un CA de 3,9 milliards d'euros en recul de 4 %

Sans être dominant en volume pour le vignoble bordelais, l'export pèse très lourd. Sur les 4,1 millions d'hectolitres de vins vendus en 2019, l'export a ainsi généré 44 % des transactions en volume contre 56 % pour la France. Ce qui n'empêche pas l'export de dominer les débats en valeur, puisque les ventes à l'étranger ont généré en 2019 la bagatelle de 56 % du chiffre d'affaires des bordeaux, qui a atteint 3,9 Md€. Soit un recul limité à -4 % par rapport à 2018. Bernard Farges a souligné la progression du vignoble bordelais dans la transition écologique et son engagement dans la lutte contre l'usage des pesticides. Deux sujets devenus ultra sensibles chez les consommateurs, qui ont valu au vignoble bordelais des attaques quant à l'usage des pesticides.

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"Le chemin parcouru ces dernières années par notre vignoble sur la transition écologique a été extraordinairement rapide. Mais cet engagement doit maintenant dépasser le strict cadre environnemental. Notre objectif est désormais d'embarquer toutes les entreprises de la filière vers le RSE, la responsabilité sociétale des entreprises. Avec l'ambition, initiée depuis plusieurs années maintenant, de faire du Bordelais, un vignoble engagé et durable", a annoncé le président du CIVB.

Bordeaux champion en haute valeur environnementale

A titre d'illustration Bernard Farges a souligné que le vignoble bordelais, avec près de 1.000 entreprises certifiées, "est de loin le premier vignoble HVE (haute valeur environnementale -NDLR) de France". Une certification qui renvoie à la complexité du système normatif. Alors que la certification nationale HVE porte sur l'accession à des seuils en matière d'excellence environnementale (biodiversité, stratégie phytosanitaire, fertilisation, irrigation), le bio est un signe officiel de qualité régi par un cahier des charges européen, qui porte sur la totalité des étapes de la production.

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Ce qui fait que les deux certifications sont complémentaires. Des vignobles bios peuvent ainsi être certifiés HVE, ce qui est le cas dans le Bordelais. Insistant sur l'importance du développement de la RSE dans le vignoble, Bernard Farges a souligné qu'un comité de pilotage "d'une trentaine d'entreprises bordelaises" se réunit régulièrement à ce sujet. Il est ensuite revenu sur la question du traitement des vignes.

Pourquoi une hausse d'usage des pesticides en 2018 ?

"Vous avez tous vu en ce début d'année des chiffres, présentés comme alarmants, sur la hausse des tonnages de pesticides en France entre 2017 et 2018. Des chiffres contraires aux ambitions affichées par le gouvernement dans le cadre du plan Ecophyto", a recadré le président du CIVB.

Avant d'entrer dans le détail de cette évolution, qui n'a pas le profil d'un emballement productiviste à l'ancienne.

"D'abord il est nécessaire de regarder les ventes de pesticides sur plusieurs années, et non sur une période aussi courte. En effet, le tonnage 2018 est à mettre au regard des conditions particulières de cette année-là, où les vignes ont subi une pression exceptionnelle du mildiou ; à noter ensuite une anticipation des achats en prévision de l'augmentation de la redevance pour pollution diffuse (RPD), taxe qui a renchéri les prix au 1e janvier 2019.... enfin, dernier point à souligner : la progression constante de l'utilisation de produits autorisés en agriculture biologique, dont le soufre et le cuivre. Or, à chaque fois qu'un viticulteur remplace un produit de synthèse par un produit bio ou de biocontrôle, les quantités de produits utilisés augmentent, car leurs doses d'utilisation sont tout simplement plus élevées", a décortiqué Bernard Farges.

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Le spectre d'une crise sans précédent en Chine

Revenant sur la question du marché, il a rappelé que les ventes de bordeaux en France ont reculé de 20 % au cours des cinq dernières années. Un effet, parmi d'autres, de la modération dans la consommation d'alcool mais aussi du changement de goût des consommateurs, qui ont tendance à boire moins de vins rouges. D'où le nouveau plan de reconquête du marché français lancé depuis quelques semaines par le CIVB sur lequel nous reviendrons dans notre dossier d'avril consacré au vignoble bordelais. Le marché chinois global, c'est-à-dire la Chine continentale plus les régions administratives spéciales de Hongkong et Macao, a confirmé en 2019 sa position de premier marché export pour les bordeaux, avec 573 M€ de ventes.

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Ce marché chinois pèse très lourd et précède deux autres marchés importants à l'export, que sont les Etats-Unis et le Royaume-Uni. Le premier applique depuis plusieurs mois une surtaxe douanière de 25 % aux vins français, en rétorsions aux aides publiques apportées au constructeur aéronautique européen Airbus. Les représentants de la filière vin ont demandé à l'Etat de compenser cette perte, à hauteur de 300 M€, mais sans résultat jusqu'ici. De son côté, Londres n'a pas encore lâché Bordeaux et le Brexit n'a été en 2019 qu'une menace sans conséquence. Une situation qui pourrait changer d'ici la fin de l'année

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Commentaire 1
à écrit le 13/03/2020 à 14:57
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comme dit le film.."le plus dur c'est pas la chute.. " cela fait des années que le vignoble bordelais dit vivre une crise .. je trouve que ce vignoble ne s'adapte pas assez au monde dans lequel il vit et ne fait pas sa transformation digitale alors...

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