A Lacanau, les touristes et le surf sont rois. Mais l'océan que tous chérissent menace l'urbanisme côtier qui défie de trop près les flots de la cité balnéaire. Face à l'océan Atlantique, la ville de moins de 5.000 habitants prépare pourtant la haute saison dans l'insouciance : les commerces retapent leurs devantures et les services de voirie rénovent l'espace public au centre du village océan. La houle rogne pourtant chaque année un peu plus le front de mer. En retrait, dans le cinéma municipal, les élus, eux, prennent le sujet de l'érosion très au sérieux.
« L'érosion est quelque chose d'inéluctable. Il ne s'agit pas de dire qu'on plie les gaules de tout ce qui est à moins d'un kilomètre de la côte, mais de voir ce que l'on choisit de défendre », cadre Alain Rousset, le président de la Région Nouvelle-Aquitaine. L'adaptation au phénomène d'érosion, amplifié par le dérèglement climatique, tel un impératif.
Un an après le lancement du Comité national du trait de côte (CNTC), présidé par la députée girondine Sophie Panonacle (Renaissance), les discussions sont engagées entre l'État et les collectivités afin de trouver des mécanismes de stratégie et de financement pour déployer les projets de lutte contre l'érosion ou de repli des activités. Ce 27 mars à Lacanau, le maire de la commune avec les élus du conseil régional et des collectivités du Pays basque et de Charente-Maritime échangent avec le préfet de Nouvelle-Aquitaine.
« Le financement n'est pas à la hauteur »
Au micro, uniquement des hommes de plus de 60 ans, qui se satisfont logiquement des actions entreprises jusqu'ici dans la région, notamment à la suite des tempêtes dévastatrices de 2010 et 2014. Grâce à l'action du GIP Littoral, un organe qui rassemble l'État et les élus locaux et coordonne une douzaine de stratégies de la bande côtière, la Nouvelle-Aquitaine est en avance sur la prise en compte du risque. La Cour régionale des comptes le souligne elle-même dans un rapport paru en 2023. Malgré tout, les défis à venir sont inédits. « Les territoires vont se heurter à deux difficultés, liste Henri Sabarot, conseiller régional et président du GIP Littoral. La volumétrie financière et la mobilisation des compétences techniques. »
Un message adressé à l'État qui va tenir le 4 avril une réunion du CNTC en collaboration avec les collectivités pour déterminer comment financer les futures grandes opérations stratégiques. « Il nous faudra convaincre Paris, car le financement n'est pas à la hauteur du risque ! », alerte Alain Rousset. Quand le maire de Lacanau, Laurent Peyrondet, ajoute : « Ce qu'on attend, ce sont des financements pour le futur. »
Taxer la location touristique ou l'immobilier ?
Entre le bail réel d'adaptation à l'érosion côtière ou l'expropriation, la loi Climat et résilience a donné de la marge aux élus. Mais ceux-ci veulent aller plus loin. Une délégation a déjà proposé des pistes au ministère avec notamment la mise à contribution des plateformes de location touristique, telles qu'Airbnb ou Abritel, pour financer les projets d'adaptation. « Ces plateformes réalisent leur profits en majorité sur le littoral. Ce serait logique qu'elles participent », évoque ainsi Laurent Peyrondet. Les finances publiques sont également sollicitées, même si le vent qui souffle en faveur de la restriction budgétaire n'est pas favorable. La députée Sophie Panonacle porte l'idée d'un fonds érosion abondé par les droits de mutation sur les transactions immobilières, ce qui n'a pas convaincu la Cour des comptes dans son dernier rapport sur l'adaptation au changement climatique.
Il faudra dans tous les cas financer l'adaptation, sans quoi l'inaction coutera beaucoup plus cher que la lutte active. Sur le littoral néo-aquitain, ce sont ainsi 6.000 logements, 700 entreprises, 120 structures publiques et 100 infrastructures routières qui sont directement menacés à horizon 2050. En attendant d'envisager leur rapatriement, il faudra choisir lesquels protéger en priorité.
Sujets les + commentés