GT Solutions doit arbitrer une transition énergétique devenue très complexe

Protégé des chocs les plus menaçants par la grosse demi-douzaine de secteurs pour lesquels il travaille, GT Solutions veut continuer à se diversifier dans la logistique et le fret. Mais le groupe girondin de transport est engagé dans une transition énergétique rendue très compliquée par les puissantes turbulences qui déstabilisent les marchés de l'énergie.
Un des camions de la générale de traction (GT), qui a donné son nom générique au groupe .
Un des camions de la générale de traction (GT), qui a donné son nom générique au groupe . (Crédits : Groupe GT)

Après une première vie dans un cabinet d'audit international, Matthieu Sarrat a succédé en 2019 à son père (Michel Sarrat) à la tête du groupe GT Solutions, à Bassens (Bordeaux Métropole), quelques semaines après que ce dernier a cessé de s'appeler GT Location. Ce groupe familial, qui emploie 2.000 salariés pour un chiffre d'affaires de près de 220 millions d'euros l'an dernier, s'appuie sur une activité encore principalement articulée sur le transport, avec un parc de "1.300 moteurs", constitué pour l'essentiel de camions, et compte 1.700 chauffeurs dans son effectif.

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Avec son nouveau nom, GT Solutions a commencé à se diversifier dans la logistique et le fret en 2018, avec le rachat des sociétés Fret industrie et DDS, afin d'offrir un meilleur service à ses clients. Ce qui a entrainé la création de deux branches : GT Solutions, qui poursuit l'activité encore dominante de location de véhicules avec chauffeur, et GT Solutions Réseaux, axée sur l'affrètement. Des changements réalisés juste avant que la crise du Covid-19 ne vienne clouer un grand nombre de camions dans leurs garages.

Le retour à une forme de normalité en 2022

Un vrai problème pour le groupe, qui intervient dans toute la France dans plus d'une demi-douzaine d'activités, qu'il s'agisse du BTP, de béton prêt à l'emploi (toupies), en passant par la santé, la distribution alimentaire, l'automobile ou encore les produits industriels sensibles...

"Le 17 mars 2020 jour de l'annonce de la mise en confinement de la population ça été un choc, nous avons perdu 20 % de notre chiffre d'affaires du jour au lendemain", témoigne Matthieu Sarrat.

Avec à la clé des retombées liées à la crise sanitaire qui se sont poursuivies l'année suivante.

"En 2021 nous avons beaucoup souffert à cause de la fermeture des restaurants et de la crise aviaire, puisque nous assurons le transport d'animaux vivants, en particulier de volailles, dans les Landes avec les canards mais aussi en Pays-de-la-Loire et Bretagne. Un secteur dans lequel nous avons perdu de l'argent mais qui a bénéficié d'aides publiques, ce qui nous a permis d'équilibrer mais difficilement. En 2022 nous sommes revenus à une forme de normalité, avec un taux de croissance de +10 % au premier semestre, grâce à une dynamique commerciale forte", décortique pour La Tribune Matthieu Sarrat.

La distribution de pneus est en baisse

Comme le souligne le patron de GT Solutions, le premier marché du groupe est celui de la distribution de pneus, qui s'appuie sur un réseau de plateformes ciblées sur les chargeurs. "Ce marché a connu une bonne croissance, avec des hausses significatives. Mais, depuis juin, ce marché est en net retrait", éclaire Matthieu Sarrat. Notamment à cause de la crise qui touche les pneus des engins agricoles, alimentée par la hausse des prix des intrants et le recul des récoltes.

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Les matériaux de construction constituent le deuxième marché de l'entreprise de Bassens et bénéficient du forte dynamisme de la distribution des matériaux de construction. En cas de crise, Matthieu Sarrat estime que tous les segments de marché de ce secteur ne s'effondreront pas en même temps. Troisième secteur de référence de GT Solutions, l'agroalimentaire bénéficie notamment de la reprise du tourisme dans les grandes métropoles et de la reprise d'activité des grossistes alimentaires.

La plateforme logistique de Garonor bientôt opérationnelle

Quatrième marché de GT Solutions, la distribution de produits industriels n'est pas étranglée par l'impact de la hausse des prix de l'électricité. Le transport d'animaux vivants, cinquième secteur de référence pour le groupe, est quant à lui sous la pression de crises aviaires à répétition. "Cette année un pallier à la hausse dans la catastrophe a été franchi, puisque les couvoirs ont été touchés et il a fallu gaver des canes car il n'y avait plus assez de canards", relate Matthieu Sarrat, dont le groupe a ouvert une deuxième station de lavage dans le cadre des mesures sanitaires.

Le dirigeant confirme par ailleurs que même si son groupe a créé depuis des années une école de conducteurs, les problèmes de recrutement restent difficiles à résoudre malgré les efforts consentis pour attirer de nouveaux talents. La diversification dans la logistique et le fret continue à se développer et Matthieu Sarrat a confirmé la construction de la nouvelle plateforme logistique de 7.000 m2 pour le groupe à Garonor, à Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), près de Paris où GT Solutions Réseaux sera locataire d'un intermédiaire spécialisé : Logicor. Installation qui rejoint ainsi un ensemble d'une douzaine d'autres plateformes sur lesquelles s'appuie le groupe girondin en France.

Pionnier de la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre

Si le premier poste de dépense du groupe est constitué par les salaires des chauffeurs, les carburants occupent le second rang, et le groupe se trouve aujourd'hui au milieu du gué d'une transition énergétique devenue compliquée. GT Solutions est l'une des six premières entreprises françaises à avoir signé en 2007, puis en 2012, une charte d'engagement volontaire de réduction des émissions de dioxyde de carbone avec l'Ademe.

Un engagement pionnier dont l'intérêt saute désormais aux yeux. Alors que ses véhicules interviennent dans une foultitude de zones urbaines, il n'était pas possible pour GT Solutions de se retrouver bloqué à cause de l'une de ces zones à faibles émissions (ZFE), qui commencent à exclure les véhicules énergétiquement non conformes des centres-villes. Ce qui n'empêche pas les marchés de l'énergie d'être cisaillés par les effets délétères de la guerre en Ukraine.

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Une transition énergétique compliquée par les marchés

"Le prix du gazole fait l'objet d'une indexation. Il est bien régulé. Quand il y a une hausse des prix cette dernière est répercutée sur les clients. Ce qui ne nous empêche pas de faire attention aux répercussions de ces hausses sur le marché", prévient Matthieu Sarrat pour cadrer les enjeux, qui précise qu'il n'en va pas de même avec le gaz.

Très impliqué dans la transition énergétique, avec une panoplie qui comprend désormais non seulement des camions roulant au diesel, mais aussi au gaz (gaz naturel comprimé/GNC, gaz naturel véhicule/GNV ou biométhane), ou encore à l'électricité, le patron du groupe girondin doit arbitrer une transition énergétique devenue très complexe.

"Alors que le prix du gazole a augmenté de 50 %, celui du gaz a triplé, grimpant jusqu'à fois quatre et même fois cinq ! Nous avons choisi le gaz parce qu'il émet 90 % de gaz à effet de serre en moins que le gazole et aucune particule fine. Mais aujourd'hui un camion qui roule au gaz coûte 1.000 euros de plus par mois qu'un véhicule diesel. Ce qui fait que le gaz n'est plus un carburant pertinent sur le plan économique par rapport au diesel...

Nous avons diversifié 12 % de notre flotte de camions dans l'électrique, mais c'est encore naissant. Nous venons d'acter l'achat de deux camions électriques (des modèles Renault DZE avec 400 km d'autonomie -Ndr), tandis que l'acquisition de cinq autres est en discussion. Pour l'hydrogène c'est moins abouti au plan technologique. Et nous nous sommes engagés dans le projet "Corridor H2 Occitanie" qui vise à remplacer les carburants fossiles, notamment des camions" par de l'hydrogène vert, déroule point par point Matthieu Sarrat.

Beaucoup d'incertitudes subsistent quant à l'évolution géopolitique des prochains mois. Si le pire n'est jamais sûr, les probabilités de nouveaux chocs sur la croissance sont supérieures à zéro.

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