
Faut-il un transport par câble pour franchir la Garonne à Bordeaux... ou par rails ? Après avoir écarté la seconde possibilité à travers le dossier de concertation de la télécabine, l'idée d'un tramway passant par le pont Chaban-Delmas a été remise à l'ordre du jour, notamment à la demande du groupe de droite Métropole Commune(s) et d'élus écologistes. La Métropole a reçu ce 29 juin les résultats de l'étude sur l'opportunité d'un tramway entre la rive droite et la rive gauche réalisée par les équipes du groupe d'ingénierie Systra. Elle conclut à la faisabilité de deux tracés entre Cenon Gare, rive droite, et la Cité du Vin, rive gauche. La Tribune a pu consulter le document et en dévoile les enseignements.
Six tracés ont été évalués pour relier à la fois les deux rives et les deux lignes de tramway A et B déjà existantes via le pont Chaban-Delmas. Seules deux sont réalisables techniquement indique l'étude : le premier est un prolongement de la ligne B à partir de Cité du Vin ayant pour terminus Cenon Gare (2400 mètres), et l'autre un prolongement de la ligne A à partir de Galin et desservant la Cité du Vin (1800 mètres). Sur le pont Chaban-Delmas, cela entraînerait la suppression d'une voie de circulation pour les véhicules particuliers.
Les deux tracés retenus pour un tramway au-dessus de la Garonne. (crédits : Systra)
Le tramway moins cher que la télécabine
Avec une estimation de 66,7 millions d'euros, la première option représente le coût total le plus élevé puisqu'elle est la plus longue. Mais son prix au kilomètre est moins élevé que l'autre tracé, chiffré lui à un coût total de 53,5 millions d'euros. Dans les deux cas, le montant reste inférieur à celui de la télécabine, puisque ce dernier est évalué entre 50 et 80 millions d'euros mais pourrait s'envoler à plus de 100 millions d'euros en fonction de la technologie retenue. Logique aussi, puisque l'extension terrestre, contrairement au câble, ne créé pas une desserte directe pour les coteaux de la rive droite. Les deux projets visent en tout cas à anticiper les fragilités du pont de pierre, qui a fêté ses 200 ans en 2022 et pourrait un jour ne plus pouvoir supporter les passages des trams.
En revanche, quand la télécabine peut impliquer des retombées économiques et sociales largement positives, entre 116 et 270 millions d'euros, le tramway lui est dans le rouge : selon l'étude, son coût d'aménagement ne sera pas du tout compensé par les bénéfices socio-urbains qu'il engendrera.
Des projets en apparence complémentaires
Au-delà de la faisabilité technique, qui n'est pas une surprise puisque le passage d'un tramway avait été pensé au moment de la construction du pont Chaban-Delmas, le document indique : « les études de fréquentation ont montré que les projets de câble et tramway n'étaient pas en concurrence ». En effet, le nombre potentiel d'usagers quotidiens sur l'extension terrestre oscille entre 9.000 et 11.000 passagers selon les scénarios envisagés, avec ou sans transport par câble existant.
Une observation partagée par Gérard Chausset, président de la commission transport de Bordeaux Métropole et conseiller métropolitain écologiste. « C'est un sujet indépendant du câble, les deux projets ne sont pas concurrents, si ce n'est sur le plan budgétaire. Je retiens deux points : cette liaison permettrait de sécuriser le réseau en doublant la traversée de la Garonne par rapport au pont de pierre, c'est un argument essentiel à moyen et long terme. Ensuite, cela permet de mailler le réseau et notamment de proposer une liaison pour relier Cenon au campus de Talence. » À plus long terme, cela pourrait aussi permettre une jonction avec la ligne C à Bordeaux Lac.
De leur côté, les élus de droite et du centre saluent les conclusions de cette étude et plaident pour retenir la solution tramway - jugée plus robuste, mieux connue et interopérable - et renoncer au transport par câble. Initialement prévu pour juin, l'examen du projet de télécabine a finalement été repoussé au conseil métropolitain de la rentrée, en septembre ou octobre. Les élus pourront définir en toute connaissance quelle est l'infrastructure prioritaire, et peut-être même en écarter une.
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