Transport : GT Solutions face à un fort recul de la consommation des ménages

GT Solutions, qui gère 1.400 camions pour des entreprises de plus d'une demi-douzaine de secteurs d'activité, subit les effets de la baisse très nette de la consommation des ménages enclenchée depuis janvier. Avec en tête de gondole un recul marqué de la vente de pneus. Au cœur de la transition écologique, sur un marché de la logistique où le train est devenu ultra marginal, GT Solutions a commencé à mettre en test ses premiers camions électriques.
Michelin représente 30 % de l'activité de GT Solutions.
Michelin représente 30 % de l'activité de GT Solutions. (Crédits : Alessandro Bianchi)

« 2022 ne semblait pas forcément très dynamique quand on y était... Aujourd'hui que nous sommes en 2023 c'est différent. On se dit que 2022 ce n'était pas si mal... », résume en substance Matthieu Sarrat, dirigeant du groupe GT Solutions à Bassens (Bordeaux Métropole).

Avant de changer de nom, le groupe s'appelait GT Location et n'a pas abandonné son premier métier de la location de véhicules avec chauffeurs, qui représente désormais 55 % du chiffre d'affaires du groupe. Ce dernier a atteint 230 millions d'euros en 2022. Les 45 % restant ont été générés par les activités de diversification dans la messagerie et l'affrètement qui ont été lancées ces dernières années.

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Une baisse de la consommation qui touche tous les secteurs

Le métier historique du groupe consiste à proposer aux grandes entreprises, souvent industrielles, d'externaliser leurs fonctions transport en reprenant à son compte la gestion des camions et des chauffeurs. C'est ainsi que GT Solutions, qui emploie 2.150 salariés pour une flotte de 1.400 camions, est présents dans toute la France par l'intermédiaire d'une dizaine de plateformes logistiques, qui lui permettent d'irriguer le terrain en profondeur.

L'entreprise intervient dans sept secteurs d'activité (alimentaire, industrie, santé, pneumatique, agroalimentaire, grands travaux, distribution de matériaux) qui sont tous en prise directe sur la consommation des ménages. Mais la sécurité apportée par cette diversité des débouchés ne suffit plus à rééquilibrer l'impact d'une consommation en fort recul.

« Depuis janvier dernier le discours des clients est plus négatif que prévu. Pour prendre un exemple nous travaillons avec Michelin, qui est notre premier client, et le pneu représente 30 % de notre activité globale. Eh bien en 2023 le niveau des ventes de pneus est inférieur à ce qu'il était en 2019 », résume Matthieu Sarrat.

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GT Solutions enregistre des baisses significatives d'activité dans trois secteurs importants : le pneumatique (-12 %), le transport de volailles (-5 %) et la construction (-4 %). Une mauvaise passe qui devrait selon Matthieu Sarrat durer jusqu'en 2024 mais qui n'impressionne pas le patron de ce groupe familial dont il incarne la troisième génération.

« Sur le temps long l'évolution de ces secteurs n'est pas forcément négative. Les gens vont continuer à rouler et il faudra bien qu'ils rachètent des pneus. Et puis beaucoup de nos clients s'adaptent et changent de cibles. Saint-Gobain, qui est notre deuxième plus gros client, s'est ainsi réorienté sur le marché de la rénovation ce qui lui a permis de stopper son recul d'activité », illustre le PDG de GT Solutions.

GT Solutions a les moyens de voir venir

Si le climat économique a des couleurs récessives, Matthieu Sarrat se refuse à donner dans la morosité

« En 2022, le chiffre d'affaires à progressé de +10 % et il devrait encore progresser en 2023 malgré le contexte. Nous avons eu une rentabilité correcte en 2022. Celle de 2023 n'est pas encore connue mais elle risque d'être en retrait », commente le dirigeant.

Ce dernier souligne que GT Solutions dispose de beaucoup d'actifs et de capitaux propres, et que son endettement est faible.

« Nous n'avons jamais eu besoin d'aucun PGE [prêt garanti par l'Etat] pendant le Covid » relève-t-il, alors que le groupe a connu des difficultés avec les confinements.

Pour une entreprise qui possède 1.400 camions la transition énergétique est un vrai sujet. Matthieu Sarrat insiste sur le fait que son groupe est un acteur « du dernier kilomètre ».

Les transports routiers au cœur de la transition écologique

Avec l'effondrement du fret ferroviaire, qui a débuté au cours des années 1980, le transport routier a explosé et domine aujourd'hui le marché logistique de la tête et des épaules, tant en termes de volumes transportés que de coût de revient. Marginalisé dans des proportions historiques sur ce marché, le train a beaucoup perdu en crédibilité dans la logistique. Et la SNCF, qui a elle aussi massivement investi dans les camions, a peu de chance de pouvoir faire du train un levier de la décarbonation du transport de marchandises à court et moyen terme.

Cette tâche de réaliser la transition écologique dans les transports de marchandises va incomber en quasi-totalité aux entreprises privées. Une responsabilité dont les dirigeants de GT Solutions ont pris conscience depuis une quinzaine d'années et qui pèse lourd dans leur stratégie. Mais sur laquelle Matthieu Sarrat ne veut pas s'étendre. Préférant mettre en avant des exemples concrets pour montrer comment son groupe s'engage dans la transition écologique.

Dix camions électriques en test et bientôt 37 de plus

« Le prix du gazole est reparti à la hausse après avoir connu une accalmie début 2023. Le prix du gaz naturel a baissé après être fortement monté l'an dernier. Nous n'avons plus l'impression de creuser notre tombe à chaque kilomètre parcouru par un de nos camions avec ce carburant. Nous avons mis en test le B100, un biocarburant qui se diffuse beaucoup chez les transporteurs. Son surcoût par rapport au gazole est faible et le B100 a un bilan carbone très positif. Encore faut-il faire attention puisque ce biocarburant est fabriqué à partir de végétaux, qui pourraient finir par manquer à la production agricole. Nous avons également commencé à mettre des camions électriques à l'étude. Nous en possédons aujourd'hui une dizaine » éclaire le PDG.

Matthieu Sarrat précise que ces camions électriques sont trois fois plus cher à l'achat que des camions diesel, soit de l'ordre de 300.000 euros contre 100.000 euros. D'où la nécessité de tester ces nouveaux véhicules en grandeur réelle avant de passer à de plus grandes ambitions. L'Etat semble bien conscient du rôle que doivent jouer les entreprises de transport routier dans la décarbonation des mobilités, et l'Ademe a débloqué un budget de 50 millions d'euros pour alléger la facture d'acquisition de ces camions.

« Cela va nous permettre d'en acheter 37. Il faut voir le temps de rechargement mais aussi et surtout la durée de vie. Un camion diesel dure huit ans en moyenne. Si les six ou sept batteries qui équipent les des camions électriques lâchent au bout de quatre ans ça ne sera plus du tout pareil. Dans ce cas nous devrons réétudier notre stratégie » tranche le PDG.

Les transports ont encore représenté 32 % des émissions de gaz à effet de serre de la France en 2022, selon le Haut conseil pour le climat. C'est le secteur le plus polluant devant l'agriculture (19 %) et l'industrie (18 %).

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