En pleine transition énergétique, Terreal devrait passer sous pavillon autrichien

Le groupe Terreal, l'un des poids lourds français de la production de briques et tuiles en terre cuite, s'apprête a passer sous le contrôle du numéro un mondial du marché, le groupe autrichien Wienerberger. Le contexte énergétique très défavorable que connait l'Europe semble avoir convaincu les dirigeants de Terreal de se rapprocher du leader autrichien.
Crèche de Frémicourt réalisée en briques par Terreal.
Crèche de Frémicourt réalisée en briques par Terreal. (Crédits : Sergio Grazia)

Le groupe autrichien Wienerberger, fondé en 1819 à Vienne, et coté en bourse, vient de faire connaitre, ce mardi 20 décembre, son intention d'acquérir la totalité des activités de Terreal, grand producteur français de tuiles en terre cuite. Cela concerne ses activités en Allemagne, en Espagne, aux Etats-Unis, en France et en Italie. Cette opération de Wienerberger, qui doit être bouclée courant 2023, ne concernera pas les implantations de Terreal en Autriche, Pologne et Hongrie, qui resteront aux mains des actionnaires actuels. Leader du marché de la brique de parement en Italie, Terreal est surtout un poids lourd de la tuile en terre cuite, une spécialité où il est numéro un en Allemagne et aux Etats-Unis, et numéro deux en France.

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Terreal est par ailleurs leader dans l'Hexagone sur les marchés des composants métalliques en toiture et du solaire pour les maisons individuelles. L'entreprise, dont Laurent Musy est le PDG, déploie son activité sur quatre secteurs : couverture, solaire, structure et façade-décoration. Elle a réalisé un chiffre d'affaires de 626 millions d'euros en 2021, avec 3.300 salariés, et devrait atteindre 740 millions d'euros au titre de son exercice 2022.

De son côté, Wienerberger, qui se définit comme l'un des plus grands fournisseurs mondiaux de solutions intelligentes pour l'enveloppe du bâtiment et les infrastructures, revendique notamment le titre de premier briquetier mondial et de leader du marché des tuiles en terre cuite en Europe. Le groupe autrichien joue en effet à une autre échelle que Terreal puisqu'il a réalisé en 2021 un chiffre d'affaires de 4 milliards d'euros avec 16.619 salariés, répartis dans 204 usines présentes dans 29 pays.

Un site de 300.000 m2 en Charente, à Roumazières-Loubert

Si le siège de Terreal se trouve à Suresnes, aux portes de Paris, et que le groupe est également implanté en Bourgogne ou en Occitanie, il doit beaucoup à la Nouvelle-Aquitaine où se trouvent une grande partie de ses racines. C'est dans cette région que le groupe Terreal dispose de son plus grand site industriel, à Roumazières-Loubert (Charente), qui est sans doute l'un des plus importants de sa catégorie en Europe, avec un périmètre de 300.000 m2, dont 100.000 m2 de planchers ! Le site de Roumazières-Loubert emploie plus de 400 salariés, produit annuellement 430.000 tonnes de tuiles et autres produits en terre cuite, et fait extraire annuellement plus de 500.000 tonnes d'argile d'une carrière distante d'une dizaine de kilomètres.

La pression des prix de l'énergie et de la décarbonation

En 2020, Terreal a lancé un énorme programme d'économie d'énergie représentant un investissement de 6,5 millions d'euros baptisé Titan. Aidé par la Région Nouvelle-Aquitaine, il doit se déployer de 2021 à 2025, avec comme objectifs la réduction de la consommation des fours du groupe, l'optimisation du fonctionnement des séchoirs, la récupération et la valorisation de la chaleur fatale. De grandes manœuvres qui s'inscrivent dans la transition énergétique de Terreal. Mouvement qui semble avoir été frappé de plein fouet par le déclenchement de la crise énergétique.

« A l'heure où des défis sans précédent liés aux prix élevés de l'énergie et des besoins toujours plus urgents de décarbonation de notre industrie et du bâtiment nous assaillent, unir nos forces avec Wienerberger nous permettrait d'accélérer notre feuille de route actuelle grâce au partage des meilleures pratiques, aux investissements, à l'innovation et à la digitalisation », déroule Laurent Musy dans le communiqué présentant l'opération.

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Un rapprochement qui a du sens

Avant de souligner l'importance de la complémentarité entre les deux groupes.

« Wienerberger est une entreprise européenne très réputée qui possède une grande expertise dans le secteur des tuiles et des briques en terre cuite dans le monde entier. Elle bénéficierait clairement de la complémentarité de notre empreinte industrielle et de l'ajout des marques, des actifs et des capacités de Terreal/Creaton, notamment en France et en Allemagne, dans le domaine des toits en pente et du solaire.

Wienerberger a un projet industriel et commercial ambitieux qui assurera la croissance durable de nos activités. Nos collègues autrichiens, polonais et hongrois, qui connaissent un grand succès, resteraient sous le contrôle de nos actionnaires actuels. Nous continuerons à les soutenir dans la phase de transition », éclaire le PDG de Terreal.

Neutralité climatique : un horizon prometteur pour Wienerberger

Malgré les difficultés que traverse actuellement l'Europe sur le plan énergétique Heimo Scheuch, PDG de Wienerberger, affiche un optimisme conquérant.

« La rénovation du parc immobilier vieillissant en Europe est une étape essentielle pour atteindre la neutralité climatique. Pour Wienerberger, ce domaine d'activité recèle un énorme potentiel de croissance à exploiter dans les années à venir, notamment dans le segment des toitures, y compris les solutions solaires et de gestion de l'eau. L'acquisition de Terreal doublerait nos ventes de toiture. En les faisant passer à 75 millions de mètres carrés, elle constituerait une étape importante dans la mise en oeuvre de notre stratégie de croissance créatrice de valeur » déroule ainsi Heimo Scheuch.

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Réduire les émissions de CO2 de 225.000 tonnes par an

Avant de compléter son analyse par une projection de ce rapprochement centrée sur la transition écologique.

« Grâce à l'importance commune que nous accordons à la durabilité, aux solutions innovantes et aux modèles commerciaux digitalisés, l'installation de nos solutions permettra de réduire les émissions de CO2 de 225.000 tonnes par an. En outre, nous dégagerons des synergies durables en combinant nos installations de production et nos technologies et en élargissant notre gamme de produits en ce qui concerne le toit en pente, y compris les accessoires et l'isolation.

En créant le premier véritable expert européen en matière de toits en pente qui intègre des solutions pour l'énergie solaire, l'eau et d'autres solutions pour le toit, Wienerberger construit une plate-forme solide pour la poursuite de sa croissance », argumente ainsi le patron du groupe autrichien.

Le bouclage de l'opération reste notamment soumis à la consultation du Comité social et économique (CSE) de Terreal et à l'approbation des autorités de la concurrence. La direction de Terreal souligne que jusqu'à l'approbation des autorités de la concurrence le groupe continuera à gérer ses activités de façon totalement séparée.

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