Comme le craignaient tous les partisans d'une poursuite d'activité à l'usine Ford Aquitaine Industries (FAI), spécialisée dans la fabrication de boîtes de vitesses automatiques, la Direccte (Direction régionale des entreprises, de la concurrence, du travail et de l'emploi) de Nouvelle-Aquitaine a finalement homologué ce lundi le plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) lancé par le groupe Ford dans sa filiale girondine. Dans un communiqué, la CFTC de FAI précise que le secrétaire du comité d'entreprise a été informé de la décision officielle de la Direccte hier soir à 23 heures 22. Ce qui semble démontrer que cette décision n'a pas été facile à acter.
Toujours selon la CFTC, Ford Europe a informé les salariés en interne ce mardi matin à 9 heures 40, après que le CE de Ford Aquitaine Industries ait relayé l'information dans la filiale girondine à 7 heures 13. A peine l'homologation du PSE était-elle connue que la CGT de FAI annonçait qu'elle allait attaquer cette décision en justice.
"Le PSE n'a aucun fondement, aucune justification économique. Tout le monde le sait, tout le monde l'a dit durant cette dernière année" martèle ainsi le syndicat dans son communiqué, au terme d'un réquisitoire qui condamne la stratégie suivie sur ce dossier par le gouvernement.
Que l'Etat passe à une politique offensive
Si l'alliance établie entre le ministère de l'Economie et des Finances et l'intersyndicale FO, CFE-CGC, CGT de Ford Aquitaine Industries n'est pas totalement rompue, elle est bien entamée. Dans sa déclaration la confédération ne donne pas dans le flou artistique.
"Le gouvernement a baissé les bras, il n'a pas été capable de se confronter à la multinationale, il n'a pas utilisé son seul moyen de pression pour faire reculer Ford ou pour lui faire payer cher son départ (...) Ce que le gouvernement n'a pas pu faire ou pas su faire ou pas voulu faire, nous allons le tenter. Nous allons attaquer en justice pour faire invalider ce PSE. Nous mènerons cette bataille à partir de maintenant, en plus bien sûr de celle consistant à remettre de l'activité dans l'usine et à préserver le plus d'emplois possibles" annonce la CGT de FAI.
On ne pourra pas dire que les syndicats n'ont pas joué le jeu avec Bruno Le Maire puisque sur notre photo, accompagnés par Denis Barthe (ex-Noir Désirs), Philippe Poutou et Gilles Lambersend, militants CGT de FAI, ont posé le 15 février avec le ministre en une de La Tribune (crédit J-Philippe Déjean).
Pour ce syndicat, dont Philippe Poutou est le délégué syndical et qui a déjà lancé un appel au boycott des produits Ford, il n'y a pas plus de fatalité ce mardi qu'un autre jour de la semaine dernière ou du mois d'avant.
"Nous restons convaincus que la réindustrialisation du site est liée à une politique offensive de l'Etat qui doit prendre le contrôle de l'usine et du parc machines. C'est sur cette base que l'Etat et les collectivités territoriales doivent élaborer une stratégie industrielle, travailler concrètement pour mettre en place une activité" déroule ainsi la CGT de FAI.
Un plan de revitalisation qui ne veut pas dire reprise
Tous les détails du PSE concernant l'avenir des 850 salariés de l'usine ne sont pas encore connus. Il se confirmerait toutefois que près de 400 d'entre eux soient concernés par un départ en préretraite, pour une durée maximale de sept ans, avec maintien de 70 % du salaire. A quoi s'ajoutent des mesures d'accompagnement, avec en premier lieu des indemnités de licenciement allant de 17 mois de salaire brut pour 30 ans d'ancienneté à 7 mois au-dessous de 10 ans. Les premiers chiffres qui avaient été avancés indiquaient un total brut de l'ordre de 200.000 euros par salariés pour ce PSE. Montant qui aurait été réévalué à 190.000 euros brut.
Mais il ne s'agit pas de cash avaient déjà prévenu les proches du dossier il y a plusieurs semaines. Le montant du plan de revitalisation du futur site de l'ex-usine, annoncé à 20 M€ serait validé et n'a pas été réévalué à la hausse. Dans tous les cas il ne correspond pas aux besoins en investissement nécessaires au lancement d'un nouveau projet industriel dans le cadre d'une reprise, qui sont de l'ordre de 150 M€.
Au bord de la rupture avec le gouvernement ?
Ford Aquitaine Industries a reçu hier lundi la visite de Benoît Hamon, ex-candidat PS à la présidentielle de 2017 et fondateur du mouvement Génération.s, qui a plaidé lui aussi pour une nationalisation temporaire de l'usine. Une solution transitoire qui a toujours l'aval de l'intersyndicale.
"Dans le domaine du véhicule propre, du transport et du transport collectif, il y a des exigences environnementales, des besoins sociaux à satisfaire, donc il y a forcément des solutions, les pouvoirs publics ont les moyens de le faire. C'est aussi de leur responsabilité à l'égard de l'intérêt général" conclut la CGT dans son communiqué.
Il semble bien que pour que le courant puisse continuer à passer entre le ministre de l'Economie et des Finances, les collectivités territoriales de Nouvelle-Aquitaine impliquées sur le dossier et l'intersyndicale, le gouvernement soit en mesure de faire une annonce originale allant dans le sens d'une poursuite de l'activité.
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