Le stockage d'énergie solaire, la tentation qui séduit les particuliers

Le nombre d'unités de stockage d'énergie mises en service sur des installations photovoltaïques des particuliers a doublé au premier semestre 2023 en France. Une tendance poussée par la hausse des prix de l'électricité, mais qui, sans de larges incitations, restera mineure face au coût et au retard pris sur les pays européens, souligne la filière.
Maxime Giraudeau
L'Europe compte un million d'unités de stockage d'énergie photovoltaïque sur des installations en autoconsommation, dont seulement 10.000 en France.
L'Europe compte un million d'unités de stockage d'énergie photovoltaïque sur des installations en autoconsommation, dont seulement 10.000 en France. (Crédits : DR)

Une doudoune à Matignon. L'image est apparue il y a un an : une Première ministre molletonnée qui venait annoncer un hiver à haut risque avec, pour la première fois depuis des décennies, le spectre de coupures sur le réseau électrique. Si la France n'a pas connu le chaos énergétique attendu, installateurs et particuliers ont tout de même réagit en conséquence, à court et à long terme.

Selon le syndicat de l'énergie solaire Enerplan, il y a eu deux fois plus de mises en service d'unités de stockage d'énergie solaire sur des installations photovoltaïques chez les particuliers au premier semestre 2023 par rapport à la même période l'année précédente. Soit un total de 1.000 nouveaux systèmes en six mois. Une croissance portée par un contexte de flambée des coûts de l'énergie.

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« La fin du bouclier tarifaire a été un élément déclencheur et depuis il y a une forte augmentation d'intérêt sur les batteries. Avec les craintes de coupure sur le réseau, les gens se sont aussi posés la question de l'utilité d'avoir un système de stockage », explique Lætitia Brottier, vice-présidente d'Enerplan, déléguée au solaire et bâtiment.

Une tendance qui reste néanmoins très tardive par rapport aux pays européens. À titre d'exemple, l'Allemagne aurait branché l'an dernier plus de 220.000 unités de stockage en autoconsommation solaire. Le continent vient quant à lui de dépasser le million de mises en service, pour une puissance totale de 9 MWh. Colossal au regard du minuscule parc français, cantonné à 10.000 unités. « Ce n'est vraiment pas nous qui faisons le marché européen », euphémise Lætitia Brottier.

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Un taux d'autoconsommation qui passe à 70 %

Si le retard est abyssal, il n'en est pas moins logique. Avant la levée du bouclier tarifaire, le prix de l'électricité était particulièrement avantageux en France, avoisinant les 20 centimes du kilowattheure, contre 30 environ en Europe, voire 40 dans des pays comme l'Allemagne, les Pays-Bas ou le Royaume-Uni. Les gains d'une installation photovoltaïque étaient alors moins élevés dans l'Hexagone que chez ses voisins. Si ce constat est toujours valable, l'écart s'est réduit. Les prix en France devraient poursuivre leur hausse dans les prochaines années selon plusieurs études.

Certains acteurs de l'énergie s'attendent même à ce que les prix doublent d'ici dix ans. C'est le cas pour le distributeur de matériel photovoltaïque BayWa r.e., filialegr d'un groupe allemand basée à Bordeaux. Pour ses représentants, la hausse des prix en France va renforcer l'intérêt du photovoltaïque en autoconsommation et en particulier pour les installations dotées de batteries.

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« Le stockage va permettre aux particuliers de faire passer leur taux d'autoconsommation de 35 à 70 % maximum [et en moyenne, ndlr] puisque la consommation pourra être différée », présente Joan Bossard, responsable des ventes de BayWa r.e. Le distributeur, qui a réalisé 143 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2022, prévoit de doubler sa part d'activité sur les installations de moins de 150m2 chez les particuliers d'ici quatre ans.

Inciter les publics précaires

Autre donnée qui, en moyenne, double : le coût de l'installation globale incluant une unité de stockage par rapport à une installation classique. Malgré la promesse de gains importants apportée par les batteries, la rentabilité du système se trouve retardée de plusieurs années pour le particulier. C'est avec la hausse promise des coûts de l'électricité et l'électrification des usages que le stockage en autoconsommation se révèlera vraiment rentable. Mais la pratique ne deviendra pas pour autant la panacée. « La batterie d'une installation photovoltaïque pourra être celle embarquée sur la voiture électrique du particulier, qui rechargera son véhicule grâce à ses panneaux », relie par exemple Laetitia Brottier. La pertinence d'un système de stockage varie d'un particulier à l'autre puisqu'elle est déterminée en fonction du profil du ménage : plus il consomme aux heures de faible ensoleillement, plus le secours de batteries est intéressant.

La profession se trouve face à deux défis pour accompagner les futurs clients. Retrouver une bonne image tout d'abord, alors que durant la dernière décennie, de nombreux installateurs ont fait miroiter les bénéfices illusoires de systèmes sur-dimensionnées dont le coût s'est révélé exorbitant pour les propriétaires. Des velléités qui pourraient être encore exacerbées chez certains grâce au potentiel important du stockage. Ensuite, le photovoltaïque est confronté à une pénurie de main d'œuvre et un besoin de formation majeurs. « Ce sont des facteurs limitants pour la croissance de la filière  », pointe Julien Chirol, président de BayWa r.e. Une filière qui appelle le gouvernement à lancer des incitations à l'autoconsommation en direction des ménages les plus précaires. « Ce sont eux qui ont le plus besoin de voir leur facture baisser ! », clame Laetitia Brottier. Sans quoi le développement demeurera limité, et les promesses sociales de la transition énergétique non tenues.

Maxime Giraudeau

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Commentaire 1
à écrit le 13/10/2023 à 10:05
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Cela fait longtemps déjà que l'on sait faire des panneaux solaires, à savoir qui permettent de chauffer l'eau, via les circuits gazeux des frigos. Pourquoi ne pas en généraliser le concept ? Et ainsi permettre aux gens qui n'ont pas ou plus les moyen...

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