Forêt des Landes de Gascogne : les ripisylves, ce trésor de biodiversité à mieux protéger

La filière sylvicole veut engager les propriétaires forestiers des Landes de Gascogne à mener des pratiques plus vertueuses dans les ripisylves. Ces espaces fertiles situés le long des cours d'eau sont souvent cultivés de manière intensive, brisant leur intérêt environnemental et leur capacité de régulation des incendies. La Fibois a élaboré une fiche pratique avec le soutien d'une association environnementale.
Maxime Giraudeau
La ripisylve du Ciron, au sud de la Gironde, est particulièrement préservée.
La ripisylve du Ciron, au sud de la Gironde, est particulièrement préservée. (Crédits : DR)

« Des milieux dans lesquels on aura une sylviculture différente. » Les professionnels de la sylviculture veulent assurer qu'il y aura un avant et un après dans la culture du bois le long des cours d'eau des Landes de Gascogne. Empêchée par les conditions météorologiques de ce 21 juin, premier jour d'un été à haut risques pour la forêt, la visite qui devait se tenir sur la ripisylve du Ciron au sud de la Gironde n'a pas eu lieu. Pas de quoi empêcher les représentants de la filière de clamer à l'unisson la nécessaire préservation de ces écosystèmes, à l'image de la fiche technique qu'ils ont publiée pour guider les pratiques.

Le rôle des ripisylves dans l'équilibre environnemental du milieu forestier a été ravivé par les incendies de l'été dernier qui ont ravagé plus de 30.000 hectares du massif girondin. Mais ces espaces ont des vertus très multiples. Ils correspondent aux abords des cours d'eau qui traversent la forêt et sont plus ou moins larges selon l'étendue du lit majeur, le plus haut niveau de crue des rivières. Il y en a des dizaines sur les trois départements de la forêt des Landes de Gascogne (Gironde, Landes, Lot-et-Garonne), en particulier celles des rivières du Ciron et de la Leyre. « Couloir de biodiversité, créatrice de parfums naturels, filtration de l'eau, maintien de la fraîcheur, sols humides pour ralentir voire stopper les incendies quand ils sont de faible intensité », énumère ainsi Philippe Barbedienne, le président de la Sepanso Gironde qui, avec les fédérations des Landes et du Lot-et-Garonne, a accompagné la filière sylvicole dans l'élaboration de la fiche technique issue d'une concertation débutée en 2020.

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« Il y a un intérêt économique »

Car, jusqu'à présent, les ripisylves étaient plutôt prises d'assaut par les exploitants. Ces terres deviennent particulièrement fertiles grâce aux dépôts sédimentaires apportés par l'eau. « Nous observions régulièrement des plantations de résineux en ligne sur les lits majeurs », s'offusque Philippe Barbedienne. « C'est une pratique qu'on espère révolue. On est tous d'accord avec cette phrase », assène-t-il sous l'approbation des représentants de la filière. Sans disposer d'un pouvoir réglementaire, la Fibois Landes de Gascogne veut pousser les forestiers à calmer le jeu sur l'exploitation de ces espaces, en les reboisant avec des espèces feuillues (chênes, aulnes, tilleuls...). « Que des coupes d'amélioration, pas de coupes rases », indique Stéphane Vieban, directeur général de la coopérative girondine Alliance forêt bois. Et uniquement des prélèvements sur les pins maritimes.

Seuls quelques résineux disséminés doivent être implantés dans les ripisylves, pour laisser une place prépondérante aux feuillus, réservoirs de biodiversité. La part du pin maritime ne doit pas excéder les 20 % du panachage, sur une bande autour des cours d'eau de quelques mètres à plusieurs dizaines. De quoi amenuiser la rentabilité économique de l'exploitation. « Mais il y a bien un intérêt économique puisque la production de pins aux alentours bénéficie de cette diversité. Les oiseaux vivant dans les feuillus se nourrissent d'insectes qui s'attaquent aux pins, ce qui améliore leur état sanitaire », montre Eric Dumontet, secrétaire général du Syndicat des sylviculteurs du Sud-Ouest.

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Replantations hâtives

Si les propriétaires qui ne respectent pas les préconisations ne peuvent pas être sanctionnés, la Fibois prévient qu'ils risquent en revanche de perdre leur certification durable PEFC lors des contrôles. Des milliers de sylviculteurs sont concernés, même si le nombre d'hectares relatif n'a pas été précisément défini. S'il est illusoire de pouvoir embarquer tout le monde dans une forêt avec 90 % de propriétaires privés, la filière a le mérite de porter une voix unanime et qui va dans le bon sens.

« Aujourd'hui, la sylviculture que l'on mène suscite des interrogations voire des vives inquiétudes. Face à cela, nous devons préserver la qualité environnementale des terres et mener des processus de concertation pour aboutir à une vision partagée de la biodiversité dans le cadre de la sylviculture de production », expose François Guiraud, président de la Fédération des industries du bois d'Aquitaine

Une déclaration difficile à faire infuser sur un territoire forestier immense. Après un été incendiaire, certains sylviculteurs se hâtent à replanter en dépit des nécessités sanitaires et de diversification des massifs, dont la monoculture renforce la vulnérabilité face aux flammes. « Je pense que la majorité des sylviculteurs nous suivra », espère tout de même Eric Dumontet, à l'image d'une filière meurtrie par les feux.

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Maxime Giraudeau

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Commentaire 1
à écrit le 25/06/2023 à 8:33
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Tous les points d'eau devraient être entourés de projets agroécologiques, ou laissés à la nature, tous car ce sont de véritables accélérateurs de la pollution de masse et de l'empoisonnement généralisé de notre agro-industrie.

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