Une Epoque Formidable : quand s’inspirer du vivant résonne comme une urgence

L’un met en avant la bio-inspiration qui consiste à étudier la nature et à en tirer des développements technologiques. L’autre défend l’idée d’une économie symbiotique qui mettrait en symbiose les écosystèmes naturels et les activités humaines. Par des chemins différents, Gilles Boeuf, biologiste, et Isabelle Delannoy, ingénieure agronome, ont rappelé l’importance de s’inspirer du vivant pour changer de modèle dans un contexte de changement climatique. Ils intervenaient dans le cadre de l’événement Une Epoque Formidable, organisé par La Tribune avec le conseil régional de Nouvelle-Aquitaine, vendredi 7 février, à Bordeaux.
Isabelle Delannoy a échangé avec Gilles Boeuf sur le thème de la biodiversité
Isabelle Delannoy a échangé avec Gilles Boeuf sur le thème de la biodiversité (Crédits : Agence APPA)

"Chaque fois que vous agressez la nature, vous vous agressez. Or, cette nature nous ne la considérons pas bien." C'est par ces mots que Gilles Boeuf, biologiste et ancien président du Muséum national d'histoire naturelle, a ouvert vendredi, l'événement Une Epoque Formidable organisé par La Tribune à Bordeaux avec le conseil régional de Nouvelle-Aquitaine et France Culture au cinéma CGR Le Français. Le constat est alarmant. Les récents incendies en Australie ou encore en Amazonie n'ont fait que le rappeler. "Il n'y a plus de tampon pour absorber les risques", assure Isabelle Delannoy, ingénieure agronome et co-scénariste du film Home réalisé par Yann Arthus-Bertrand en 2009. "Il faut remonter à février 1985 pour trouver un mois plus froid que la situation actuelle", ajoute Gilles Boeuf qui juge important de rappeler que "la science n'est pas une opinion. Admettons une plateforme de connaissances de base qui nous fera réagir."

Le poids du local

Gilles Boeuf

Gilles Boeuf (crédits : Agence APPA)

Face à cela, quelles solutions ? "Je ne crois plus au fait que cela puisse venir du politique au niveau national", a confié Isabelle Delannoy. "Les Etats ne font rien", a renchéri Gilles Boeuf. "En revanche, les territoires, les régions, les communes, les villages agissent. Les associations aussi, il y en a un million en France. A ce titre, les élections municipales de mars prochain constituent un moment important. Le maire est quelqu'un d'essentiel", insiste Gilles Boeuf. "Il n'y a pas de territoire sans avenir, que des territoires en manque de vision. On a besoin du courage de préfets, de maires, de responsables au sens large pour donner le droit à l'expérimentation. C'est maintenant qu'il faut réagir", répète Isabelle Delannoy.

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Vers une économie régénérative

En la matière, Isabelle Delannoy, qui défend le concept d'économie symbiotique a plus d'une idée en tête. "Pour épurer les eaux, il y a les joncs, les iris, les nénuphars, les cascades, les fontaines, un système plus efficace que les systèmes classiques d'épuration." Le but ? Accélérer la transition vers une économie régénérative qui réconcilie l'activité humaine intense, des écosystèmes naturels florissants et la prospérité économique. Et de citer notamment l'agroécologie, qui nourrit des filières locales, de mettre en avant la mutualisation, le réemploi, la réparation et la nécessité de tendre vers le zéro extraction.

"On ne voit pas que les écosystèmes vivants, qui maintiennent les conditions de la vie sur terre, sont nos alliés dans ce changement et des alliés tout court pour notre économie, insiste Isablelle Delannoy.  80 % des budgets mondiaux consacrés au changement climatique sont liés à la diminution des émissions et 20 % à l'adaptation. C'est l'inverse qu'il faudrait envisager."

Métamorphoses

"La nature est bien faite", enchaine Gilles Boeuf qui prêche en faveur du bio-mimétisme, dont le but consiste à s'inspirer de la nature pour concevoir des matériaux et des procédés novateurs au service de l'humain, moins polluants, moins énergivores, recyclables, plus sûrs, de meilleure qualité, le tout à moindre coût. "Il faut une métamorphose qui aille dans le bon sens. Supprimons l'économie actuelle qui consiste à faire de l'argent vite en détruisant. C'est l'humain qui a inventé les déchets", rappelle-t-il à cette occasion.

Pas de pessimisme toutefois derrière leurs discours."Cela servirait à quoi ? Ne soyons pas non plus dans de l'optimisme béat", déclare Gilles Boeuf. En revanche, "arrêtons de nous comparer à un ancien système que l'on veut quitter", lâche Isabelle Delannoy. "C'est la fin d'un monde, pas du monde", complète Gilles Boeuf.

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