Impression 3D : les Bordelais de Gryp au chevet des voitures de collection

Imprimer en 3D les pièces détachées des voitures de collection : c'est le pari des deux Bordelais passionnés d'automobile et fondateurs de Gryp. Cette très jeune entreprise, lancée en novembre 2017 sur un marché dynamique mais à faibles montants, a déjà séduit plus de 150 clients et vise 80.000 € de chiffre d'affaires l'an prochain. Une levée de fonds est en cours.
Gauthier Laviron et Bastien Vanlathem, les cofondateurs de Gryp, entreprise d'impression 3D de pièces détachées pour les véhicules de collection de 1970 à 2000.
Gauthier Laviron et Bastien Vanlathem, les cofondateurs de Gryp, entreprise d'impression 3D de pièces détachées pour les véhicules de collection de 1970 à 2000. (Crédits : Gryp)

A l'heure où tout le monde parle de véhicule électrique et de voiture autonome, Gauthier Laviron et Bastien Vanlathem, les deux fondateurs de Gryp, préfèrent regarder dans le rétroviseur pour remonter à l'époque pas si lointaine des youngtimers. Cette expression anglaise désigne les "jeunes anciennes", c'est-à-dire les voitures sorties des usines entre 1970 et 2000, "une époque où les constructeurs, notamment français, produisaient assez peu de pièces détachées", précise Bastien Vanlathem, 26 ans. Et c'est grâce à l'impression 3D que Gryp entend faire le lien entre la faible offre de pièces détachées et la forte demande des collectionneurs en imprimant les pièces sur mesure.

Un marché en plein essor

"Nous avons décidé de lancer Gryp pour accompagner la croissance du marché des voitures de collection depuis 2008/2009. Cela entraîne une importante spéculation sur le prix des véhicules et donc, par ricochet, sur les pièces détachées utilisées pour les remettre en état. Il y a donc un marché à prendre pour proposer des pièces à un prix décent", détaille ce féru d'automobile possesseur d'une Triumph TR6 de 1972.

Porté par l'absence d'imposition sur les plus-values à la revente, le marché de la voiture de collection a en effet vu ses prix se démultiplier ces dernières années si bien qu'il est désormais estimé autour de 4 Md€ par an par le salon Rétromobile. Un montant à relativiser pusique Gryp (Get and reused youngtimers parts) ne vise pour l'instant qu'une époque et qu'un segment de ce marché : celui des pièces d'ornement. "Nous n'avons ni les matières, ni les certifications pour commercialiser des pièces moteurs et des pièces mécaniques. Nous imprimons donc uniquement des pièces en plastique, ce qui colle parfaitement avec les véhicules youngtimers où cette matière a été utilisé massivement au détriment du chrome et de l'aluminium très présents sur les voitures plus anciennes", pointe Gauthier Laviron, 25 ans et propriétaire d'une Golf 1 cabriolet de 1983 et d'une Renault 4L de 1986.

Impression 3D

L'impression 3D est en effet au cœur du modèle économique de Gryp qui a investi 13.000 € dans deux imprimantes. Fonctionnant 24h sur 24 depuis le lancement en novembre 2017, elles ont produit près de 160 pièces détachées pour autant de clients. L'impression proprement dite dure entre 30 minutes et 70 heures en fonction de la taille et de la complexité. Avec le dessin, la modélisation, l'impression, et le post-traitement, il faut compter 5 jours et 30 € pour une pièce simple et jusqu'à 3 semaines et 90 € pour un élément plus complexe. Les propriétaires et acquéreurs de véhicules youngtimers n'ont en effet pas vraiment le profil des grandes fortunes. "Ce sont des particuliers qui s'investissent dans leur passion, en temps et en argent, mais dans des montants raisonnables. En général, ils ne sont pas prêts à payer n'importe quel prix, surtout pour un élément décoratif", assure Bastien Vanlathem, titulaire d'une master 2 "Création d'entreprise" de l'IAE de Bordeaux.

Gryp

Une grille d'aération capot d'Alfa Roméo Montréal produite par impression 3D (Crédits : Gryp)

Le panier moyen des clients de Gryp tourne en effet autour de 45 €. Un montant unitaire plutôt faible qui oblige à faire du volume pour grandir. "Ce qui nous limite aujourd'hui, c'est très clairement notre système de production. C'est pour cela que aurons dès le mois de juin une nouvelle imprimante 3D capable de gérer le kevlar, le carbone et la fibre de verre", explique, lucide, Gauthier Laviron, qui héberge à titre temporaire la très jeune entreprise et possède un master 2 "Management de projet industriel", également à l'IAE de Bordeaux.

Dépasser 100.000 € de chiffre d'affaires d'ici 2020

Pour l'heure, après un investissement total de 22.000 €, Gryp a dégagé 12.000 € de chiffre d'affaires depuis le 1er novembre dernier et s'appuie sur une croissance dynamique : "Nous constatons une progression mensuelle de notre activité de 30 à 40 % et nous sommes en ligne avec notre objectif de 54.000 € de CA sur l'ensemble de l'année 2018. Pour la suite nous visons 83.000 € en 2019 et 120.000 € en 2020", détaille Gauthier Laviron. Les deux entrepreneurs s'attachent à constituer un catalogue de références pour soutenir leur modèle économique : "Aujourd'hui nous ne facturons pas les dessins des nouvelles pièces car ils viennent nourrir notre catalogue et nous permettront ensuite de gagner en productivité et donc en volume. C'est ce catalogue, associé à notre passion commune, qui constitue notre valeur ajoutée et créera des barrières à l'entrée pour d'éventuels concurrents", observe Bastien Valanthem qui a aussi dans ses cartons une stratégie de distribution :

"A terme, l'idée est de signer avec des distributeurs, de les équiper en imprimantes 3D et de nous concentrer sur le prototypage. Avec un catalogue crypté, on pourra leur transmettre les données de chaque pièce qu'ils n'auront plus qu'à imprimer d'un clic. Nous nous rémunérerons à chaque impression. L'idée est donc de maximiser le BtoB tout en conservant une activité BtoC pour faire fonctionner le bouche-à-oreille et le partage de notre passion, deux éléments qui fonctionnent très bien dans ce milieu."

Une levée de fonds de 40.000 €

Pour accompagner cette croissance, Gryp déménagera cet été du côté de la barrière de Toulouse, à Bordeaux, dans des bureaux de 25 m2 jouxtant un atelier mécanique de 50 m2. Aucun recrutement n'est programmé pour l'heure et la priorité est donnée aux stagiaires puisque les deux dirigeants souhaitent d'abord arriver à se rémunérer avant de voir plus loin. En revanche, l'acquisition d'un scanner 3D et de nouvelles machines et un développement sur les marchés belge et suisse sont prévus. Autant de changements de vitesses qui nécessiteront des fonds :

"Nous sommes à la recherche de business angels à Bordeaux et dans la région, notamment parmi nos clients. Nous devrions pouvoir réunir les 40.000 € dont nous avons besoin d'ici la fin de l'été. Nous procèderons par une dette parce que nous ne souhaitons pas ouvrir le capital à ce stade. Quant aux fonds d'investissement et aux acteurs publics, ils ne sont pas intéressés parce que nous sommes sur un marché de niche qui n'est pas vraiment raccord avec l'ambiance développement durable, numérique et e-santé", sourit Gauthier Laviron.

La jeune entreprise a néanmoins bénéficié d'une dotation de 5.000 € l'an dernier via le concours Ubooster de l'incubateur Ubee lab de l'Université de Bordeaux, et d'un prêt de 4.000 € du Département de la Gironde avec le programme Rebond 33.

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Commentaire 1
à écrit le 23/05/2018 à 12:19
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Bonjour Messieurs En tant que collectionneur c'est une très bonne idée, qui je suis certain prendras son envol, mais penser aux voiture avant 1970 française ou étrangère ar il manque beaucoup de pièces pour des modèles spécifique. Cordialement ...

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