Budget : la Nouvelle-Aquitaine réclame une « rénovation fiscale » pour les régions

Entre des investissements à la baisse et des transitions coûteuses, le conseil régional de Nouvelle-Aquitaine s'engage sur un budget 2024 stable à 3,5 milliards d'euros. Une somme abondée par une fiscalité inadaptée à la transition écologique, déplore la majorité socialiste.
Maxime Giraudeau
« Notre fiscalité est totalement inadaptée à nos compétences », se plaint Alain Rousset.
« Notre fiscalité est totalement inadaptée à nos compétences », se plaint Alain Rousset. (Crédits : Agence APPA)

« Un budget qui d'année en année devient de plus en plus difficile à bâtir. » L'acte est décidément éprouvant pour les régions. Après un périlleux exercice mené en 2023 sous contexte d'inflation et qualifié de « jamais vu », le conseil régional de Nouvelle-Aquitaine présente ce lundi 11 décembre en séance plénière son budget 2024 chiffré comme l'an dernier à 3,5 milliards d'euros.

Avec 3 % de croissance des recettes, la majorité socialiste dit subir un ralentissement de la hausse des dotations. « Les régions sont les collectivités les plus impactées, entre l'absence de solidarité de l'État et le fait que notre fiscalité est totalement inadaptée à nos compétences », lance le président Alain Rousset. Avec dans le viseur la baisse de 107 millions d'euros des dotations des régions dans le projet de loi de finances 2024, mais aussi les recettes issues de la taxe sur les carburants (TICPE), stables en 2023, et celles des cartes grises qui ont plongé de 17,6 %.

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« Inventer une fiscalité qui n'existe pas »

Plus l'exécutif s'évertue à soutenir le report modal de la voiture vers les modes de transport collectifs, moins il récolte de recettes. « De budget en budget, nous enregistrerons une perte de recettes en cartes grises de 42 millions d'euros », calcule Sandrine Derville, vice-présidente chargée des finances. « Cette fiscalité carbonée est un non-sens politique, un non-sens budgétaire au regard de nos ambitions en faveur des transitions. »

La refonte du système de dotations est une revendication de longue date mais qui se trouve exacerbée alors que les investissements verts n'ont jamais été aussi importants. L'Etat a de son côté lancé les COP régionales, sortes de comités locaux de la transition écologique, au sein desquelles les exécutifs régionaux vont pouvoir proposer de novelles voies de financement. Le lancement néo-aquitain a eu lieu vendredi 1er décembre à Bordeaux et les idées qui en découleront seront mises sur la table l'été prochain.

« Il y a une rénovation fiscale à mettre en route si, comme le veut le gouvernement, c'est aux régions d'articuler la transition écologique », souhaite Guillaume Riou, vice-président de la région Nouvelle-Aquitaine chargé de la feuille de route Néo Terra. « On doit inventer une fiscalité qui aujourd'hui n'existe pas. »

Jeunesse et transports au menu de 2024

Face aux contraintes, l'exécutif régional choisit de maintenir le niveau d'investissement à plus d'1,1 milliard d'euros, comme en 2023, mais en régulant les emprunts. Ceux-ci vont passer de 780 à 620 millions d'euros, soit une baisse de -17 %. La Région est contrainte de réduire la voilure puisque l'inflation pèse toujours pour 80 millions d'euros de dépenses supplémentaires par rapport au budget prévisionnel 2022 et les frais financiers, liés aux taux d'intérêts élevés, ont bondi quant à eux de 20 millions d'euros. Au total, l'épargne brute de la collectivité va diminuer de -4 %.

Deux piliers représentent la moitié du budget régional : la jeunesse (979 millions d'euros) principalement avec les crédits alloués à l'éducation, à la vie quotidienne et aux lycées, et l'aménagement du territoire (712 millions) dont près de la moitié fléchée vers les transports. Ainsi, 80 millions d'euros seront accordés aux études et travaux de régénération ferroviaire, 27 millions aux LGV reliant Bordeaux à Toulouse et Dax ou encore 19 millions au RER Métropolitain. Côté transition écologique et énergétique, la Région met une enveloppe de 550 millions d'euros après avoir voté en novembre la deuxième version de sa feuille de route Néo Terra.

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Alors que les élus annoncent un pic d'investissement à venir dans les prochaines années pour répondre à l'impératif climatique, les socialistes vont inaugurer en 2024 leur tout premier budget vert. 20 % des politiques régionales seront analysées et notées par le prisme de leur impact environnemental et sociétal, selon la méthodologie développée par l'Institut I4CE présidé par l'économiste Jean-Pisani Ferry.

Trop écolo, ou pas assez

Une initiative qui traduit des ambitions environnementales marquées et qui s'attire les critiques de tous les bords politiques. Au centre, on fustige « un budget prévisionnel techno, qui s'adresse à une poignée de militants écologistes. Vous ne parlez plus aux néo-Aquitains, plus aux entreprises qui souffrent, plus aux agriculteurs, plus aux viticulteurs ni aux ouvriers de nos industries aéronautique ou d'armement », tance Christian Devèze, conseiller régional du groupe Centres et Indépendants. « Pouvons-nous fixer comme unique cap une écologie punitive pour notre économie, nos transports ou notre agriculture ? », interroge-t-il à propos d'un budget qualifié de « sanctionnel ».

A contrario, les écologistes, qui ont fait scission avec la majorité socialiste en 2020, affirment à l'inverse que « l'environnement et le climat ne pèsent vraiment pas lourd dans ce budget. En fait, si l'on sort les mobilités, l'environnement et le climat, c'est environ 2 % de votre budget », selon les mots du conseiller régional Stéphane Trifiletti. « Nous aurions souhaité voir ménager nos territoires. Malheureusement votre budget primitif 2024 ne le permettra pas ou peu : il y a un décalage voire un fossé entre un affichage écologique et de graves insuffisances sur le plan social dans cet exercice budgétaire. »

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Maxime Giraudeau

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Commentaire 1
à écrit le 12/12/2023 à 9:53
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Et tout ça pour ne pas aller chercher le fric là où il se trouve, dans les paradis fiscaux, qui possède et détruit le monde en dormant. Quand ils ne veulent pas ils ne peuvent pas et après eux le déluge.

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