L'Université de Bordeaux veut s'armer « pour évoluer dans un monde dégradé »

Dotée d'un vice-président aux transitions environnementales et sociétales, l'Université de Bordeaux entend décliner cet enjeu dans tous ses métiers. Les économies d'énergie sont ciblées à court, moyen et long terme, notamment via la valorisation de son vaste patrimoine immobilier et foncier. Les laboratoires les plus énergivores seront mis à contribution mais l'Université continuera à accueillir les étudiants normalement.
Eric Macé, professeur de sociologie et vice-président de l'Université de Bordeaux en charge des transitions environnementales et sociétales.
Eric Macé, professeur de sociologie et vice-président de l'Université de Bordeaux en charge des transitions environnementales et sociétales. (Crédits : Arthur Pequin)

En 2022, la facture énergétique de l'Université de Bordeaux, de ses 54.000 étudiants et 6.000 personnels académiques et administratifs, s'élève à environ 11 millions d'euros. En 2023, elle devrait bondir à près de 20 millions d'euros ! Comme les entreprises et autres établissements publics, la faculté est rattrapée par la flambée des prix de l'énergie et, plus largement, par l'impératif d'une plus grande sobriété énergétique.

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Signe de sa préoccupation, Dean Lewis, le nouveau président, était accompagné, ce mardi 20 septembre pour évoquer la rentrée universitaire, par son vice-président aux transitions environnementales et sociétales. Un portefeuille créé en juillet dernier et assumé par Eric Macé, professeur de sociologie, qui se montre très clair sur l'ampleur des enjeux à aborder face au dérèglement climatique :

"Nous sommes une grande université et nous avons donc de grandes responsabilités. Nous allons mettre au cœur de l'Université les moyens pour équiper nos étudiants en matière de transitions écologiques, pour leur permettre d'apprendre, de vivre et d'évoluer dans un monde dégradé. [...] Nous allons nous équiper pour mettre en œuvre ces transitions en combinant les sciences dures et les sciences sociales [...] On le sait : l'inaction aura un coût de plus en plus élevé."

-10 % cet hiver, -40 % d'ici 2030

Dean Lewis ambitionne ainsi de faire de l'université bordelaise un "établissement de référence sur les transitions sociétales en environnementales". Concrètement, cela passera par une baisse de la consommation énergétique de -10 % dès cet hiver puis de -40 % d'ici 2030 et jusqu'à -60 % en 2050. L'Université consomme annuellement 51 Gwh d'électricité (l'équivalent d'une ville de 10.000 habitants) et autant de gaz. Dans l'immédiat, elle va jouer sur l'ajustement des températures de chauffage et climatisation, des actions de sensibilisation et la priorisation des dix laboratoires les plus consommateurs d'énergie car gourmands en salles blanches, hottes aspirantes et autres congélateurs. "Si on arrive à réduire de 15 à 20 % ces dix plus gros consommateurs, on aura déjà bien avancé", précise Dean Lewis, citant notamment l'IECB (Institut européen de chimie et biologie), l'ISM (Institut des sciences moléculaires), le Neurocampus ou encore l'ISVV (Institut des sciences de la vigne et du vin). En revanche, pas question de réduire les horaires, fermer les locaux ou imposer du télétravail : "des solutions qui ne font que déplacer le problème" et renvoyer la facture aux étudiants restant chez eux.

Concernant le patrimoine bâti, la situation n'est pas idéale mais le président assure que la faculté bordelaise a pris le bon train avec l'Opération campus ces dernières années. Elle a permis de rénover ces dernières environ 60 % du patrimoine et d'y installer une série de capteurs pour en piloter finement le fonctionnement. "La dévolution du patrimoine de l'Etat va nous permettre d'accélérer la rénovation des 40 % restants avec un investissement de l'ordre de 400 millions d'euros sur 20 ans", ajoute-t-il. Une somme colossale qui proviendra d'abord de la valorisation du patrimoine immobilier et foncier transféré par l'Etat depuis fin 2021.

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Réseau de chaleur et photovoltaïque

Il ne s'agit que d'une fraction des 293 bâtiments, 572.000 m2 de bâti et 187 hectares utilisés par l'Université. "Il y a un périmètre sanctuarisé dédié à nos missions d'établissement public et il y a un périmètre de 29 hectares que nous allons valoriser pour alimenter le modèle économique du périmètre public. Cela peut se traduire exceptionnellement par des cessions, comme le site de la rue Lamartine à Talence [cédé à la mairie], mais surtout via des baux à construire pour accueillir des projets immobiliers", déroule Dean Lewis. C'est le cas pour la construction d'un résidence étudiante de 400 logements à Gradignan ou encore de l'implantation de la biotech Treefrog Therapeutics, également à Gradignan.

Enfin, à plus long terme, le campus qui s'étend sur les communes de Bordeaux, Pessac, Talence et Gradignan devrait rejoindre le réseau de chaleur et déployer massivement des panneaux photovoltaïques sur ses toitures et ses parkings. Un moyen efficace de s'émanciper sur le plan énergétique assure Eric Macé :

"Aujourd'hui, 12.000 m2 de panneaux solaires sont en passe d'être installés et nous avons identifié un potentiel finançable de 30.000 m2. Le potentiel total est d'environ 100.000 m2 et avec une telle surface on couvrirait la moitié de notre consommation annuelle d'électricité ! L'objectif est devenir tendanciellement auto-consommateur voire producteur d'électricité. Ce sont des investissements de plus en plus rentables !"

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Quatre priorités pour la rentrée
  • Pour cette rentrée 2022 pour l'instant sans protocole sanitaire, Dean Lewis a fixé quatre priorités à ses équipes : des enseignements centrés sur la réussite des étudiants ; l'amplification de la recherche de premier plan et pluridisciplinaire, notamment sur les enjeux climatiques ; le bien être des étudiants et des personnels via la simplification et la qualité de vie au travail ; la transition sociétale et environnementale.

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