Les TER de Gironde éprouvés par les tempêtes et la vétusté

Entre retards et annulations en cascade, le réseau TER vit un dernier trimestre 2023 catastrophique en Gironde. La faute aux dégâts des tempêtes automnales répond ce mardi la SNCF, alors que les cheminots en grève pointent la vétusté et les sous-effectifs.
Maxime Giraudeau
La SNCF va réaliser un taux de régularité proche des 90 % en 2023 alors que le contrat qui la lie avec la Région prévoit 94 % pour 2024.
La SNCF va réaliser un taux de régularité proche des 90 % en 2023 alors que le contrat qui la lie avec la Région prévoit 94 % pour 2024. (Crédits : Agence APPA)

Il y a seulement deux raisons qui poussent les usagers à prendre le train quotidien en Gironde en cette fin d'année : soit l'amour du transport ferré soit l'absence d'alternative. Les autres délaissent le rail. Depuis la fin du mois d'octobre, la SNCF a enregistré 781 retards en Nouvelle-Aquitaine et cumule les annulations de dernière minute, surtout en Gironde. Le taux de régularité a chuté à 85 % ces deux derniers mois, soit six points de moins qu'en 2022.

Lire aussiTER : la Nouvelle-Aquitaine et la SNCF visent un tiers de passagers en plus d'ici 2030

Pour les adeptes du TER, la mobilité quotidienne est devenue une loterie : chaque jour des annonces de surpression tombent sur les cinq lignes girondines (Médoc, Arcachon, Libourne, Nord et Sud Gironde). Excédés, les usagers alertent sur une dégradation de la situation, notamment au nord de Bordeaux, qui atteint son paroxysme depuis plusieurs semaines.

La SNCF a attendu ce mardi 19 décembre pour réagir. À l'occasion d'une conférence de presse réunissant ses filiales Réseau et Voyageurs, l'opérateur a mis en cause les quatre tempêtes survenues cet automne. « L'impact que nous avons subi est plus important que celui de la tempête de 1999 », relève Jean-Luc Gary, directeur territorial SNCF Réseau Nouvelle-Aquitaine. Les 1.000 arbres tombés sur les voies et 160 chocs enregistrés en quatre semaines sur les rames sont responsables des dysfonctionnements du réseau selon son homologue de SNCF Voyageurs Hervé Lefèvre.

Annulations quotidiennes

« Les arbres ont continué à tomber après les tempêtes. Un simple de coup de vent suffisait à les faire tomber », indique-t-il. À tel point que « les ateliers de maintenance ont été submergés par le volume des chocs. » La faute aussi aux glissements de terrains et aux inondations. Au total, un quart des 200 rames régionales ont ainsi été mises hors d'état et une douzaine l'est encore aujourd'hui.

Les grèves ont aussi perturbé le trafic jusqu'au 11 décembre en Sud Aquitaine et jusqu'au 13 décembre en Poitou-Charentes. Le préavis n'a pas encore été levé autour de l'étoile ferroviaire de Bordeaux, où les tensions sont toujours très vives. Car si le retour des rames endommagées s'organise, le réseau girondin reste englué dans des calamités persistantes. Le mal n'est ni nouveau ni passager.

Il suffit de consulter les trajets du jour sur l'application SNCF Connect pour comprendre l'état de la situation : près de la moitié des trains sont annulés ce 19 décembre sur les cinq lignes girondines par manque de matériel ou de personnel. « On n'a jamais connu une période aussi critique que celle-là ! », s'inquiète Jessica Lenié, cheminote et porte-parole du CSE TER Nouvelle-Aquitaine. « La Région a augmenté le trafic mais les conditions pour y répondre ne sont pas données. On fait voyager 90.000 personnes par jour sans avoir les moyens de le faire. »

Lire aussiRER métropolitains : « Les collectivités seules ne pourront pas assurer le financement »

« Crise de vocation »

La faute à un réseau vétuste et inadapté à la croissance de la fréquentation. Résultat : le taux d'annulation grimpe autour de 7 % en Gironde, contre 5 % dans la région selon la SNCF. « Le réseau a besoin d'investissement lourd, ce n'est un mystère pour personne. Ces investissements ne donneront des résultats que dans la durée, on ne modifie pas la physionomie d'un réseau de 3.000 kilomètres en un claquement de doigt », prévient Jean-Luc Gary.

De son côté, le conseil régional a sommé la SNCF de réagir, jusqu'à menacer de ne plus s'acquitter des péages ferroviaires, déjà jugés trop chers. « Nous avons demandé et obtenu un plan de redressement puissant et immédiat, faisant appel à des renforts sur les réparations des rames endommagées, qui vise à restaurer un retour à la normale au plus tard dans la première quinzaine de janvier », écrit-il aux usagers. En attendant, la SNCF est contrainte de verser des pénalités à la Région, puisque les objectifs du contrat d'exploitation ne sont pas atteints. Elles s'élèvent cette année à 2,5 millions d'euros.

Lire aussiNiort-Saintes : cette ligne qui illustre la dégradation du réseau ferroviaire français

La main d'œuvre sous tension

Autre mal qui semble guetter l'opérateur ferroviaire : le manque de main d'œuvre. « On manque de personnel pour entretenir le réseau, les équipes de maintenance traitent des périmètres toujours plus grands », relaie Jessica Lenié. « Des personnes quittent les parcours de formation car elles prennent conscience des conditions très difficiles. On est face à une crise de la vocation. » Un constat partagé par les syndicats et la Région... mais pas par la SNCF.

« Nous avons procédé à 170 recrutements en 2023. Il n'y a pas de pénurie, on est attractif », répond Hervé Lefèvre, en évoquant les 850 conducteurs employés dans la région. « Ce qu'on n'a pas c'est une équipe pour répondre aux tempêtes exceptionnelles qu'on a connues. » Entre les dépressions météorologiques et sociales, le baromètre ne finit en tout cas pas de s'agiter. De nouvelles grèves sont annoncées dans la région ce 22 décembre, avant d'autres en janvier.

Lire aussiLe RER métropolitain bordelais inaugure son premier nouveau maillon au Bouscat

Maxime Giraudeau

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.