Elle avait annoncé un nouveau tour de table dès 2023, c'est désormais chose faite. Un peu plus d'un an après une levée de fonds d'amorçage de 2,2 millions d'euros, la société pessacaise Ilasis a levé 4,4 millions d'euros pour financer le lancement de la production de son dispositif médical laser dédié à l'opération de la cataracte et son développement commercial en Europe.
« La cataracte est la première cause de cécité dans le monde et la chirurgie la plus répandue avec plus de 30 millions d'opérations par an », rappelle François Salin, président d'Ilasis. « Or, la première étape de cette chirurgie, qui consiste à découper la capsule antérieure du cristallin, est une étape clé, très difficile à réaliser qui nécessite une longue courbe d'apprentissage pour les chirurgiens. »
L'instrument manuel Rx a précisément été développé pour effectuer une découpe par laser femtoseconde prédictible et reproductible, en sécurisant et en simplifiant la procédure.
« Il ne remplace pas le médecin ! », prévient toutefois François Salin. « Nous sommes plutôt sur un concept d'homme augmenté et en même temps d'innovation frugale. Notre machine automatise un geste compliqué. »
L'intégration de la machine, baptisé Rx, sera réalisée en interne. « Nous nous appuyons sur deux acteurs pour la fabrication de sous-ensembles : la mécanique à Pau et l'électronique à Vire en Normandie. Quant à nous, nous construisons la partie laser. Il faut compter quinze jours pour la fabrication d'un système complet puis nous réalisons les tests. » Le laser sera vendu sous la marque Helix Surgical.
Investigations cliniques terminées
À ce stade, 78 patients ont été traités avec ce laser dans le cadre des investigations cliniques menées en vue du marquage CE. Les essais ont été effectués en France par le Dr Lignereux au sein de la Clinique Sourdille Atlantique, du groupe Elsan, à Nantes.
« Ce médecin expérimenté qui, techniquement, n'a pas besoin de laser pour réaliser ce type d'opération a reconnu que cela permettait d'évacuer du stress. Il a aussi compris qu'il pouvait réorganiser l'ensemble de l'opération. Le geste effectué avec le laser ne nécessite pas d'être dans un bloc opératoire ce qui est très intéressant du point de vue de l'industrialisation de cet acte dans le bon sens du terme. Le patient n'entre dans une pièce stérile que pour la suite de l'opération mais pour un temps plus limité », explique François Salin.
Marquage CE en cours
À ce stade, le dossier de certification de Rx est en cours d'examen, le marquage CE étant attendu pour l'automne 2023, suivi par une homologation auprès de la FDA (Food and drug administration) aux Etats-Unis début 2024. Les premières ventes en Europe sont prévues pour le début d'année 2024.
Le modèle économique reposera sur la vente et la maintenance du dispositif médical. « Nous gagnerons très peu d'argent sur le système qui sera vendu quatre fois moins cher que ce qui existe aujourd'hui sur le marché et coûte 400.000 euros », précise François Salin. Ilasis compte en revanche dégager des bénéfices sur les consommables et le droit d'utilisation pour chaque opération. « Notre ambition est de mettre un maximum de machines sur le marché pour démocratiser la chirurgie de la cataracte. » Objectif : en vendre deux ou trois cette année, une trentaine en 2024 et doubler l'année suivante.
L'entreprise cible les cliniques privées qui réalisent, en France, 80 % des opérations de la cataracte, mais elle ne réalisera pas de vente en direct. « Construire une force de vente capable d'aller frapper aux portes de toutes les cliniques de différents pays nous semblait hors de portée. » Elle passera donc par des distributeurs avec qui elle est en train de signer en France, en Allemagne, en Italie et en Espagne. Elle attaquera ensuite le marché américain, ce qui nécessitera une nouvelle levée de fonds bien plus conséquente dans un an. « De l'ordre de 15 à 20 millions d'euros », avance François Salin.
Des business angels à 80 %
Dans le cadre de la levée de fonds qu'elle vient de boucler, des business angels ont apporté 80 % de la somme complétée par Irdi Capital et le fonds régional Naco. Parmi les investisseurs privés qui ont participé de façon importante à cette opération figure Philippe du Mesnil. Ancien dirigeant de Ceva Santé Animale à Libourne, il souligne que « ce projet réunit toutes les conditions pour être un beau succès régional pour la Nouvelle Aquitaine : l'expertise et l'expérience d'un dirigeant local, un environnement scientifique porteur en matière d'optique à Bordeaux et un support financier régional solide avec l'intervention d'un investisseur régional. »
Ilasis qui compte aujourd'hui 18 collaborateurs devront atteindre la vingtaine en fin d'année, la trentaine fin 2024. « L'idée, c'est de grossir gentiment. Nous sommes très frugaux », rappelle François Salin, dont les équipes sont installées à Pessac sur l'ancienne friche libérée par Thales en 2017.
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