Distribution : les supérettes rurales d'Api partent en campagne

L'enseigne de supérettes en libre-service Api vise l'ouverture de 100 nouveaux points de vente en 2024 sur une diagonale des Landes à la Normandie. Soutenue par la forte demande des communes rurales, la marque charentaise détaille, étude à l'appui, les raisons du succès de son modèle.
Maxime Giraudeau
Api a noué un partenariat avec La Poste pour adosser des points relais aux supérettes automatiques.
Api a noué un partenariat avec La Poste pour adosser des points relais aux supérettes automatiques. (Crédits : Pickup / Roger Savry)

De 15 à 65 lieux de vente en à peine un an. Dans les campagnes du Centre-Ouest, il y a un mouvement qui se multiplie encore plus vite que le vote Rassemblement national mais en misant sur la proximité et l'accessibilité plutôt que sur les peurs. Des mobil-homes convertis en supérettes libre-service essaiment dans les villages dépourvus de commerce. À l'intérieur, des clients autonomes naviguent dans 700 références de produits, principalement issus du distributeur Carrefour.

Api fait mouche. La marque charentaise qui a ouvert en 2022 vient de célébrer sa 65e ouverture et une présence dans neuf départements. Elle vise carrément 100 inaugurations pour 2024. Presque facile quand on dit avoir déjà 130 implantations signées. Les maires de communes rurales éloignées des grandes surfaces s'arrachent le concept, comme à Gauriaguet au nord de la Gironde, qui accueille une supérette depuis août 2023. A date, l'enseigne annonce 80.000 comptes client et 40 emplois créées.

Le concurrent hors-course

L'engouement a quelque peu saisi le trio dirigeant de la jeune société. Si tout semble leur sourire, les comparses restent avares en chiffres. Rien sur les derniers résultats financiers ni sur les investissements ou la rentabilité du modèle économique. Dans un secteur où la concurrence entre les grandes enseignes se fait à coups de prix tirés vers le bas, la discrétion est culturelle. « Nous ne sommes pas encore rentables mais notre modèle économique doit nous permettre d'atteindre la rentabilité d'ici deux à trois ans », projette Julien Nau, l'un des cofondateurs, qui a mené plusieurs levées de fonds.

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L'entreprise revendique un modèle complémentaire de celui des grandes surfaces. Mais au final ses marges nettes sont, semble-t-il, proches de celles-ci, entre 1 et 2 %. « Le but n'est pas de battre la grande distribution sur ce chiffre-là, à terme on sera autour de ça. On fait quelque chose d'innovant et personne ne croyait que la ruralité pouvait être un terrain de jeu pour une activité économique à impact. C'est ça que l'on défend. Pour une rentabilité maximum, ce n'est pas Api qu'il faut venir chercher », fait remarquer le dirigeant.

N'empêche que le contexte difficile de l'investissement dans les startups comme le récent échec de son lointain concurrent Boxy en région parisienne a de quoi susciter quelques questionnements autour du dessein d'Api. Au printemps, Boxy a indiqué fermer ses lieux de vente en libre-service en région parisienne et se réorienter vers la distribution dans le monde professionnel. Pour esquiver les doutes, Api a dégainé son observatoire de la ruralité le 28 juin, une étude réalisée par OpinionWay pour tirer le profil de la consommation en milieu rural.

Vers du multi-services ?

Où l'on apprend qu'avec 16.800 communes sans aucun commerce ou service de proximité en France, ce sont plus de 11 millions de personnes qui se trouvent à plus de 20 minutes aller/retour d'un supermarché. Or, 75 % du budget alimentaire de ces ruraux est dépensé en grande surface. D'où le service essentiel - et le grand intérêt économique pour Api - de proposer des lieux dans ces zones grises de la consommation. Selon l'étude, 70 % des achats réalisés dans ces supérettes connectées le sont par des clients résidant à moins de cinq kilomètres.

Pas rassasiée et voyant le besoin de proximité, l'enseigne va aller au-delà de l'alimentaire. Une trentaine de supérettes accueilleront un point de relais colis de La Poste d'ici la fin de l'année. Un premier partenariat qui pourrait en nourrir d'autres. « La supérette c'est la première brique, on souhaite en implanter d'autres car tout ce qu'on apporte ne peut être qu'un plus. On veut travailler sur des services élémentaires et innovants », motive Julien Nau. « On connaît nos forces et il ne faut pas se disperser non plus, tempère Antoine Tétard, responsable stratégie. Demain, si on pouvait avoir un cabinet médical et un marché de producteurs dans chaque village ce serait super. Mais on ne pourra pas tout faire ! »

Pour la proximité, l'enseigne a déjà fait beaucoup puisque selon ses estimations, ce sont 2,7 millions de kilomètres qui ont été évités grâce aux achats générés. À relativiser tout de même puisque toutes les attentes des clients ne sont pas comblées chez Api, les obligeant toujours à effectuer une partie de les courses courantes dans d'autres lieux de consommation. La voie du retour des commerces en campagne est en tout cas bien ouverte.

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Maxime Giraudeau

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Commentaires 2
à écrit le 02/07/2024 à 12:35
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Dans certaines campagnes je vois déjà des distributeurs de pain et autres produits alimentaires , ces nouveaux concepts viennent suppléer les commerçants ambulants et autres épiceries buvettes disparus dans les années 90.

le 03/07/2024 à 11:15
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Un manque total de vie dans cette démarche, plutôt que de payer correctement les gens on préfère les machines tirant toujours plus l'humanité vers le bas. Nos dirigeants sont NULS.

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