Comment Mayam convertit la grande distribution au vrac sur un marché à la peine

En difficulté depuis 2020, le marché du vrac et du réemploi des contenants devrait à nouveau se développer avec les nouvelles obligations prévues d'ici 2030. Pionnier du secteur, Mayam (ex Vracoop) lève 450.000 euros pour déployer son logiciel dédié au vrac dans 500 supermarchés d'ici deux ans. De quoi multiplier par douze le chiffre d'affaires de cette entreprise basque.
Le rayon vrac d'un magasin Carrefour équipé de la solution de la startup basque Mayam.
Le rayon vrac d'un magasin Carrefour équipé de la solution de la startup basque Mayam. (Crédits : Mayam)

52 % des foyers français souhaiteraient trouver plus de références accessibles en vrac, c'est-à-dire sans emballage à usage unique. C'est particulièrement vrai pour les produits d'épicerie (69 %), d'entretien (53 %), et d'hygiène beauté (41 %), selon le cabinet NielsenIQ. Mais si la consommation de vrac en France c'est deux millions d'acheteurs réguliers pour 850 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2022, ce total a chuté de -23 % sur un an pour retomber à son niveau de 2018. Ce marché a en effet été largement freiné par le Covid - puisque seulement 32 % des ménages disaient acheter du vrac en 2022 contre 40 % avant la crise sanitaire - avant d'être pénalisé par les difficultés des enseignes bio. Ces magasins, qui tiraient traditionnellement le marché du vrac, ont été nombreux à fermer depuis deux ans sous le coup de l'inflation.

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Pas de quoi décourager Mayam (ex Vracoop) dont la solution est déjà utilisée par 250 épiceries et magasins spécialisés. « Le vrac qui a été associé au départ aux produits de qualité, bio et locaux a beaucoup souffert ces dernières années mais aujourd'hui l'offre est bien plus large et le marché redémarre », assure ainsi Sébastien Leflond, le fondateur et dirigeant de cette Esus (entreprise solidaire d'utilité sociale) installée à Saint-Jean-de-Luz depuis sa création en 2017. « Toutes les enseignes bio et vrac avec qui nous travaillons constatent que la mauvaise passe est derrière eux et que la consommation repart. La crise agricole actuelle a peut-être un impact sur la manière de consommer. »

Le QR code, meilleur ami du vrac ?

Pionnière du secteur du vrac et du réemploi des contenants, Mayam s'appuie sur les QR codes. Apposés sur les bacs de distribution et les étiquettes, ils donnent au client toutes les informations nécessaires sur le produit vendu en vrac pour en garantir la traçabilité : origine, qualités nutritionnelles, temps de cuisson, date limite de consommation et date de mise en rayon. « Nous éditons également un second QR code à apposer de manière permanente sur le contentant réutilisable du client pour lui simplifier la tâche à la pesée, lui permettre également d'accéder à toutes les informations sur le produit et pourquoi pas déployer des programmes de fidélité pour récompenser le réemploi », précise Sébastien Leflond, qui a déjà déployé 1,5 million de ces différents QR code.

Mayam

Les QR codes de Mayam sur des silos de distribution en vrac (crédits : Mayam).

Avec cette offre en Saas (logiciel sur abonnement), Mayam, qui compte seulement cinq salariés, est rentable depuis son premier exercice pour 500.000 euros de chiffre d'affaires en 2023. Mais le chef d'entreprise a décidé d'appuyer sur l'accélérateur pour accompagner le nouvel élan promis à ce mode de consommation. Car Sébastien Leflond n'est pas juste un optimiste, il sait que la loi « Climat et résilience » impose à tous les commerces de détail de plus de 400 m2 de consacrer d'ici 2030 au moins 20% de leur surface à la vente de produits en vrac. Un véritable boulevard pour Mayam à condition d'être au rendez-vous.

Convertir 500 magasins en deux ans

C'est ce qui a permis au dirigeant de 37 ans de réunir près de 450.000 euros auprès de divers acteurs et investisseurs dont Barakinvest, la Région Nouvelle-Aquitaine, Nouvelle-Aquitaine amorçage, BNP, France active et Crédit agricole. « L'enjeu n'est plus de faire de la R&D mais bien d'accompagner le déploiement à grande échelle de notre logiciel en prenant en compte les délais un peu long de signature avec la grande distribution », ajoute Sébastien Leflond.

Déjà présente dans 15 supermarchés, dont l'un des plus grands E. Leclerc de France à Saint-Médard-en-Jalles (Gironde), mais aussi chez Carrefour, Auchan ou encore Biocoop, Mayam voit bien plus grand. D'ici deux ans, les Basques tablent sur le branchement de 500 magasins dans toute la France, de quoi multiplier par douze le chiffre d'affaires de la startup qui atteindrait six millions d'euros fin 2025.

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Élargir la gamme

De quoi augurer d'un changement profond de nos modes de consommation ?

« L'objectif c'est bien de déployer le vrac sur les quatre segments des supermarchés - le discount, la marque de distributeur, la marque nationale et le bio - et de couvrir l'alimentation mais aussi les produits d'hygiène et d'entretien où on observe de très bons taux de recharge des clients », anticipe Sébastien Leflond.

Et le dirigeant, convaincu des bienfaits du vrac depuis plus de dix ans, d'avancer ses arguments : « En réduisant les emballages à usage unique, le vrac permet de gérer à la fois la fin du mois et la fin du monde puisque de nombreuses références en vrac sont significativement moins chères notamment les épices ou l'épicerie sèche ». Mayam, qui vise le leadership du marché tricolore, s'attend logiquement à une concurrence croissante de solutions frontales ou complémentaires telles que celles de Bric à Vrac, Woodland Garden ou de grandes entreprises de services numériques. Une cinquantaine d'acteurs se sont réunis l'an dernier dans l'initiative « En avant vrac » qui vise à développer des standards harmonisés au niveau national.

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Commentaire 1
à écrit le 16/04/2024 à 9:36
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Ben disons que naturellement le consommateur s'attend à des prix plus bas du fait justement qu'il n' y ai aucun contenant et aussi afin d'apporter une forme de valorisation au principe. Les amandes émondées sont au même prix que les amendes non émond...

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