Avec l'inflation, les PME de l'alimentaire perdent du terrain dans les grandes surfaces

L'Association des industries alimentaires de Nouvelle-Aquitaine (Aria) a tenu son assemblée générale ce 24 mai à Pessac. L'occasion d'évoquer les conséquences de l'inflation sur les PME de l'agroalimentaire, qui misent beaucoup sur la valorisation de l'origine locale de leurs produits pour contrer la déconsommation.
Maxime Giraudeau
(Crédits : Reuters)

-4 %. C'est la baisse des volumes consommés dans les commerces alimentaires en France en 2023 selon l'Insee. Et à ce jeu de ralentissement impulsé par l'inflation, les marques distributeurs l'emportent sur les produits des PME. C'est le décryptage pragmatique présenté par Emily Mayer, directrice des études de consommation pour Circana, devant un parterre de représentants d'entreprises agroalimentaires. Ce 24 mai à Pessac, l'Aria Nouvelle-Aquitaine, qui fédère 250 PME régionales pour 2,8 milliards d'euros de chiffre d'affaires, tenait son assemblée générale dans un contexte de déconsommation dans la grande distribution.

« On n'avait pas vu les marques distributeurs progresser depuis 10 ans, décrypte Emily Mayer. Les Français se détournent des marques et des produits du "bien consommer", comme les labels équitables, la bio, qui accusent une baisse des ventes de -11 %. C'est tout à fait inédit car ce ressort qui est aujourd'hui un peu cassé tirait la croissance de la consommation. »

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L'origine, valeur refuge

Mais alors que les PME régionales auraient tout pour s'inquiéter, une valeur refuge demeure : l'origine. « Les Français sont fous de ça ! On parle d'agro-bashing mais on voit que les produits locaux sont beaucoup plus gage de confiance que les produits marketés "sans" ou que le vrac. Le critère de l'origine local est le seul à pouvoir transcender les variables socio-économiques dans les choix des consommateurs. Et pourtant, la grande distribution n'est pas bien positionnée sur ce sujet », juge l'analyste.

D'autant moins avec la crise de l'inflation, qui a atteint son pic il y a maintenant un an et demi, source d'une consommation tournée vers les produits à bas prix et davantage importés. Ce qui a eu pour conséquence de restreindre la place accordée aux produits locaux par les grandes surfaces. C'est pour éviter d'être évincé des rayons par les marques distributeurs que l'Aria régionale vient de lancer la nouvelle marque « Signé Nouvelle-Aquitaine ». Une étiquette qui va distinguer les produits dont l'ingrédient principal est issu de la région, parmi une quarantaine d'entreprises déjà intégrées dans la démarche.

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En Nouvelle-Aquitaine, les produits des PME pèsent 13 % dans l'offre alimentaire de la grande distribution, en adéquation avec la moyenne nationale de 12,9 %. Mais certaines régions font mieux comme la Bretagne ou la Corse qui dépassent les 15 % grâce à la force de marques locales et l'attachement culturel. Les industriels néo-aquitains veulent grignoter des parts de marché. « Le salut des PME viendra de la défense du local. Et il faut expliquer aux distributeurs qu'il ne doivent pas couper les assortiments. On communique à la fois sur la marque et le contenu mais on communique aussi auprès des distributeurs sur la largeur de gamme que l'on peut proposer », détaille Véronique Hucault, déléguée générale de l'Aria Nouvelle-Aquitaine.

Des négociations annuelles ou perpétuelles ?

Un bras de fer avec les grandes surfaces qui s'exprime aussi sur le front législatif. Dans le cadre des travaux parlementaires autour de la nouvelle version de la loi Egalim, les Aria de Normandie, Bretagne et Nouvelle-Aquitaine ont formulé des recommandations. Avec une préoccupation majeure : maintenir une date butoir pour les négociations annuelles sur les prix et les volumes alors que la grande distribution milite pour des négociations perpétuelles. « On souhaite maintenir cette date butoir parce que si on négocie tout au long de l'année ça va nous enlever des perspectives de développement et ça risque de niveler les marchés par le bas », souligne Stéphane Douence, président de l'Aria Nouvelle-Aquitaine.

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« L'amont agricole a encore plein de difficultés et Egalim n'a pas tout résolu, mais on est à peu près tous d'accord pour dire qu'Egalim est une bonne loi. Il y a des points très importants à conserver comme l'encadrement des promotions et la date butoir des négociations. On est attachés cette date butoir car dans les PME les gens sont polyvalents et ne passent pas leur vie à faire des négociations ! », ajoute la déléguée générale.

Les industriels craignent aussi que la hausse des matières premières industrielles (énergie, emballages, équipements...) ne soit pas complètement répercutée sur les prix de vente en grande surface. Ce qui les oblige à trouver de nouveaux équilibres et à mutualiser certains achats de production. Une coordination qui paraît intuitive et encouragée par un système régional d'« agrotarifs » porté par l'Aria mais qui révèle dans les faits des bénéfices limités, observent les représentants de la filière. Jouer collectif sera pourtant nécessaire pour peser face aux distributeurs qui ont l'avantage sur les prix.

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Maxime Giraudeau

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