Centrales solaires : partager la valeur pour renforcer leur acceptabilité

La question du partage du foncier et de la valeur des projets photovoltaïques, de façon à ne pas alimenter les tensions entre territoires ruraux et urbains, était au cœur de la dernière table ronde du Bordeaux Solar Summit, qui s'est tenu ce mardi 25 juin.
De gauche à droite : Maxime Giraudeau, journaliste à La Tribune, Maud Gaide, directrice solaire adjointe du développeur Q Energy, Claudine Bichet, adjointe au maire de Bordeaux et vice-présidente en charge du climat et de la transition énergétique de Bordeaux Métropole et Morgane Bénard, responsable du pôle énergie Nouvelle-Aquitaine du réseau de coopératives Enercoop.
De gauche à droite : Maxime Giraudeau, journaliste à La Tribune, Maud Gaide, directrice solaire adjointe du développeur Q Energy, Claudine Bichet, adjointe au maire de Bordeaux et vice-présidente en charge du climat et de la transition énergétique de Bordeaux Métropole et Morgane Bénard, responsable du pôle énergie Nouvelle-Aquitaine du réseau de coopératives Enercoop. (Crédits : Quentin Salinier)

Implanter de grands parcs photovoltaïques dans les espaces ruraux pour subvenir à la consommation des agglomérations et des industries... l'équation a de quoi alimenter les dissensions entre territoires ruraux et urbains. « L'accessibilité sociale qui repose sur le fait, selon les sondages, que 80 % de la population est favorable aux énergies renouvelables, notamment le solaire, diffère de l'accessibilité locale, avec localement des points de blocage qui peuvent apparaître autour de certains projets. On l'a vu en Gironde avec le projet Horizeo », décrypte Claire Bordenave, membre du Conseil économique, social et environnemental (Cese) et économiste des énergies renouvelables. Or l'acceptabilité est une dynamique sociale, un processus qui démarre dès la conception du projet, quand il peut encore évoluer, mais aussi au cours de son développement et de son exploitation.

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L'un des points d'achoppement se cristallise autour d'une course au foncier. « Il y a effectivement une certaine concurrence avec des appels à manifestations d'intérêt lancés par des collectivités pour du foncier public ou semi-public ou même auprès de grands propriétaires privés pour reconvertir des friches. Il devient de plus en plus compliqué d'avoir accès à des parcelles intéressantes, proches de points de raccordement, notamment dans les régions du sud de la France », constate Maud Gaide, directrice solaire adjointe du développeur Q Energy.

Les campagnes, fermes énergétiques des villes ?

Dans ce contexte, cibler des terrains déjà artificialisés peut fournir des pistes, même si les solutions ne sont pas toujours simples à mettre en œuvre. La ville de Bordeaux réfléchit par exemple à installer des panneaux solaires sur la base sous-marine et Bordeaux Métropole au-dessus d'un boulevard urbain. « La base sous-marine est un site historique et il nous a fallu composer avec les architectes des bâtiments de France : pour ne pas rester prisonnier d'un patrimoine, ces référentiels devraient évoluer. Quant aux routes, l'installation de panneaux photovoltaïques soulève de nombreuses questions économiques, techniques et de sécurité, mais nous devons au moins essayer d'étudier si ces projets sont viables car il nous faut au maximum exploiter les surfaces artificialisées », relève Claudine Bichet, adjointe au maire de Bordeaux et vice-présidente en charge du climat et de la transition énergétique de Bordeaux Métropole.

Reste qu'avec une ambition de faire du solaire la première énergie renouvelable du territoire en 2050, miser sur les seuls sols artificialisés ne suffit pas. « Nous allons devoir créer des coopérations fortes, de préférence avec nos territoires partenaires voisins. C'est à l'échelle territoriale que l'on peut véritablement créer un projet qui fait du sens, qui fait que les acteurs comprennent le projet et y adhèrent », poursuit Claudine Bichet.

Pour Morgane Bénard, responsable du pôle énergie Nouvelle-Aquitaine du réseau de coopératives Enercoop il faut cependant prendre garde à ce que « les zones rurales qui ont déjà l'impression d'être les fermes alimentaires des grandes villes ne se vivent pas en plus comme leurs fermes énergétiques ! »

Multiplier les retombées économiques

Afin d'éviter les crispations, il est donc essentiel d'associer les acteurs locaux. Pour Maud Gaide, c'est d'ailleurs avant tout de transparence sur ce qu'ils peuvent retirer des projets que les territoires ont surtout besoin. Parmi les pistes à envisager : des réductions de prix sur sur la consommation, l'organisation de collectifs d'auto-consommation locale ou la promotion de financements participatifs permettant aux habitants d'être partie prenante du projet.

Morgane Bénard insiste cependant sur la nécessité d'associer les acteurs locaux dès la phase de conception et de financement pour faire en sorte qu'ils captent une partie de la valeur créée par la vente de l'électricité. « Une étude de l'Ademe [Agence de l'environnement et de maîtrise de l'énergie, ndlr] et du mouvement de promotion d'énergies renouvelables Énergie partagée montre que tous les projets dont la gouvernance et le financement sont à la main des habitants et des collectivités apportent au territoire deux à trois fois plus de retombées économiques qu'un projet classique », détaille-t-elle.

Au-delà des externalités financières directes, « une des grandes leçons du Cese est que davantage que la nature des décisions, c'est la façon dont elles sont prises qui les rend acceptables sur le long terme et permet aux citoyens de se les approprier », conclut Claire Bordenave.

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Commentaire 1
à écrit le 29/06/2024 à 8:55
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La lutte contre l'obscurantisme financier serait beaucoup plus efficace, les gens sont cohérents c'est juste repus à obéir à une classe dirigeante intellectuellement éteinte, même pas assoupie, totalement et définitivement éteinte et il est là le pro...

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