Élaboré depuis le printemps dernier, le guichet du plan d'arrachage du vignoble bordelais à hauteur de 6.000 euros l'hectare, a fermé ses portes le 20 décembre. Le bilan définitif de cette première vague s'établit à 8.000 hectares, répartis à parts égales entre les deux enveloppes de renaturation et de diversification. Des demandes déposées par environ un millier d'exploitations viticoles au titre d'un arrachage sanitaire qui vise d'abord à réduire la surproduction du vignoble. Au total, ce sont 1.500 hectares de moins que le budget disponible qui était calibré sur le volume des pré-inscriptions enregistrées au mois de juillet dernier. Une baisse qui peut s'expliquer par les conditions drastiques prévues par le plan d'arrachage et par le montant de la subvention jugé insuffisant par le collectif Viti33.
« Il y a eu une forme de surbooking en juillet, on le savait, et certains viticulteurs ont ajusté leurs demandes après avoir pris connaissance des détails du plan. Est-ce que 6.000 euros par hectare c'est suffisant ? Est-ce que les contreparties sont idéales ? Certainement pas mais elles sont là parce qu'on a réussi à obtenir un plan d'aide et parce qu'il s'agit d'argent public. Il y a un an, il n'y avait rien du tout, c'est ça la réalité ! », réagit Bernard Farges, le vice-président du CIVB (conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux).
Le viticulteur rappelle également que « l'arrachage de 8.500 hectares en un an, c'est un effort considérable pour le vignoble ! Le dernier plan d'arrachage en 2006-2007 c'était 4.500 hectares en trois ans. » 8.000 hectares, par rapport aux 108.000 hectares exploités actuellement dans le vignoble bordelais, ça représente 7,5 % des surfaces mais autour de 10 % si on exclut les 20 % des plus grands châteaux du bordelais qui n'ont aucun problème pour vendre leurs vins et ne sont donc pas réellement concernés par la problématique de l'arrachage.
Un coefficient régulateur
Dans le détail, la première enveloppe de 19 millions d'euros prévue par le CIVB pour accompagner la diversification des exploitations viticoles vers d'autres cultures, sera consommée entièrement par les 500 demandes enregistrées. Ce qui imposera même d'appliquer un coefficient régulateur sur les surfaces retenues. En clair, pour que chaque hectare puisse être indemnisé à hauteur de 6.000 euros, seulement 75 % des hectares demandés seront subventionnés.
La seconde enveloppe de 38 millions apportés par l'État en échange d'un engagement de renaturation des parcelles pendant au moins 20 à 30 ans a enregistré 700 demandes. Mais au regard des volumes demandés, elle n'a pas été consommée intégralement cette année. Il restera donc du budget pour financer environ 2.000 hectares supplémentaires sur une deuxième campagne prévue à l'automne 2024.
Les travaux débuteront en janvier
Le calendrier de ce plan d'arrachage sanitaire est rapide. Une fois les autorisations de commencement de travaux obtenues auprès de la préfecture, les premiers travaux d'arrachage doivent débuter dans le courant du mois de janvier pour s'achever, au plus tard, fin mai 2024. Les vignerons pourraient toutefois se heurter un goulot d'étranglement s'agissant des capacités humaines et mécaniques d'arrachage disponibles au printemps. D'autant que des viticulteurs peuvent également décider d'arracher des parcelles de vignes en dehors du dispositif d'arrachage sanitaire prévu par l'État et le CIVB.
Car la situation est extrêmement délicate pour de nombreux viticulteurs en panne de trésorerie et sans débouchés commerciaux suffisants pour leur production. « Face à la crise économique profonde, un grand nombre d'exploitations du vignoble de Bordeaux, aux profils multiples, se trouvent dans des situations très difficiles et dans l'incapacité, matérielle et financière de poursuivre l'entretien de leur vignoble », résumait le Syndicat des Bordeaux début décembre. Le CIVB parle lui de « crises successives et conjoncturelles - climatiques, sanitaires, géopolitiques - et d'une crise plus profonde qui s'est installée dans le temps, résultat d'un déséquilibre entre notre offre et la demande. »
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