Nicolas Doze : "Les Français sont la matière grise la plus étonnante de la planète"

Libéral brut de décoffrage, Nicolas Doze trouve que "les Français sont la matière grise la plus étonnante de la planète". Nous publions ce mercredi le compte-rendu de la première partie de la soirée organisée hier mardi par le Crédit agricole d’Aquitaine, dont Nicolas Doze, journaliste économique et éditorialiste à BFM Business, était le premier invité.
Nicolas Doze sur grand écran hier mardi au Casino théâtre Lucien Barrière de Bordeaux

C'est au Casino théâtre Lucien Barrière de Bordeaux que le Crédit agricole d'Aquitaine a organisé, en partenariat avec La Tribune, son rendez-vous annuel avec les sociétaires. Rémi Garuz, président de la banque régionale coopérative, et Jack Bouin, son directeur général, avaient invité en première partie Nicolas Doze, le journaliste économique vedette de BFM Business, pour une conférence intitulée "Et maintenant ? Quel futur pour l'économie dans le nouveau contexte économique français et international".

Nicolas Doze, qui a bien précisé qu'il est journaliste économiste et non pas économiste, est notamment l'animateur des émissions "Les experts" et "Doze le nettoyeur". Autant dire qu'il n'était pas venu à Bordeaux pour beurrer les sandwichs en écoutant une sonate de Bach. Après avoir averti le public qu'il lui laisserait des raisons d'espérer à la fin de son intervention, Nicolas Doze a observé que c'était une bonne idée pour une banque d'organiser son rendez-vous annuel à une dizaine de mètres des machines à sous d'un casino... Sans vraiment expliquer pourquoi : le ton était donné.

Une année 2016 exceptionnelle

"Quand on n'a pas d'argent on le vole et c'est l'inflation" a-t-il ensuite enchainé en ardent défenseur du capital, pour ouvrir le premier volet de son intervention consacré au Brexit et plus particulièrement aux multiples aspects exceptionnels qui ont façonné l'année 2016. "En 2016 l'Arabie Saoudite a émis de la dette publique, c'est du jamais vu !" a-t-il annoncé sans oublier d'évoquer "les leçons de libre échange" administrées au nouveau président américain Donald Trump par Xi Jinping, président de la République populaire de Chine et patron du Parti communiste chinois... Deux exemples parmi beaucoup d'autres, qui font aussi de l'élection d'Emmanuel Macron à la présidence de la République française une surprise de taille estampillée 2016, avec l'effondrement de deux grandes forces politiques traditionnelles incarnées par le PS et LR, devenues "des champs de ruines".

Avec le Brexit le Royaume-Uni pourrait, malgré son pragmatisme légendaire, avoir beaucoup à perdre en particulier si l'Ecosse pro-Européenne fait sécession et brise l'union britannique. Concernant le futur économique Nicolas Doze a confronté deux France : celle qui perd, avec la stagnation du produit intérieur brut (PIB), le déclin industriel ou encore la permanence d'un chômage de masse, et celle qui gagne, avec la remontée de la compétitivité des entreprises, la tonicité de la démographie, les startups championnes des levées de fonds ou encore la montée en puissance des énergies vertes, grâce à la technologie.

3 % de croissance, Graal inaccessible

"François Hollande disait que ça va mieux et il avait raison" a relancé le journaliste en égrenant en particulier les 200.000 créations nettes d'emplois, la dynamique des entreprises et un début de relance dans le BTP. Après avoir posé que le modèle social français "n'est pas soluble dans la nouvelle économie" Nicolas Doze s'est employé à démontrer pourquoi il fallait "arrêter avec l'égalitarisme" et développer "l'égalité des opportunités". Si l'on a bien compris l'orateur, pour que tout rentre dans l'ordre (économique) sans réforme de fond il faudrait que la France réalise une croissance annuelle moyenne de 3 % de son PIB, contre 1,1 % l'an dernier. Mais comme cet objectif est devenu hors de portée il faut s'adapter, ainsi s'impose l'adoption de la flexisécurité.

"On ne protège plus les emplois mais les individus" a illustré l'orateur avant de faire un saut provocateur à l'époque de la Révolution française. Expliquant que la loi Le Chapelier, qui interdisait à la fois les corporations d'Ancien Régime, mais aussi les syndicats ou le droit de grève pour les ouvriers et les paysans, incarnait un courant de la gauche, "celle des Feuillants (courant révolutionnaire Jacobin devenu autonome avant d'être brisé par les Girondins pour trahison et dont Isaac Le Chapelier était proche -NDLR) qui est en train de s'installer en France".

Trois dossiers explosifs pour Macron

Après avoir fait le parallèle entre le programme d'Emmanuel Macron et ceux de Tony Blair et Gerhard Schröder, Nicolas Doze a pointé le chômage, la formation professionnelle et la retraite comme autant de "dossiers explosifs" qui risquent de dynamiter le quinquennat du nouveau président en particulier parce que les réformes prévues, si elles aboutissent, feront sauter le paritarisme.

Après avoir fait le tour de "la nouvelle molécule Trump" et du plan de la Chine populaire, qui veut devenir une super puissance industrielle d'ici 2049, Nicolas Doze est revenu sur les conséquences de la numérisation, avec l'avènement de la robotique via les Gafa (Google, Apple, Facebook, Amazon). Citant pour la deuxième fois l'ex-candidat socialiste à la présidentielle, Benoît Hamon, qui avait le projet de taxer les robots, le journaliste de BFM Business a vu dans cette proposition une résurgence malthusienne. "Faire payer les robots, tout n'est pas faux dans cette idée, mais les robots ne paieront jamais. C'est comme s'il fallait en finir avec les canalisations pour ressusciter le métier de porteur d'eau" a-t-il jugé.

Captain America peut aller se rhabiller

Opposant "les athées", qui contestent la portée réelle de la révolution numérique en tant que nouveau champ structurant pour le développement économique, et "les croyants", qui voient apparaître un nouveau monde, mais avec une croissance faible, Nicolas Doze a posé la question du revenu universel, citant à nouveau Benoît Hamon, tout en évoquant la version ultra libérale de ce mécanisme cher à l'économiste Milton Friedman, où s'enchevêtrent "impôts positif et négatif". Admettant que l'ubérisation est potentiellement dangereuse pour la société, avec "des emplois à deux ou trois euros de l'heure et des salariés auxquels les banquiers refuseront de prêter", un problème au cœur "des réflexions de Benoît Hamon" a-t-il souligné, Nicolas Doze a estimé aussi que c'était le moyen de se faire des vies à la carte.

Les Gafa pèsent financièrement davantage que le CAC 40 et le Dax (l'indice boursier allemand -NDLR) mais "la France a survécu à des menaces autrement plus lourdes" a temporisé le conférencier, n'hésitant pas poursuivre par "les Français sont la matière grise la plus étonnante de la planète : nous sommes les premiers en mathématiques et en sciences de la vie". Et pas question de s'y tromper, derrière toutes les révolutions technologiques majeures, en particulier aux Etats-Unis, "il y a un Français qui s'est faufilé" : de l'invention du disque dur à WannaKey, l'antidote contre le virus WannaCry (pour faire très court), qui a déferlé il y a quelques semaines sur la planète, on trouve des Français... Alors oui il reste forcément de l'espoir, même si le match économique du nouveau quinquennat ne fait que commencer et que la partie n'est pas gagnée d'avance...

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