Les agriculteurs aquitains l'arme au pied

Après une mauvaise année 2013, les agriculteurs aquitains sont en conflit avec les services de l’Etat sur la question des nitrates.
Les produits des grandes cultures sont touchés par la baisse des prix.

Lors de la conférence de presse de rentrée de la Chambre régionale d'agriculture d'Aquitaine, ce jeudi matin, le président de la chambre, Dominique Graciet, a tout d'abord rappelé les prévisions du réseau d'information comptable agricole (Rica) sur l'évolution du revenu agricole 2013. Présentées lors de la dernière réunion de la commission des comptes de l'agriculture nationale, le 1er juillet dernier, ces prévisions font état d'un effondrement du résultat courant avant impôt par actif non salarié en Aquitaine, avec un recul de 66,1 %. "Il ne s'agit pas de chiffres en valeur absolue et le résultat constaté en Gironde, actuellement le plus bas d'Aquitaine avec 2.600 € sur 2013, va être tamponné par la hausse des prix du vin qui n'a pas encore été prise en compte à cause du décalage lié au calendrier de la campagne viticole" a tenu à préciser Dominique Graciet.

Effet de ciseau

Cette chute du revenu courant avant impôt, qui atteint 92,6 % en Gironde, devant la Dordogne (8.900 €, - 60,9 %), les Pyrénées-Atlantiques (8.200 €, - 52,6 %), les Landes (13.600 €, - 51,3 %) et le Lot-et-Garonne (16.500 €, - 44,1 %) est donc appelée à être corrigée à la hausse. Il n'en reste pas moins que ces chutes en série ne sont pas le résultat d'un simple décalage comptable. Elles reflètent une mauvaise année 2013 marquée tout d'abord par une baisse des prix des produits, notamment en grandes cultures (céréales), et une hausse du coût des intrants (engrais, produits phytosanitaires, etc.). Effet de ciseau auquel s'ajoute "une forte baisse des volumes" liées aux intempéries : inondations historiques en début d'année dans le sud de l'Aquitaine puis violents orages de grêle sur le vignoble girondin et les cultures en Dordogne.

Le second grand point abordé par Dominique Graciet est tout aussi sensible mais essentiellement réglementaire. Il s'agit du conflit qui oppose de façon frontale les chambres régionales d'agriculture d'Aquitaine et de Midi-Pyrénées aux services de l'Etat après la modification par ces derniers du périmètre des zones vulnérables, qui fixe un plafond maximal de concentration en nitrate à ne pas dépasser par litre d'eau. Ce plafond, qui était "de 50 milligrammes (mg) par litre en 2011 a été ramené à 25-40 mg en 2012 puis 18 mg en 2013, ce qui entraîne une énorme extension de la zone de vulnérabilité et vise désormais les zones de production de maïs, tout cela sans aucune justification technique ni l'octroi de moyens adéquats pour les agriculteurs concernés" souligne Dominique Graciet.

Conflit sur les nitrates

Ce changement de doctrine a provoqué un clash lors de la réunion qui s'est tenue le 28 août dernier à Toulouse avec le préfet de Bassin Adour-Garonne : devant le refus des services de l'Etat de discuter de l'extension de cette zone de vulnérabilité, les chambres régionales d'agriculture d'Aquitaine et Midi-Pyrénées ont quitté la réunion. "C'est incompréhensible parce que les concentrations de nitrates dans les eaux en Aquitaine sont très inférieures à la moyenne nationale. Soit 8,9 mg par litre dans les eaux superficielles en Aquitaine, contre 13,9 mg en France et 19,3 mg le long de la façade atlantique. Dans les eaux souterraines cette concentration est de 11,5 mg en Aquitaine, contre 23 mg en France et 23,2 mg le long de la façade atlantique !", s'est agacé Dominique Graciet, qui dénonce un manque de professionnalisme des agents de la Dreal (Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement) "qui ne connaissent rien à l'agronomie" et une précipitation de l'Etat, pressé par Bruxelles de désigner de nouvelles zones vulnérables pour éviter une deuxième condamnation européenne.

Le plan impossible

La chambre régionale d'agriculture estime que les contraintes liées à l'extension des zones vulnérables en Aquitaine va nécessiter entre 60 et 80 M€ d'investissement pour que les agriculteurs se mettent aux normes et concerner 11 à 15.000 éleveurs (bovins, palmipèdes), "dont 50 % ne pourra pas suivre : nous avons dit au préfet, vous irez fermer les exploitations, résume Dominique Graciet qui explique que, dans le meilleur des cas 1.000 dossiers pourront être traités par an alors qu'il y en a 11.000 à boucler d'ici fin 2015". Concrètement les éleveurs vont devoir agrandir leurs zones de stockage des lisiers et fumiers puisque l'Etat n'autorisera plus leur épandage qu'une fois par an, obligeant les agriculteurs à stocker ces produits pendant neuf mois au lieu de six. "Faire tout l'épandage sur un mois et demi c'est de la folie, car il suffit qu'il fasse orage et qu'il pleuve beaucoup pour que les sols soient lessivés et les eaux massivement polluées par les lisiers et les fumiers" prévient Dominique Graciet.

Malgré ce contexte tendu, la Chambre régionale d'agriculture d'Aquitaine vient de lancer la création du Réseau régional de l'innovation, qui doit permettre une meilleure coordination dans ce domaine au service des exploitations agricoles et en relation avec l'agroalimentaire.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 1
à écrit le 12/09/2014 à 8:17
Signaler
il faut dégager ces inutiles. Opposez-vous purement et simplement !!!!!

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.