Petite enfance : Bordeaux face à la pénurie de personnel dans ses crèches

« Et si c'était vous ? » Confrontée à une pénurie de personnel dans la petite enfance, la mairie de Bordeaux lance à nouveau une vaste campagne de recrutement, avec des affiches qui tapissent les rues de la ville, pour trouver des auxiliaires de puériculture, éducateurs de jeunes enfants mais aussi cuisiniers ou psychomotriciens.
(Crédits : CC Pixabay by 89275)

Tous les profils sont recherchés, fait savoir la municipalité écologiste qui communique également sur les principaux réseaux sociaux. « À la rentrée 2023, on comptait environ 70 postes vacants dans les crèches municipales, et donc une centaine de berceaux gelés », explique à l'AFP Fannie Le Boulanger, adjointe à la petite enfance à la mairie.

À Caudéran, quartier résidentiel de l'ouest de la ville, la municipalité écologiste a effectué des travaux dans une crèche pour passer de 20 à 40 berceaux, « mais elle tourne aujourd'hui à 30 berceaux », faute de personnel, déplore l'élue. Une « énorme frustration » pour la mairie, mais surtout pour les familles qui peinent à trouver un mode de garde pour leurs enfants. La métropole girondine, qui a attiré ces dix dernières années plus de 100.000 nouveaux habitants, n'est pas un cas isolé, puisqu'il manque environ 10.000 professionnels en France, selon le syndicat national des professionnels de la petite enfance.

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« Très peu de reconnaissance »

Elodie Saint Germain dirige la crèche municipale Carreire à Bordeaux depuis deux ans. Pour 40 berceaux, elle devrait avoir une équipe d'une quinzaine de personnes. « Entre les arrêts de travail longs, très difficiles à remplacer, et le petit absentéisme, il nous manque aujourd'hui deux personnes, parfois jusqu'à quatre », dit-elle. « Cela nous arrive donc de travailler à flux tendu, de fermer ponctuellement une section ou de réduire les horaires d'ouverture », déplore-t-elle, expliquant que même si cette situation met en difficulté l'organisation des parents, « c'est le bien-être de l'enfant qui prime toujours ».

Pour elle, les métiers de la petite enfance ne sont plus attractifs à cause notamment des contraintes horaires pour des salariés vivant souvent loin, en raison de la hausse des loyers, et d'une rémunération « plutôt basse ». Une auxiliaire de puériculture en CDD a un salaire, sans prime, à peine au-dessus du Smic. Elodie Saint Germain évoque aussi le manque de flexibilité et l'importante fatigue physique et psychologique que ces métiers engendrent. Elle salue l'initiative de la mairie mais « pour résoudre le problème de fond, il faut que ça vienne de plus haut, avec de véritables augmentations des grilles de salaires ». « Un métier avec beaucoup de contraintes et très peu de reconnaissance », résume-t-elle.

« Ils rebroussent chemin »

Et pourtant, la coordinatrice pédagogique du CAP Accompagnant éducatif petite enfance (AEPE) au lycée technologique et professionnel de Bel Orme à Bordeaux, reçoit tous les ans des candidats « très motivés » pour ces métiers. « Mais ils rebroussent vite chemin faute d'avoir trouvé une alternance, alors que les structures se disent en pénurie », regrette Aude Adolphi. « L'année dernière, on a eu une trentaine de candidats et seuls quatre ont réussi à trouver un apprentissage, cinq ont accepté de faire des stages non rémunérés et les autres ont abandonné », dit-elle.

Ce cumul de difficultés tend un secteur où la pyramide des âges est très vieillissante avec des départs à la retraite difficiles à remplacer. À Bordeaux, un tiers des professionnels dans les crèches collectives ont plus de 50 ans.

« Il y a eu pendant des années un énorme manque d'anticipation des besoins du secteur. Il faut que le gouvernement en fasse aujourd'hui une priorité nationale car c'est aussi l'emploi des femmes en général qui est en jeu », lance Fannie Le Boulanger. Avec sa campagne de recrutement, « la ville de Bordeaux a décidé de visibiliser ce sujet, qui est au cœur de la vie de famille », poursuit-elle, sans espérer faire de miracles.

Car la mairie refuse autant que possible d'embaucher du personnel non diplômé, comme le permet depuis le 31 août 2022 un arrêté ministériel qui officialise les dérogations accordées « à titre exceptionnel » aux établissements en forte pénurie. La première campagne d'octobre avait débouché sur 18 recrutements pour 43 candidatures.

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Commentaire 1
à écrit le 19/02/2024 à 12:06
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"et d'une rémunération « plutôt basse »" LOL ! Un euphémisme puisque les "psychomotriciennes" qu'ils embauchent, à savoir des jeunes, sont payés moins que le smic. Les gens ne veulent pas travailler pour rien en effet, tout est dans le "pour rien" et...

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